Contrairement aux oncogènes qui deviennent hyperactifs dans les cellules cancéreuses, les gènes suppresseurs de tumeurs perdent leur fonction(s) dans les cancers humains. Il peut s'agir soit de délétions d'une région du chromosome contenant le gène, soit de mutations ponctuelles qui détruisent (ou altèrent) sa fonction. Le génome humain est diploïde, ce qui signifie que tous les gènes sont présent à l’état de deux copies par cellule, la copie du chromosome paternel et celle du chromosome maternel (on fait abstraction des chromosomes sexuels X et Y). Pour que la fonction d’un gène suppresseur soit perdue, il est nécessaire que les deux copies du gène soient inactivées (voir figure). Le premier gène suppresseur de tumeur, Rb1, a été découvert dans le rétinoblastome, un cancer de l’œil chez l’enfant. Par la suite de nombreux gènes suppresseurs ont été découverts. Certains sont inactivés dans des cancers très spécifiques, à l'instar de BRCA1 et BRCA2 dans les cancers du sein, d'APC dans les cancers du colon, ou de WT1 dans les cancers du rein. D’autres gènes suppresseurs de tumeurs ont un spectre d’inactivation plus large comme p53 or p19ARF qui sont inactivés dans un grand nombre de types de cancer.
Le promoteur d’un gène se trouve en amont de la séquence dite « codante », c’est grâce à cette région que le gène est régulé : différentes protéines peuvent interagir avec l’ADN et entraîner son activation ou sa répression transcriptionnelle, c’est-à-dire sa transcription ou non en ARN. Lorsqu’un promoteur est hyperméthylé (ajout de groupements méthyl CH3 sur les cytosines C d’îlots CpG) la transcription du gène n’a plus lieu. Ce dernier est donc « éteint ».
Lorsque l’on ré-exprime un gène suppresseur de tumeurs dans une cellule cancéreuse de manière artificielle celle-ci perd toutes ou partie de ses caractéristiques cancéreuses. Elle peut par exemple proliférer moins vite voire arrêter de se diviser ou encore perdre son indépendance d’ancrage (capacité à pousser sans support).
Quand un gène suppresseur de tumeurs est inactivé chez la souris celle-ci développe des tumeurs, ceci est en général la « preuve » que le gène d’intérêt est suppresseur de tumeurs.
Gène suppresseur de tumeur | Cancers associés à une mutation germinale | Cancers associés à une altération somatique |
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p53 | Syndrome de Li-Fraumeni (nombreux types de cancers) | Pratiquement tous les types de cancers humains |
BRCA1 | Cancers du sein et de l'ovaire familiaux | Cancers du sein (rare) |
BRCA2 | Cancers du sein familiaux | tres peu fréquent |
APC | Polypose Colique familiale | Cancer du colon (80%) |
MLH1, MSH2, (MSH6 rare) | Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer | Cancer du colon |
RB1 | Rétinoblastomes familiaux | Rétinoblastomes sporadiques, sarcomes, cancers bronchiques |
VHL | Syndrome de Von Hippel Lindau (tumeur du rein) | Cancer du rein |
WT1 | syndromes de WAGR ou Denys-Brash associés à des tumeurs uro-génitales chez le jeune enfant (tumeurs de Wilms) | Tumeurs de Wilms sporadiques (rare) |
PTCH | Syndrome de Gorlin (prédiposition aux cancers de la peau) | Cancers de la peau de type baso-cellulaires |
NF1 | Neurofibromatose de type I | Peu courant, melanomes, neuroblastomes |
(*) liste non exhaustive