Centre-ville reconstruit du Havre - Définition

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Une ville modèle

Si la rue conserve son statut historique, la reconstruction est également animée par l’esprit du progrès appliqué à la ville où les habitants réclament désormais « leur droit au calme, à l’air, au soleil, à l’espace ». Les outils mis en œuvre pour le confort des habitants suivront donc plusieurs logiques : celle de la modernisation (standardisation, préfabrication) mais aussi celle d’une cohérence paysagère dictée par l’utilisation d’une même méthode constructive (ossaturisme) suivant rigoureusement un trame et un vocabulaire architectural précis.

Trame de 6,24 m

D'un point de vue d’ensemble, le plan en damier du Havre permet des alignements de façade, des tracés rectilignes aérés et lumineux, une organisation rationnelle de l'espace. Dans le projet dit définitif s’ajoute le choix d’un module harmonisant l’espace depuis l’échelle urbaine (trame) jusqu’au moindre parpaing (standard).
L’utilisation symbolique de cette base de 6,24 m correspond à la portée optimale pour une poutre de béton armé à cette époque, elle est également aisément divisible ( 6 x 2 x 4 ) x 13). En générant des proportions précises (1/6 et 1/4, 1/3, 1/2), elle place l’harmonie au cœur même de la standardisation. Les architectes ne semblent pourtant pas avoir explicité les propriétés mathématiques et symboliques de ce nombre (comme l’harmonie 1/4+1/3+1/2 ou la division de 624 par 6x2x4), préférant mettre en avant des arguments pratiques : « La construction n’a pas été laissée au hasard, et l’adoption d’un module – ou trame – de 6,24 m qui se trouve dans toute la ville neuve assure son unité profonde […]. Cette trame dans laquelle peuvent être installées deux pièces d’habitation […] est non seulement en accord avec l’Économie au sens le plus élevé du mot, mais c’est aussi – et l’on s’en aperçoit sans cesse – un très réel facteur d’économie ».

Vocabulaire Perret

Parallèlement à l’élaboration des aphorismes qu'il publie sous forme de traité-recueil en 1952, Auguste Perret creuse la notion même de langage au sein de la construction, élaborant un vocabulaire parfois traditionnel (porte-fenêtre) parfois nouveaux et exotique (claustra). Des mots imbriqués, neutralisés, qu’il inscrit dans une structure primaire : la charpente de béton armé.

  • Les niveaux sont ordonnés suivant des rythmes classiques :
    • soubassement : deux premiers niveaux
    • développement : étage dit noble avec balcon filant servant à abriter la circulation des piétons, suivi de deux étages carrés, parfois dotés d’un balcon filant étroit au dernier étage
    • couronnement : étage supérieur en retrait, entablement corniche
    • toiture terrasse
  • Le vocabulaire architectural :
    • structure apparente : colonnes, pilastres, chapiteaux, poutres ou chaînages
    • remplissages : trumeaux, claustras, « fenêtres en hauteur » (portes-fenêtres)
    • rythme : entablements, corniches
    • volumes : balcons, loggias, galeries sous portique.
  • Le matériau :
    • béton armé (constituants : graviers de Seine, grès rose, quartzite blanche, brique concassée)
    • finitions des surfaces : bouchardage, lavage, polissage, brut de décoffrage
    • quelques bâtiments en briques (Saint François), pierre reconstituée ou pierre de taille

Les logements

La plupart des biens reconstruits dans le centre sont soit des propriétés publiques, soit des « copropriétés », un concept novateur pour l'époque qui va être étendu à l’ensemble de la ville reconstruite. Disposant de 20% de logements sociaux (proches ou intégrant les normes H.L.M.), la grande majorité des logements est conçue pour des classes moyennes, sans domestique. L'espace intérieur, très lumineux (les « fenêtres en hauteur » laissent pénétrer la lumière dans le salon, la cuisine et les chambres), est distribué de façon optimale. Ces immeubles sont équipés pour la majorité de chauffages collectifs (circuit d’eau ou air pulsé), placards encastrés, vide-ordures, garages à vélos et voitures d'enfant, caves en sous-sol, garages à automobiles, isolations thermique et phonique, ascenseurs au-delà de quatre étages...

Les I.S.A.I.

Les Immeubles sans Affectation Individuelle (ou Immédiate), les I.S.A.I., préfinancés par l’État et dessiné d’après un concours interne dans l’Atelier Perret (1945-1946), servirent de modèle à l'ensemble de la reconstruction (définition de la trame, des méthodes constructives, des plans intérieurs, etc.). Réalisés entre 1947 et 1950, ces 350 logements s’agencent à la manière d’une grande place royale se déployant symétriquement autour de la place de l’hôtel de ville pour former des îlots ouverts constitués en réalité d’un agencement très rationnel de barres de quatre étages et de six tours de dix étages que l’on percevait alors comme les premiers « buildings » français. Situé dans les I.S.A.I. et ouvert en mars 2006, l’appartement témoin Perret est un musée de la Ville du Havre consacré à l’architecture intérieure, ainsi qu’à l’ameublement et à la vie quotidienne dans la première moitié des années 1950.

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