Elle avait l’intention de battre un record particulier avec un Messerschmitt Bf 108 Taifun : faire un aller-retour Allemagne-Asie en 24 heures. À la place des sièges, elle fit monter deux réservoirs auxiliaires.
Elle décolla de Gleiwitz le 13 août 1935 à 3 heures 30 du matin. À six heures, elle avait déjà survolé cinq pays. À 9 heures 20, elle atterrissait à Yeşilköy, sur la rive asiatique du Bosphore, fit une heure de pause et prit le chemin du retour. Comme elle voulait revenir à Berlin, elle devait faire 450 km de plus qu’à l’aller. Peu avant Berlin, elle pénétra dans une zone d’intempéries (la Lufthansa avait interrompu ses vols sur Berlin) mais continua et atterrit à Tempelhof. Il était 18 h 08 et elle avait franchi 3 470 km. Elle y fut félicitée par Ernst Udet.
En septembre 1935, Elly Beinhorn assista à une course automobile sur la piste de Masaryk près de Brünn et y fit la connaissance du pilote de course Bernd Rosemeyer. Les deux eurent bientôt une liaison mais elle ne voulait pas se marier. Elle était au sommet de sa carrière, pouvait tester les tout nouveaux avions de course et tenait sans cesse des conférences. Bernd Rosemeyer et elle finirent par se marier le 13 juillet 1936.
En cadeau de mariage, elle reçut un Bf 108 Taifun flambant neuf et elle commença à s’entraîner pour son prochain record : joindre 3 continents en 24 heures. Pendant ce temps, Rosemeyer s’entraînait sur le Nürburgring pour le Grand Prix d’Allemagne.
À cette même époque avaient lieu les Jeux olympiques à Berlin. Rosemeyer s’entraînait à Livourne et elle rejoignit Damas en passant par Constantinople. C’était le point de départ de son vol spectaculaire : joindre 3 continents en 24 h. Elle décolla le 6 août 1936 à deux heures du matin. Au lever du soleil, elle avait atteint Le Caire et y fit une escale. Du Caire, elle rejoignit Athènes en survolant la Méditerranée. Lorsqu’elle voulut en repartir direction Berlin, une pierre projetée par les roues arracha la gouverne de direction de son avion. Les techniciens de Lufthansa présents sur place réparèrent les dégâts aussi vite qu’ils purent et elle redécolla comme prévu. Elle atterrit à Berlin-Tempelhof après avoir franchi 3 750 km et où l’attendait son mari.
Ils partirent en voyage de noces en Afrique du Sud et son mari découvrit le pilotage. Il prit des cours et s’acheta un Klemm Kl 35.
Leur fils Bernd naquit le 12 novembre 1937 à Berlin. Elle avait continué à piloter pendant sa grossesse, ce qui lui avait valu des critiques véhémentes. Le 28 janvier 1938, la voiture de son mari qui tentait de battre un record de vitesse sur l’autoroute de Darmstadt fut soulevée par une rafale latérale à 440 km/h et fit plusieurs tonneaux. Il mourut sur le coup.
Elly Beinhorn choisit de voler pour oublier. Laissant le petit Bernd chez ses grands-parents, elle partit en Perse puis aux Indes et au Siam. Elle revint par la Turquie, les Balkans et la Hongrie.
La Seconde Guerre mondiale commença à l’automne 1939 et il n’était plus question de faire du pilotage de compétition. Elle était clouée au sol, son Taifun effectuant des vols de liaison pour la Luftwaffe. Elle se remaria en 1942 avec l’industriel Karl Wittmann (1904–1976). Ils eurent une fille, Stéphanie, qui naquit la même année.
Il eut été possible de continuer à voler au service de la Luftwaffe : Beate Uhse, Hanna Reitsch et la comtesse Schenk von Stauffenberg le firent bien mais elle avait deux enfants en bas âge. Sa maison à Berlin bombardée, tous les souvenirs détruits, la famille fuit en Prusse-Orientale. Lorsque la ligne de front se rapprocha, elle traversa l’Allemagne en ruines avec ses enfants et finit par s’arrêter à Trossingen, sur le haut plateau de Baar.
Après le conflit, interdiction était faite aux Allemands de piloter. Elle allait souvent sur le terrain de vol à voile de Klippeneck (Alpe Souabe) et à la fin de l’été 1948, le commandant français du terrain (qui la connaissait), lui demanda si elle voulait voler. Elle apprit à piloter les planeurs. Elle renouvela son brevet de pilote en Suisse au printemps 1951 sur un Piper, car c’était toujours interdit en Allemagne. Elle travailla comme journaliste et photographe pour un magazine et alla entre autres en Italie, en Afrique, en Finlande.
Lorsque l’interdiction de voler en Allemagne fut levée, elle y renouvela aussitôt sa licence de voltige aérienne. En 1959, elle participa à la 13e « course de la houppe à poudrer » et y remporta la médaille d’or dans l’épreuve du vol en étoile européen. En 1963, elle finit première dans la catégorie féminine du « vol européen » et deuxième pour le « vol en étoile au-dessus des Alpes ». Elle déménagea avec ses enfants à Fribourg-en-Brisgau où elle écrivit des livres et des histoires pour la radio.
En 1968, son fils épousa la comtesse Michaela zu Castell-Rüdenhausen (*1945), la fille du commandant de bord Wulf Diether comte zu Castell-Rüdenhausen (1905-1980) et de sa deuxième épouse, l’actrice Luise Ullrich (1910-1985).
Elle rendit d’elle-même sa licence à 72 ans, en 1979. Elle finit ses jours dans une maison de retraite près de Munich. Elle fêta ses 100 ans le 30 mai 2007 avec sa famille.
Elly Beinhorn mourut le 28 novembre 2007 à l’âge de 100 ans.