L'utilisation polémique de la loi « linéaire sans seuil » consiste à calculer le nombre de cancers provoqués par une très faible dose de radiation à laquelle est exposée une très grande population. La relation « linéaire sans seuil » conduit directement à des calculs impliquant une « dose collective », exprimée en homme.sievert, où une faible dose est multipliée par la population qui la subit. Dans l'hypothèse linéaire, en effet, on obtiendra le même résultat en exposant vingt million de personnes à un micro-sievert, ou vingt mille personnes à un mili-sievert, ou vingt personne à un sievert : dans tous les cas, la dose collective de vingt personnes.sievert conduira à un cancer supplémentaire (à raison de 5 % de cancer par sievert). Typiquement, si la population française (de 60 millions d'habitants) est exposée à une radioactivité moyenne de 2,5 mili-sievert par an (l'exposition moyenne aux radiations naturelles), et qu'une exposition aux rayonnements provoque un excès de cancer de 5% de cancer par sievert, cette exposition provoque globalement 60.106 x 2,5.10-3 x 5 % = 7 500 cancers par an, c'est-à-dire 2,3 % des cancers observés.
Le rapport conjoint de l'académie des sciences et de l'académie de médecine d'avril 2005 a été publié en réaction à une étude de l’estimation de la part de cancer attribuable au radiodiagnostic construite précisément sur l'hypothèse de linéarité, sans seuil, de la relation entre le risque de cancer et la dose de radiations ionisantes. Cette étude concluait que 0,6 % à 3 % des cancers seraient attribuables au radiodiagnostic, mais si la relation « linéaire sans seuil » n’est pas fondée, ces estimations ne seraient que des constructions de l’esprit.
Le dilemme est manifeste si l'on prend par exemple le cas de la présence domestique du radon. Si l'on transpose les résultats observés sur les mineurs par une loi « linéaire sans seuil », il serait alors responsable de près de 5 à 10 % des cancers du poumon, causant entre 1000 et 3000 morts par an en France parce que les faibles doses d'irradiation correspondantes concernent une très grande population. Dans cette logique, on peut être conduit à penser qu'il serait bon de supprimer totalement le radon dans les habitations. Cependant, si l'effet inverse suggéré par les travaux du Pr. Cohen n'est pas pas un artefact, une telle politique empêcherait la population concernée de profiter d'un effet d'hormèse qui semble présenter un maximum aux alentours de 200 ou 300 Bq/m3. Dans ce cas, outre le fait qu'une telle politique d'éradication serait extrêmement coûteuse, c'est au contraire cette même politique qui provoquerait entre 1000 et 2000 morts par an en France, parce que la population n'aurait pas pu profiter de l'effet de vaccination éventuel de faibles doses d'irradiations. Dans un contexte où l'on sait par ailleurs que les statistiques disponibles ne permettent pas de trancher avec certitude, on comprend que ces questions soient extrêmement polémiques.
Environ 50 millions d’examens radiologiques sont effectués en France chaque année qui délivrent en moyenne 1 mili-sievert par an à chaque Français. Selon la fonction utilisée, on peut déduire, soit qu’ils pourraient induire quelques milliers de cancer, soit qu’ils ne présentent aucun danger significatif.
L’évaluation du rapport entre bénéfice et risque est imposée en radiologie par la directive européenne 97-43. Les risques éventuels dans la gamme de dose des examens radiologiques (0,1 à 5 mSv ; jusqu’à 20 mSv pour certains examens) doivent être estimés en tenant compte des données radiobiologiques et de l’expérimentation animale. Cependant, il apparaît que les mécanismes biologiques sont différents pour des doses inférieures à quelques dizaines de mSv et pour des doses supérieures. L’usage d’une relation empirique qui n’est validée que pour des doses supérieures à 200 mSv pourrait, en surévaluant les risques faire renoncer à des examens susceptibles d’apporter au malade des informations utiles. Elle pourrait aussi en radioprotection conduire à des conclusions erronées.
Le risque dépend de l'âge du patient puisqu'il est à distance : un scanner multicoupe à 80 ans n'a pratiquement aucun risque (le patient a toute chance de mourir d'autre chose dans les quarante ans à venir). Ce n'est pas le cas chez un adolescent.
Les décideurs confrontés au problème des déchets radioactifs ou au risque de contamination doivent réexaminer la méthodologie utilisée pour évaluer les risques des très faibles doses et des doses délivrées avec un très faible débit. Si les effets des faibles doses d'irradiation sur la santé ne sont pas seulement faibles (donc difficiles à identifier) mais pratiquement nuls en dessous d’un niveau qui resterait à définir, de nombreux pans des politiques publiques dans ce domaine n’ont pas de justifications scientifiques.