Prise d'otages du Vol 8969 Air France | |
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Date | 24 décembre 1994 - 26 décembre 1994 |
Type | Prise d'otage |
Mort | 7 (dont les quatre preneurs d'otage) |
Blessé | une dizaines de membre du GIGN 13 passagers 3 membres de l'équipage |
Auteur | Abdul Abdallah Yahia et trois autres membres du GIA |
Organisation | Groupe islamique armé |
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La prise d'otage du vol Air France 8969 (AF8969, AFR8969), vol d'Air France reliant Alger à Paris, par quatre islamistes algériens membres du Groupe islamique armé (GIA), se déroula entre le 24 et le 26 décembre 1994 et se solda par la mort des quatre terroristes à Marseille lors de l'assaut du GIGN, et par celle de trois passagers, exécutés pour faire pression lors des négociations avec les gouvernements algérien puis français. L'objectif présumé de l'attentat était de faire exploser l'avion en vol au-dessus de Paris ou de le faire écraser sur Paris, par exemple sur la Tour Eiffel.
La prise d'otages est initiée à Alger, où l'appareil, un Airbus A300 de 220 passagers, stationne deux jours ; l'avion décolle ensuite vers Paris mais doit faire une escale à Marseille pour ravitaillement en carburant, au cours de laquelle l'assaut réussi du GIGN met fin au détournement. Treize personnes sont blessées lors de l'assaut. Cet évènement a entraîné l'arrêt des vols Air France vers l'Algérie jusqu'en 2003.
Les quatre preneurs d'otages faisaient partie du Groupe islamique armé (GIA). Le meneur est Abdul Abdallah Yahia alias "l'Émir", 25 ans, ancien marchand de légumes et proche de Djamel Zitouni. Les trois autres, également algériens, en raison de leur comportement, auraient été surnommés le tueur, le fou et le simplet par les passagers.
Le 24 décembre 1994, à l'aéroport Houari Boumedienne d'Alger, quatre hommes armés, arrivés au pied de l'appareil dans un véhicule portant le label Air France, entrèrent dans l'avion lors de l'embarquement du vol AF8969. Ils se présentèrent à l'équipage de cabine comme policiers, puis vérifièrent les passeports des passagers. Les autorités algériennes s'inquiétant de l'immobilisation de l'avion envoyèrent les « ninjas » (équivalent algérien du GIGN) près de l'avion. Constatant leur approche, les quatre hommes les désignèrent comme « impie » en arabe, puis prirent le contrôle de l'avion en déclarant être des mujâhidîn et brandissant armes et explosifs. Ils exigèrent des femmes de se voiler et de ne pas s'asseoir à côté des hommes, et certaines furent immédiatement converties de force à l'Islam en passant le rituel qui consiste à répéter trois fois la chahada.
Le commando exigea la libération de deux responsables du Front islamique du salut : Abbassi Madani et Ali Belhadj. Devant le refus des autorités algériennes, les preneurs d'otage exécutèrent à 14 heures un premier passager, identifié comme policier algérien, sur la passerelle avant de l'avion. Quelques minutes après, ils reprirent le contact avec la tour de contrôle de l'aéroport et exigèrent des autorités qu'elles laissent l'avion décoller, en menaçant d'exécuter d'autres passagers en cas de refus : l'avion était bloqué parce qu'une passerelle d'embarquement y était encore attachée. Ils demandèrent que les ninjas s'écartent de l'avion et reculent la passerelle d'embarquement, mais les autorités algériennes refusèrent d'obtempérer. A contrario, la cellule de crise des autorités françaises à Paris estimait qu'il était préférable de laisser décoller l'avion.
Le Premier ministre français Édouard Balladur voulu négocier la libération des femmes et des enfants en échange de l'autorisation de décoller pour Paris. Le commando accepta et libéra 63 passagers. Mais quand l'ordre fut donné au colonel des ninjas de reculer la passerelle, il refusa. De plus, les autorités algériennes firent intervenir la mère du chef du commando en lui faisant prendre contact avec lui par radio pour le supplier de se rendre. Ces actions rendirent Yahia fou de rage et il fit abattre un second passager : un diplomate vietnamien.
Les négociations entre les ninjas et les gouvernements français et algérien se terminèrent dans une impasse. À 21 h 30, le soir de Noël, un jeune employé de l'Ambassade de France, Yannick Beugnet, fut choisi parmi les passagers pour envoyer un message à la tour de contrôle. Il transmit le message des preneurs d'otage, que si l'avion ne pouvait décoller immédiatement il serait abattu. La situation avec les autorités algériennes étant restée au point mort, à 22 h il fut abattu d'une balle dans la tête et son corps jeté hors de l'avion. Le commando envoya un message à la tour de contrôle en menaçant de tuer un passager toutes les trente minutes si l'autorisation de décoller pour Paris n'était pas donnée.
