Intelligence animale - Définition

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Histoire

Dans l'antiquité

Savoir si l'animal est doté de raison est une question que les humains se posent depuis les débuts de la philosophie et de la science. En Occident, des philosophes comme Platon, Aristote ou Descartes ont grandement contribué à la réflexion sur l'intelligence animale.

Aristote (384-322 av. J.-C.) croyait que l'homme était le seul des animaux à posséder le logos (mot grec, traduit approximativement en français par « la raison ») et l'« âme pensante ». Il concédait toutefois aux animaux la phronesis (intelligence pratique). Cette distinction entre une intelligence reposant sur la raison, la conscience de soi et la capacité de manipuler des concepts abstraits et une intelligence pratique plus associée à la ruse et à la résolution de problèmes concrets, influença grandement les théories scientifiques ou philosophiques sur l'intelligence animale.

Le Discours de la Méthode de Descartes (1637).

Cartésiens contre empiristes et sensualistes (XVIIe et XVIIe siècles)

Au XVIIe siècle, le philosophe français René Descartes (1596-1650) marqua l'imaginaire collectif avec sa théorie des animaux-machines. Il exposa sa vision de l'intelligence animale à travers deux textes : la cinquième partie du bien connu Discours de la méthode et la fameuse lettre au marquis de Newcastle. Pour Descartes, il n'existe aucune machine qui puisse utiliser les signes ou le langage et encore moins accéder à l'universalité. Les animaux se rapprocheraient des machines en ce qu'ils n'ont pas la faculté de réfléchir de manière abstraite et adaptée à chaque situation :

« Et je m'étais ici particulièrement arrêté à faire voir que s'il y avait de telles machines qui eussent les organes et la figure extérieure d'un singe ou de quelque autre animal sans raison, nous n'aurions aucun moyen pour reconnaître qu'elles ne seraient pas en tout de même nature que ces animaux ; au lieu que s'il y en avait qui eussent la ressemblance de nos corps, et imitassent autant nos actions que moralement il serait possible, nous aurions toujours deux moyens très certains pour reconnaître qu'elles ne seraient point pour cela de vrais hommes : dont le premier est que jamais elles ne pourraient user de paroles ni d'autres signes en les composant, comme nous faisons pour déclarer aux autres nos pensées : car on peut bien concevoir qu'une machine soit tellement faite qu'elle profère des paroles, et même qu'elle en profère quelques-unes à propos des actions corporelles qui causeront quelque changement en ses organes, comme, si on la touche en quelque endroit, qu'elle demande ce qu'on lui veut dire ; si en un autre, qu'elle crie qu'on lui fait mal, et choses semblables; mais non pas qu'elle les arrange diversement pour répondre au sens de tout ce qui se dira en sa présence, ainsi que les hommes les plus hébétés peuvent faire. »

Au XVIIe siècle, la théorie des animaux-machines est encore défendue par Nicolas Malebranche (1638-1715). Pour un naturaliste comme Buffon l'animal n'est qu'un automate.

En revanche, pour les empiristes comme Locke et plus tard les sensualistes comme Condillac, la théorie des animaux-machines n'est pas tenable. François Bernier (1620-1688) rétorque contre cette thèse que personne ne pourra jamais croire qu'un animal écorché vif ne puisse avoir aucune sensation. À travers ce débat, c'est Réaumur (1683-1757) qui semble être le plus enclin à accorder la plus grande part d'intelligence à l'animal. Il va jusqu'à placer certaines des compétences animales au-dessus de celles de l'homme. En 1700, le philosophe John Locke (1632-1704) ouvre la porte au compromis.

XIXe siècle : Darwin, Romanes

Le béhaviorisme prend forme à la fin du XIXe siècle et atteint son apogée dans les années 1960. Charles Darwin (1809-1882), dont les écrits ont eu une influence sur les fondateurs de la psychologie moderne, a reformulé la question sur l'intelligence animale, entre autres dans son livre L'Origine des espèces mais aussi, plus tard, dans "L'expression de l'émotion chez l'homme et chez les animaux". Pour lui, les mécanismes d'évolution ne s'appliquent pas exclusivement aux caractères physiques mais également au fonctionnement mental et aux émotions. Il amène l’idée, nouvelle pour l'époque, que les expressions humaines du visage, et par là, la psychologie, ne sont pas fondamentalement différentes de celles des animaux.

C'est en 1882 que George J. Romanes (1848-1894) publie son livre Animal Intelligence dans lequel il évoque l'« inférence subjective » qui implique que les activités des organismes non-humains sont analogues aux activités humaines. Sa méthode contribua à l'établissement de la théorie du béhaviorisme strict avec John B. Watson (1878-1958) puis B. F. Skinner (1904-1990).

Développement de l’éthologie moderne

Konrad Lorenz (à gauche) et Nikolaas Tinbergen (à droite).

Konrad Lorenz (1903-1989), pionnier dans l’étude du comportement animal, a travaillé avec l’approche expérimentale qui puise sa source au béhaviorisme et à la pensée de Darwin. Ses observations du monde animal l’ont amené à l’élaboration de grandes théories sur le comportement animal. L’ensemble de ses découvertes et le développement de modèles de comportements sociaux et individuels lui ont valu le prix Nobel de physiologie en 1973. L’Université de Vienne lui a aussi rendu hommage en nommant l’institut d’éthologie par son nom. Le milieu des années 50 a été une période prolifique pour les scientifiques du domaine de la zoologie et de la biologie. Les théories de Lorenz et Tinbergen se retrouvent à la base des études qui seront faites par la suite.

Pierre-Paul Grassé, zoologiste français, fut très influent dans les années 50 et 60 et permit par l’Organisation de Congrès la rencontre de chercheurs venant de plusieurs domaines différents. Lors du colloque « L’instinct dans le comportement des animaux et de l’homme » en 1954, des béhavioristes américains, Daniel Lehrman et Theodore Schneirla, confrontent les théories de Lorenz.

Les années 60 se jouent sous le signe de la psychologie grâce à la contribution de Henri Piéron et Étienne Rabaud. Ils mettent sur pied un institut inter-facultés de psychologie à l’Université de Paris en 1921 (aujourd’hui Institut de Psychologie Paris V). C’est à ce moment que des cours, de plus en plus populaires, de psychophysiologie sont dispensés, et ainsi s’inscrit le lien étroit entre biologistes, zoologistes et psychophysiologistes. Cette chaire de recherche se développera jusqu’au début des années 1960.

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