Alexander Sutherland Neill, aussi appelé A. S. Neill, (17 octobre 1883 - 23 septembre 1973) était un psychanalyste et pédagogue écossais. Il est le fondateur, en 1921, de l'école de Summerhill qu'il « dirigea » jusqu'à sa mort. Il fut alors remplacé dans sa tâche par son épouse jusqu'en 1985, puis par sa fille Zoe Readhead qui est l'actuelle directrice de l'école.
A.S. Neill était psychanalyste et éducateur, fut un disciple de Homer Lane, le fondateur du Little Commonwealth, un établissement fonctionnant selon le principe du self government.
Il participa dans les années 1920 à la Ligue internationale pour l'éducation nouvelle, rassemblement des militants de l'éducation nouvelle de cette époque. Il participa au congrès inaugural de Calais, croisant là Decroly, Ferrière et tous les grands pionniers, s’y faisant remarquer comme un auteur d’ouvrage de combat. Il y rencontra également Maria Montessori, déjà éminente théoricienne de l’éducation dont il fut un adversaire farouche; il lui reprochait scientificité et moralisme.
Il dirigea avec Beatrice Ensor la revue The new Era, publication de la Ligue en versions anglaise. Lecteur des ouvrages de Freud, il était habile à en utiliser les concepts pour railler ses collègues. Neill sema la controverse et provoqua « beaucoup d’indignation », jusqu'à être exclu de la revue.
Neill fonde l'école Summerhill en 1921 près de Dresden en Allemagne. Suite à plusieurs contestations et difficultés politiques reliées aux principes sur lesquels était fondée l'école, Neill déménage celle-ci dans le comté de Suffolk en Angleterre en 1924, près de la ville de Leiston. Au travers d’une vingtaine d’ouvrages et d’innombrables articles, il en a conté la vie quotidienne, ne manquant jamais l’occasion de susciter la polémique, brossant sans cesse le tableau d’un lieu où l’adulte n’a pas à imposer sa loi.
Les journalistes baptisent Summerhill l’école « à-la-faites-ce-qu’il-vous-plaira ». Pourtant, l’école, avec ses bâtiments de bois, son grand parc et ses arbres, apparaît, surtout l’été, comme un lieu des plus agréables, véritable école à la campagne comme Ferrière pouvait en rêver au début du vingtième siècle. Mais, dans cette école, les cours sont facultatifs, les enfants, s’ils le souhaitent, peuvent jouer toute la journée ou se livrer à des activités manuelles dans l’atelier. Les soirées sont réservées à la danse, au théâtre, aux fêtes. S’il ne craignait la fermeture de l’école par les autorités, Neill ne poserait aucun interdit pour la sexualité.
Le samedi soir est réservé à l’assemblée générale. Durant cette réunion présidée par un élève élu, les enfants exposent leurs problèmes, en débattent, élaborent leurs lois — et, dans cette assemblée, la voix de Neill, ni celle des autres adultes n’a pas plus de poids que celle d’un enfant.
Neill ne fut ni un scientifique ni un chercheur — peut-être un philosophe, mais surtout un visionnaire et un pragmatique. Il ne fut pas l’homme d’une école pédagogique ou psychologique particulière, ne développa jamais une approche méthodique. À l’inverse de ses contemporains, Neill ne pose jamais d’abord les problèmes de l’éducation en termes de besoins, mais en termes de droit. « Chacun est libre de faire ce qu’il veut aussi longtemps qu’il n’empiète pas sur la liberté des autres » : telle est la philosophie de la liberté qui prévaut à Summerhill. « Mes gosses, notait-il à cette époque, ont fait ce qui leur a plu et je ne doute pas qu’ils ont exprimé le meilleur d’eux-mêmes. »
De son enfance, Neill ne sort pas sans difficulté ; la peur de pécher, la peur de mourir sans avoir pu sauver son âme. Et, dans cette famille nombreuse, entre un père qui ne l’estimait guère et une mère distante, le jeune Alexander ne semble pas avoir reçu l’amour qu’il réclamait — cet amour qu’il a su si bien donner à ses élèves. Une telle enfance forge un individualiste farouche, « le genre de gars à peindre son vélo en bleu quand tous les autres les avaient noirs ». Il aura été dans son école, effectivement, un solitaire, un marginal, trouvant là sa permanence, sa force et sa fragilité.
« L’individualisme sauvera le monde, […] ton pays a besoin de toi » dit-il à chacun de ses élèves dès 1915, car la liberté proposée aux élèves ne vise rien de moins qu’à en faire des hommes aux services des autres. Neill émerge de cette enfance en vouant une haine farouche à tout enseignement religieux et à toute imposition de valeurs quelles qu’en soient les formes. Sa vision de l’école traditionnelle avec les châtiments corporels ou de l’école nouvelle avec la méthode Coué (père de la pensée positive sa théorie : « Il ne s’agit pas de vouloir guérir, mais de s’imaginer guéri ». Sa phrase de guérison était : « Tous les jours et à tous les points de vue, je vais de mieux en mieux »), par exemple, exacerbe ses réactions. Neill voudra pour sa part n’en appeler jamais qu’à l’intelligence de l’enfant et à sa libre décision. « Je n’essaye jamais de faire partager mes croyances ou mes préjugés aux enfants », « Je ne vois pas de quel droit les éducateurs forcent les enfants à adopter ce qu’ils considèrent comme le bon goût ».
« Je suis une personne très religieuse ; quel homme de l’Écosse calviniste ne le serait pas ? », redira souvent Neill. C’est qu’en effet son éducation formera en lui une sensibilité chrétienne d’une force exceptionnelle ; par deux fois, Neill souhaitera devenir pasteur.
Neill avait quelques raisons d’écrire que ses élèves « vivaient aussi honnêtement et aussi humainement que tout chrétien qui suit l’Évangile ».
Neill cessera très vite de lire Freud. En fait, il trébuche bel et bien sur la conception de l’homme véhiculée par la psychanalyse, rejette toute la théorie freudienne sur la structuration de la personnalité mais reconnaîtra l’existence du complexe d'Œdipe (ensemble des pulsions qui poussent l’enfant mâle lors du 3e stade du développement stade « œdipien ou phallique », entre 2 ou 3 ans, après le stade « oral » et le stade « sadique-anal », à ressentir une attirance pour sa mère et une hostilité pour son père). Il affirme qu’il y a plus d’éducation dans la fabrication d’une boule de neige qu’en écoutant de la grammaire pendant une heure.