Mary Wollstonecraft - Définition

Source: Wikipédia sous licence CC-BY-SA 3.0.
La liste des auteurs de cet article est disponible ici.

Principales œuvres

Ouvrages éducatifs

Page de titre de Thoughts on the Education of Daughters (1787)

La plupart des ouvrages de la jeune Mary Wollstonecraft sont centrés sur du thème de l'éducation. Ainsi, trouve-t-on un florilège d'extraits littéraires « destiné au perfectionnement des jeunes femmes », The Female Reader, et deux traductions d'œuvres pour enfants Young Grandison de Maria Geertruida van de Werken de Cambon et Elements of Morality de Christian Gotthilf Salzmann. Ses écrits abordent aussi le sujet de la morale. Dans Thoughts on the Education of Daughters (1787) et son livre pour enfants Original Stories from Real Life (1788), elle préconise pour les enfants une éducation fondée sur l'éthique émergente de la classe moyenne : auto-discipline, honnêteté, frugalité et bien-être social. L'accent est également mis sur l'apprentissage du raisonnement, révélant sa dette intellectuelle à l'égard du philosophe du XVIIe siècle John Locke. Toutefois, l'importance qu'elle accorde à la foi religieuse et aux sentiments innés distinguent son œuvre de celle de Locke et la relie au discours sur la sensibilité prévalant à la fin du XVIIIe siècle. Les deux ouvrages plaident aussi pour une évolution de l'éducation donnée aux femmes, sujet alors controversé sur lequel elle n'aura de cesse de revenir tout au long de sa carrière, notamment dans A Vindication of the Rights of Woman. Sa pétition de principe est qu'une femme instruite ne peut que devenir une meilleure épouse et mère, servant, de ce fait, plus utilement au développement de la nation

Vindications

A Vindication of the Rights of Men (1790)

Publié comme une réponse à Reflections on the Revolution in France qu'Edmund Burke écrit en 1790 pour défendre la monarchie constitutionnelle britannique, l'aristocratie et l'Église d'Angleterre, A Vindication of the Rights of Men s'attaque à l'aristocratie et plaide pour le républicanisme. Cet ouvrage inaugure une guerre pamphlétaire qui sera connue sous le nom de Controverse révolutionnaire (en anglais Revolution Controversy), au sein de laquelle Rights of Man de Thomas Paine devient le cri de ralliement des réformateurs et des radicaux.

Mary Wollstonecraft ne pourfend pas seulement la monarchie et les privilèges héréditaires, mais condamne également le discours tenu par Burke. Dans un passage devenu célèbre de ses Reflections, Burke se lamente : « Je pensais que dix mille épées sortiraient de leurs fourreaux pour venger, ne serait-ce qu'un regard offensant qui la [Marie Antoinette] menacerait. Mais l'âge de la chevalerie est révolu ». La plupart des détracteurs de Burke déplorent là une forme de compassion théâtrale envers la reine de France, aux détriment de l'attention que mérite le peuple. Mary Wollstonecraft, de subtile façon, reprend les notions de sublime et de beau que Burke avait lui même exposées dans son A Philosophical Enquiry into the Origin of Our Ideas of the Sublime and Beautiful de 1756, puis, de l'intérieur, mine un à un ses arguments. Burke avait associé le beau à la faiblesse et à la féminité, et le sublime à la force et à la masculinité ; Mary Wollstonecraft renverse la proposition et en souligne la théâtralité qui tend à rabaisser le citoyen lecteur au niveau de faibles femmes que trouble le spectacle de la nature. Cette première critique, strictement féministe, est considérée par Claudia L. Johnson comme primordiale et sans égale par la force de son argumentation. En définitive, selon Mqary Wollstonecraft, la société préconisée par Burke reste fondamentalement inégalitaire, car fondée sur le postulat de la passivité des femmes.

Son argumentation concernant la vertu républicaine s'appuie sur l'éthique de la classe moyenne émergente, rejetant le code de conduite de l'aristocratie qu'elle juge vicié à sa base même. Influencée par les penseurs des Lumières, elle croit au progrès et tourne Burke en dérision pour son conservatisme soucieux de préserver les coutumes et les traditions. Le système qu'il préconise, argumente-t-elle par exemple, conduit inexorablement à la perpétuation de l'esclavage, pour la simple raison que cette pratique remonte à la nuit des temps.. Elle, au contraire, plaide pour la rationalité qui exige qu'on mène une vie campagnarde, chaque famille disposant d'une ferme pour couvrir ses besoins, vison idyllique et utopique qu'elle dit fondée sur « la sincérité du sentiment », et qu'elle oppose au « sentiment factice » exalté par Edmund Burke.

