La réduction de Jordan est la traduction matricielle de la réduction des endomorphismes introduite par Jordan. Cette réduction est tellement employée, en particulier en analyse pour la résolution d'équations différentielles ou pour déterminer le terme général de suites récurrentes, qu'on la nomme parfois « jordanisation des endomorphismes ».
Elle consiste à exprimer la matrice d'un endomorphisme dans une base où l'expression de l'endomorphisme est réduite, dite base de Jordan. La réduction consiste à déterminer une décomposition de Dunford c'est-à-dire trouver un endomorphisme diagonalisable et un endomorphisme nilpotent tel que les deux commutent et que leur somme soit égale à l'endomorphisme initial, puis sur chaque espace caractéristique on effectue une réduction de Jordan. Cette dernière est un cas particulier de la décomposition de Frobenius dans la cadre spécifique d'un endomorphisme nilpotent.
Soit u un endomorphisme sur un espace vectoriel E tel que son polynôme minimal soit scindé. Il possède alors les propriétés suivantes:
Ces résultats sont démontrés dans l'article décomposition de Dunford.
Ce résultat est démontré dans l'article Endomorphisme nilpotent.
On considère un endomorphisme dans un espace vectoriel de dimension finie, de polynôme caractéristique scindé. Le théorème de Jordan nous informe qu'il admet une représentation matricielle de la forme suivante
où les scalaires λi sont les valeurs propres de l'endomorphisme considéré.
Ainsi sur un corps algébriquement clos, et par exemple dans , tout endomorphisme admet une décomposition de ce type.
Attention : il n'y a pas a priori un bloc de Jordan pour chaque valeur propre, plusieurs λi peuvent avoir la même valeur.
Prenons un endomorphisme u admettant une telle représentation. On étudie une valeur propre particulière λ de l'endomorphisme u. On regroupe ensemble les vecteurs associés aux blocs . Ils forment l'espace caractéristique associé à la valeur propre λ. C'est un espace stable sur lequel u − λId induit un endomorphisme nilpotent nλ.
On se place sur un corps algébriquement clos. Deux matrices sont semblables si et seulement si elles ont la même écriture en blocs de Jordan, à l'ordre près des blocs.
On appelle bloc de Jordan une matrice de la forme
On appelle bloc de Jordan nilpotent une telle matrice où les coefficients diagonaux sont tous nuls, c'est-à-dire de la forme
Un système d'équations différentielles linéaires en y peut se réduire à une équation différentielle matricielle d'ordre 1 : u'(t) = Au(t) et la condition initiale u(0) = u0, où u(t) est un vecteur colonne contenant les dériviées successives de y. La résolution est alors explicite lorsque le système d'équations différentielles est à coefficients constants : u(t) = exp(tA)u0. L'avantage de la forme normale de Jordan réside dans la facilité de calculs des matrices des blocs de Jordan. En effet, l'exponentielle d'un bloc de Jordan nilpotent de taille p est
On voit de cette manière l'intérêt calculatoire de cette méthode.