Exception faite de l’église Saint-Joseph - véritable phare au milieu de la ville - les ensembles monumentaux se situent aux extrémités du « triangle monumental » structurant le plan d’ensemble de la reconstruction. Leur dessin a fait l’objet d’une attention toute particulière d’Auguste Perret.
Considérée comme une architecture majeure du XXe siècle, l'Église Saint-Joseph est le dernier manifeste d'Auguste Perret. Imaginée sur la base du projet parisien de l’église Sainte-Jeanne-d’Arc (1924), l’église reconstruite - dessinée de sa main - fut conçue à la fois comme un sanctuaire dédié au culte et un monument honorant la mémoire des victimes de la Seconde Guerre mondiale. Les travaux débutèrent fin 1951 pour se terminer en décembre 1956 avec l'achèvement de la tour. La réalisation de l'édifice fut confiée à Raymond Audigier. À la mort d'Auguste Perret, en 1954, l'église fut terminée par Georges Brochard qui tenta de traduire ce que désirait son maître pour la forme du clocher. Elle est inaugurée en juin 1957 et consacrée en 1964.
L'église dispose d’une tour-clocher octogonale atteignant 110 mètres de hauteur et reposant sur un socle carré légèrement étendu vers l’avant (entrée ouest) et l’arrière (chapelle, sacristies). Le plan centré anticipe les réformes de Vatican II. Perceptible de l’extérieur, la structure se dévoile en entrant dans l’édifice : quatre pans de la tour octogonale sont déportés vers des bracons reposant sur une série de quatre fois quatre piliers maintenus par des croix de Saint-André. Le ceinturage de l’ensemble est assuré par un béton précontraint, première utilisation de cette technique en dehors des ouvrages d’arts (ponts). La tour-lanterne fait entrer la lumière dans l'édifice grâce à des vitraux multicolores conçus par la « spatiocoloriste » et maître verrier Marguerite Huré.
Premier édifice moderne à faire l’objet d’une protection patrimoniale, l’église Saint-Joseph sera inscrite au titre de la loi sur les monuments historiques en 1965. En 1997, elle est parée d'un habillage lumineux, puis d'importants travaux de restauration sont entrepris entre 2003 et 2005. La tribune a été dotée d’un orgue à tuyaux, inauguré le 25 septembre 2005.
Œuvre des architectes Auguste Perret et Jacques Tournant, l'hôtel de ville est inauguré en 1958. Le premier pieu du corps central est coulé en 1953, la tour de 18 étages et 72 mètres de haut évoquant initialement un beffroi est commencée en 1954. Le théâtre attenant est inauguré en octobre 1967. L'extension sur la façade nord de l'édifice, indispensable mais esthétiquement discutable, date de 1987. Comme tous le édifices majeurs, l’hôtel de ville retrouve approximativement sa position d’avant-guerre. Situé dans la perspective d’une vaste place, le bâtiment établit une dialectique entre deux unités : une tour abritant les bureaux administratifs et un bâtiment en longueur rythmé par une imposante colonnade dans lequel se placent des fonctions de « réception » comme les grands salons. Un vaste escalier part du rez-de-chaussée pour se diviser en deux volées distribuant l’étage noble. Tel un « abri souverain » la colonnade soutient totalement la charge du toit terrasse qui abrite une structure secondaire supportant les planchers et de vastes baies vitrées.
Le jardin de la partie sud de la place de l'hôtel de ville a été dessiné personnellement par Perret. Cette immense place a été transformée en 1990 : rétrécissement du boulevard qui la divisait en couloir de bus, création d'un parking souterrain, ajout de fontaines, d'arbres et de treillages en bois exotique, agrandissement des pelouses et des espaces fleuris.
Sortant des plans de l'Atelier de Reconstruction Perret en 1950, cette place s'inspire du projet de la Porte Maillot à Paris qu’Auguste Perret présente en 1930. La partie nord, construite par Jacques Poirrier de 1951 à 1953, a bénéficié de techniques de préfabrication étendue grâce à un usinage complet des structures et des remplissages (système Monod). La partie sud a été construite par André Hermant de 1951 à 1956 à l’aide de la technique plus traditionnelle du coffrage en bois pour les structures.