Rights of Men est le premier livre ouvertement politique de Mary Wollstonecraft, et aussi son premier ouvrage féministe ; comme l'affirme Claudia Johnson, il semble que dans l'acte d'écrire la dernière partie de Rights of Men, elle ait découvert le sujet qui occupera le reste de sa carrière ». C'est ce texte, en tous les cas, qui la promeut à la lumière

A Vindication of the Rights of Woman (1792)

A Vindication of the Rights of Woman est l'un des premiers ouvrage de philosophie feministe.

Mary Wollstonecraft y affirme que les femmes ont droit à une éducation conforme à leur situation dans la société, le rôle qu'elles seraient amenées à jouer devenant encore plus primordial pour la nation. En effet, si elles en éduquent déjà les enfants, au lieu d'être reléguées à la fonction d'« épouses » vivant dans l'ombre de leur mari, elles pourraient devenir de véritables « compagnes ». D'ornements commercialisables par le mariage, elles obtiendraient la considération qui est due à des êtres humains à part entière, jouissant des mêmes droits que leurs homologues masculins. D'importants passages de Rights of Woman fustigent au vitriol les ouvrages de certains écrivains, James Fordyce et John Gregory par exemple, et aussi un philosophe de l'éducation tel que Jean-Jacques Rousseau, lui qui dénie aux femmes le droit même à l'éducation.

Page de titre de la première édition américaine de A Vindication of the Rights of Woman (1792)

Mary Wollstonecraft affirme que de nombreuses femmes sont sottes et superficielles, les traitant « d'épagneuls » et « de jouets ». La raison de cette infirmité, fait-elle pour autant valoir, n'est pas à chercher dans une déficience naturelle, car elle ne résulte que du déni d'éducation que leur impose les hommes. À ce sujet, elle écrit : « Endoctrinées dès leur enfance à croire que la beauté est le sceptre de la femme, leur esprit prend la forme de leur corps et, enfermé dans cette cage dorée, ne cherche qu'à décorer sa prison ». Elle exprime sa conviction que, sans ces incitations, inculquées dès le plus jeune âge, à se soucier de leur beauté, donc de leur apparence, elles pourraient s'épanouir de façon autrement plus féconde.

Cela dit, bien qu'elle appelle de ses vœux l'égalité des sexes, dans certains domaines, comme celui de la morale, elle n'affirme pas explicitement qu'hommes et femmes sont égaux.. Pour elle, cette égalité n'existe vraiment qu'au regard de Dieu, conception qui s'oppose à ses commentaires sur la supériorité de la force et de la bravoure masculine. D'où, par exemple, ce passage à la fois célèbre et ambigu : « Qu'on n'en conclue point que je souhaite inverser l'ordre des choses, j'ai déjà concédé que, de par la constitution de leur corps, les hommes semblent être conçus par la Providence pour atteindre un degré de vertu plus élevé. Je parle collectivement de l'ensemble de leur sexe, mais je ne vois pas l'ombre d'une raison de conclure que leurs vertus doivent différer, eu égard à leur nature. En effet, comment le pourraient-elles, si la vertu ne se présente que sous une norme éternelle ? Je dois donc, si je raisonne conséquemment, soutenir qu'elles ont une même et simple orientation, et cela avec la même vigueur que je soutiens qu'existe un Dieu. » Ses déclarations ambiguës sur l'égalité des sexes font qu'il est difficile de la classer comme une féministe moderne, d'autant que ni le mot ni le concept n'existaient à son époque.

L'une des critiques les plus acerbes qu'adresse Mary Wollstonecraft dans Rights of Woman concerne l'excès de fausse sensibilité qui affligent les femmes. Celles qui y succombent se trouvent, dans l'instant, « emportées par chaque bouffée de sentiment » et, devenant ainsi « la proie de leurs sens », ne peuvent penser rationnellement. En fait, ces femmes sont une nuisance pour elles-mêmes et pour la civilisation tout entière, qu'elles ne peuvent contribuer à affiner et restent susceptibles de détruire. Raison et sentiment ne devraient pas agir indépendamment, mais travailler de concert.

Au-delà des généralités philosophiques, elle élabore un plan spécifique pour l'éducation nationale, en opposition à celui qu'a conçu Talleyrand pour la France. Dans le chapitre 12, « Sur l'éducation nationale », elle propose que tous les enfants soient envoyés dans une Country Day School, tout en recevant une certaine éducation chez eux « pour leur inspirer un amour du foyer et des plaisirs domestiques ». Elle soutient également que les études devraient être mixtes, faisant valoir que les hommes et les femmes, dont le mariage est « le ciment de la société », devraient être « éduqués sur le même modèle ».