Édouard Balladur proposa l'intervention du GIGN sur l'aéroport d'Alger, mais le gouvernement algérien refusa. Ayant appris la présence de vingt bâtons de dynamite à bord de l'avion, les autorités françaises décidèrent d'intervenir et de préparer un commando, sous la responsabilité de Denis Favier, qui partit pour Alger à bord d'un avion d'où ils en apprennent les moindres recoins. L'Algérie ne leur ayant pas donné l'autorisation d'atterrir sur leur sol, après deux heures à tournoyer ils furent envoyés le plus près possible d'Alger, c'est-à-dire à Majorque.
Suite à l'assassinat du jeune français, le Premier ministre exige et obtient le décollage de l'avion en menaçant de rendre officiellement aux yeux de la communauté internationale l'Algérie responsable de la mort des otages. Le 26 décembre à 2 heures du matin, près de 40 heures après la prise d'otage, le vol AF8969 fut autorisé à quitter Alger grâce à la pression du gouvernement français et l'escalier fut retiré. Les contrôleurs aériens reçurent secrètement l'ordre de dire aux preneurs d'otage que leur réserve de carburant était trop entamée pour aller jusqu'à Paris. La ville de Marseille fut choisie comme escale pour effectuer un plein de carburant. Le commando du GIGN quitta l'Espagne et rejoignit l'aéroport de Marseille-Marignane vingt minutes avant le vol 8969.
Le vol AF 8969 se posa à 3 heures 30 du matin. Fatigués par la prise d'otage, le commando maintint le silence radio et en profitèrent pour dormir.
Pendant ce voyage les services du ministre de l'Intérieur Charles Pasqua furent informés de l'objectif probable des preneurs d'otage et décidèrent que l'avion ne devrait pas quitter Marseille, quel qu'en soit le coût.
Le commando reprit contact avec la tour de contrôle et exigea 27 tonnes de carburant. Huit tonnes auraient suffi pour rejoindre Paris, ce qui conforta le gouvernement français dans l'idée que leur intention était de transformer l'avion en bombe volante. Le commando expliqua qu'il souhaitait rejoindre Paris pour y donner une conférence de presse. Les autorités leur répondirent que tous les journalistes du monde étaient à Marseille et qu'il ne servait à rien d'aller à Paris. La solidité de l'argument perturba le commando qui accepta l'organisation d'une conférence dans l'avion. Il tomba alors dans le piège du GIGN : en effet, l'avant de l'avion fut vidé et les passagers amenés vers l'arrière. L'organisation de la conférence permettait non seulement de gagner du temps pour préparer l'offensive, mais aussi d'accentuer la fatigue du commando.
À 17 h 08, le GIGN était prêt à intervenir, mais en raison du retard de la conférence, le chef du commando eut une intuition et exigea du commandant de déplacer l'avion vers la tour de contrôle. Ce mouvement impromptu perturba le GIGN qui dut se réorganiser. La conférence de presse étant repoussée sur le prétexte que les journalistes n'étaient pas prêts, le commando perdit patience et l'un des membres mitrailla la tour de contrôle.
Le capitaine Favier donna le signal d'assaut. Trois passerelles motorisées s'approchèrent de l'A300, deux vers les portes arrières avec 11 hommes de chaque côté et une passerelle de 8 hommes à l'avant de l'appareil. Ils ouvrirent avec difficulté la porte avant droite, car la passerelle était trop haute et bloquait l'ouverture de la porte. Elle fut reculée puis avancée à nouveau une fois la porte ouverte, blessant un homme du GIGN. Le cockpit fut immédiatement assailli et deux preneurs d'otage tués, néanmoins l'un d'entre eux équipé d'un AK-47 automatique opposa une forte résistance blessant un membre du GIGN, puis lança une grenade.
Pendant ce temps, l'ensemble des passagers et du personnel navigant commercial était évacué par les portes arrières de l'appareil via les toboggans de secours.
Les caméras de télévision étaient braquées sur l'avion lorsqu'un membre d'équipage (le co-pilote) se jeta du cockpit pour fuir la fusillade, se cassant le bras et le fémur. Il y restait alors encore l'OMN (Officier Mécanicien Naviguant), et le commandant de bord, ainsi que le dernier preneur d'otage. Ce dernier opposa une forte résistance, blessant des membres du GIGN, mais ne tuant pas les deux derniers membres d'équipage technique. Après 20 minutes d'assaut, il fut abattu d'une balle dans le cœur.
Une dizaine de membres du GIGN furent blessés dont le capitaine Favier, un grièvement, ainsi que treize passagers et trois membres de l'équipage. En 2010, cette délicate opération anti-terroriste est considérée comme l'une des plus grandes réussites du GIGN.