Seul point de jonction entre la ville reconstruite et la mer, la Porte Océane forme un décor monumental et représente de manière symbolique la porte de la cité évoquée par Édouard Herriot, laissant entrevoir aux Havrais se promenant sur l’avenue Foch le passage des grands paquebots. Il s'agit d'un ensemble constitué de deux tours jumelles de 13 étages, hautes de 47,50 mètres, et de deux immeubles bas, situés à l'extrémité de l'avenue Foch. Inscrites sur cette prestigieuse avenue et disposant d’une vue sur mer, les 256 logements disposent de grandes surfaces et d’équipements soignés (par exemple, un chauffage collectif réglable individuellement).
La réalisation d’un front de mer sud monumental apparaît dans les premiers projets de 1945. Il a finalement été réalisé par une trentaine d’architectes proches de Perret dirigés par Pierre-Edouard Lambert, il est intégré au programme national de construction du « Secteur industrialisé » (24 mai 1951) et échappe ainsi aux exigences du permis de construire. Constitué de 1127 logements, situés en bas des normes H.L.M. (ainsi les plafonds sont abaissés sous 2,5 m), ce groupe d’habitations a été imaginé d’un seul tenant. Premier en France à dépasser les mille unités, il peut être considéré comme le premier grand ensemble, à condition de ne pas tenir compte de son inscription urbaine et de ses gabarits classiques. Outre des normes sociales spécifiques, l’ordre architectural choisi reste celui du monumental : situé sur un Front de mer attenant à l’entrée de port, il joue un rôle déterminant dans la perspective de la ville vue depuis les grands transatlantiques (les deux tours décalées et les bâtiments bas en redents figurent une anamorphose de la Porte Océane).
Anciennement Lycée de jeunes filles, Pierre-Edouard Lambert a édifié ici, entre 1950 et 1956, le premier établissement scolaire de la reconstruction.
Architecturalement traité comme un monument évoquant même quelques grands chantiers d’Auguste Perret (Palais d’Iéna), il s’organise autour d’une vaste cour protégée des vents dominants par le bâtiment central abritant des salles de classe amplement éclairées (fenêtres à l’est). Il a bénéficié d'une restauration complète et, au nord, une extension récente a été intégrée au bâtiment d'origine (Pierre Dubus, 2004).
Situé entre le Bassin du commerce et la place Jules Ferry, l’ancien palais de la bourse puis chambre de commerce, est un bâtiment majestueux créé par l'architecte Othello Zavaroni (1953) et inauguré le 22 juillet 1957. Entièrement réhabilité en casino (depuis le 1er juin 2006), il a pratiquement conservé son aspect extérieur originel. Célèbre enseignant en architecture, Zavaroni décline ici un éclectisme « beaux-arts » moderne au vocabulaire proche de Perret revisité suivant les critères modernistes (claustras) sur fond d’ordonnancement classique (colonnade, abri souverain) assez strict mais efficace. L'intérieur a été profondément modifié, les deux fresques monumentales (dont une visible depuis la place Jules Ferry) ont été conservées. Les 12 000 m² accueillent aujourd'hui un ensemble comprenant casino, restaurants, salle de spectacle modulable de 500 places, bars, centre de remise en forme avec patio à ciel ouvert, hôtel et salles de réception. La place Jules-Ferry, dotée à présent d'un bel aménagement paysager démode définitivement le square Erignac voisin. Vieillot et cloisonné, il bouche malheureusement la vue du casino depuis le boulevard de Strasbourg et forme une barrière sur le chemin du centre commercial Coty. L'accès depuis la zone piétonne semble à présent demander de sérieux aménagements.
Construit par Alexandre Franche, Henri Vernot et Noël Boucher, architectes havrais, le grand magasin « Le Printemps » diffère des autres bâtiments de la reconstruction car il a été dessiné en courbe. Il était à l'époque presque complètement vitré, ce qui le rendait transparent, lumineux et très esthétique. Il n'a malheureusement pas bénéficié d'une restauration extérieure digne de ce nom, les vitrages des étages étant occultés ainsi que certaines vitrines (également plus petites qu'à l'origine).
L’ E.S.C. est un bâtiment d'angle aux colonnes majestueuses fidèle à l'esprit de l'atelier Perret, il a été conçu par l'architecte Robert Royon (1954). L'immense quadrillage vitré laissait apparaître un imposant escalier hélicoïdal jusqu'en 1993, année où il fut sacrifié pour étendre la superficie des étages.
Le Musée des Beaux-Arts André Malraux, réalisé de 1959 à 1961 par Guy Lagneau, Michel Weill, Jean Dimitrijevic et Raymond Audigier.
C’est le premier musée de France à être reconstruit après la Seconde Guerre mondiale. Le bâtiment se présente comme une élégante boîte de verre, d’aluminium et d’acier. La lumière, filtrée par des brise-soleil (paralumes de Jean Prouvé), pénètre de tous les côtés. Le musée des beaux arts, à l'intérieur totalement modulable, fut mis en service en 1961. Inauguré par André Malraux, le musée abritait la première Maison de la Culture de France (jusqu’en 1967 où celle-ci sera transférée au Théâtre de l'Hôtel de Ville puis au Volcan, espace Oscar Niemeyer, depuis sa construction).
Elle est formée de deux bâtiments perpendiculaires : les salles de lecture et les réserves. Le toit du bâtiment principal, à l'instar de l'église Saint-Michel, évoque un livre ouvert. Architectes : Jacques Tournant et Jacques Lamy (1963).
La reconstruction de l'église Saint-Michel (1960-1964) fut confiée à Henri Colboc, un des architectes locaux actifs dans la reconstruction du Havre.
La forme de la toiture représente une bible ouverte et l’entrée est surmontée par une gigantesque croix en teck. Pas de clocher, mais un campanile de 42 mètres de haut, séparé de l'église, évoquant un cierge. La restauration de l'ensemble est entamée en 2007, le bâtiment est aujourd'hui mis en valeur la nuit par une lumière discrète et soignée. Intérieur : vaste halle carrée, l’église comprend des chapelles latérales hors-œuvre, un éclairage doux assuré par des bandeaux de vitraux aux tons marrons situés en hauteur et au-dessus du portail d’entrée. Mobilier : une vierge en métal galvanisé provenant de l’église détruite par les bombardements, une importante tapisserie réalisée par les paroissiens, un mobilier en teck massif très robuste.
Bâtie dans une parcelle de cinq hectares située sur l’ancien emplacement des chantiers navals à partir de 1966 (2ème tranche terminée en 1985), son architecture est due à Georges Candilis et à un architecte local (Jacques Lamy).
L’ensemble forme une « mégastructure » directement inspirée par les dernières théories du Mouvement moderne pendant son dernier congrès. Georges Candilis reprend les plans déjà réalisés avec Alexis Josic et Shadrach Woods au Mirail à Toulouse (1961). Totalement indépendante du reste de la ville, la mégastructure définit une trame hexagonale (en nid d’abeille) avec des élévations en gradins de 6, 8, 10 et 12 étages, elle comprend des galeries internes et de nombreux passages entre les différents volumes. Intérieurs : l’immeuble est épais (14,70 mètres, balcons non compris) et les appartements (environ 1 200) sont traversants, leur distribution est déterminée par la position centrale des lieux d’hygiène et des dégagements qui séparent totalement les « espaces nuit » (chambres, salles de bains, WC) et les « espaces jour » (cuisine, séjour, salle).
Réalisé par Oscar Niemeyer entre 1978 et 1982, sur l'ancienne place Gambetta qui accueillait avant la Seconde Guerre mondiale le Grand Théâtre, l’espace culturel du Volcan comprend un théâtre (Scène nationale), une salle polyvalente (le Petit Volcan), un cinéma d’art et d’essai et diverses pièces (studios d'enregistrement, bureaux...). Suivant la voie du formalisme blanc de Le Corbusier, Oscar Niemeyer réalise au cœur de la ville une importante forme libre comprenant deux grands volumes hyperboliques - plus ou moins dissymétriques - plongés dans une agora et placée dans un creux accessible par un escalier ou des rampes, dont une est hélicoïdale. À l'intérieur, les murs sont en béton brut de décoffrage. L’accueil du théâtre, le grand foyer avec murs en pente et fenêtres en meurtrière, le foyer des artistes, ont conservé leur aménagement d’époque (banque d’accueil et bar en béton, moquette mauve, fauteuils et tables d’Oscar Niemeyer, luminaires globes en grappes). L'état de l'extérieur du bâtiment, des abords et des aménagements est assez mauvais.