Mary Wollstonecraft dédie son ouvrage à la classe moyenne qu'elle décrit comme « l'état le plus naturel » et, en effet, par de nombreux aspects, Rights of Woman est imprégné d'une vision bourgeoise du monde. Il prêche les valeurs de la modestie et du travail, fustigeant par la même occasion l'oisiveté de l'aristocratie. Pour autant, Mary Wollstonecraft ne se présente pas en amie des pauvres, pour lesquels elle recommande qu'après l'âge de neuf ans, à l'exception des enfants particulièrement brillants, ils soient séparés des riches et envoyés dans d'autres établissements.

Romans

Young Girl Reading de Otto Scholderer, en 1883.

Les deux romans de Mary Wollstonecraft critiquent le mariage, qu'elle voit comme une institution patriarcale, et ses effets délétères sur les femmes. Dans son premier roman, paru en 1788, Mary: A Fiction, l'héroïne éponyme est contrainte à un mariage d'argent sans amour ; elle comble ses désirs d'affection hors du mariage grâce à deux amitiés romantiques et passionnées avec une femme et un homme. Maria: or, The Wrongs of Woman 1798, est un roman inachevé posthume, qui est souvent considéré comme l'ouvrage féministe le plus radical de Mary Wollstonecraft. Il est construit autour de l'histoire d'une femme que son mari a fait interner dans un asile d'aliénés ; comme Mary, Maria trouve son accomplissement hors du mariage, dans une relation avec l'une de ses compagnes d'infortune et une amitié nouée avec l'une de ses gardiennes. Aucun des romans ne dépeint un mariage heureux, bien qu'elle en postule la nécessité dans Rights of Woman. À la fin de Mary, l'héroïne pense qu'elle s'en va « pour le monde où il n'y a ni à se marier, ni à être offerte en mariage ».

Les deux livres critiquent aussi le discours de la « sensibilité », philosophie morale et esthétique en vogue vers la fin du XVIIIe siècle. Mary est un roman de la sensibilité où les ficelles du genre servent à saper le sentimentalisme, attitude dommageable aux femmes car les encourageant à trop compter sur leurs émotions. The Wrongs of Woman fustige la complaisance de l'héroïne pour les fantasmes romantiques, encore exacerbés par la lecture des romans.

Les amitiés féminines sont au cœur des deux romans, mais celle liant Maria, l'héroïne, à Jemima, la servante chargée des soins à l'asile, revêt la portée historique la plus importante. Dans cette amitié, d'essence maternelle, entre une femme de la haute société et une autre de basse extraction, apparaît l'un des premiers exemples d'un argument de classe. Les femmes de niveaux sociaux différents ont des intérêts semblables, pour la seule raison qu'elles sont des femmes.

Lettres écrites en Suède, en Norvège et au Danemark (1796)

Les Letters Written During a Short Residence in Sweden, Norway, and Denmark selon leur nom complet (Lettres écrites lors d'un court séjour en Suède, en Norvège et au Danemark) de Mary Wollstonecraft sont un récit de voyage profondément personnel.

Les vingt-cinq lettres couvrent une large gamme de sujets, depuis des réflections sociologiques sur la Scandinavie et ses peuples jusqu'à des questions philosophiques concernant l'identité, avec des rêveries concernant la relation avec Gilbert Imlay qui, d'ailleurs, n'est pas nommément présenté dans le texte. Faisant appel à la rhétorique du sublime, Mary Wollstonecraft explore la relation existant entre l'individu et la société. Reflêtant la forte influence de Jean-Jacques Rousseau, les Lettres écrites en Suède partagent les thèmes des Rêveries du promeneur solitaire (1782), « la quête de la source du bonheur humain, le rejet stoïque des biens matériels, l'union extatique avec la nature et le rôle essentiel du sentiment dans la compréhension ». Alors que Rousseau, cependant, finit par rejeter la société, Mary Wollstonecraft rend grâce aux scènes de la vie domestique et au progrès industriel.

Peinture d'icebergs, avec un iceberg blanc dominant le centre de l'œuvre, et des icebergs noir ou d'un bleu sombre, encadrant le tout. Le tableau est peint dans un style suggestif plutôt que minutieux.
L'iceberg (1861) de Frederic Edwin Church fait la démonstration de l'esthétique du « sublime ».

Mary Wollstonecraft promeut l'expérience subjective, en particulier dans sa relation avec la nature, explorant les liens entre sublime et sensibilité. Nombre de ces lettres décrivent les grandioses panoramas de la Scandinavie et le désir de créer une relation d'affectivité avec le monde naturel. Ce faisant, elle accorde une plus grande valeur à l'imagination que dans ses précédents ouvrages. Comme toujours, elle plaide pour la libération et l'éducation des femmes. En plus, elle met pour la première fois en lumière les effets nocifs du commerce, opposant la relation au monde fondée sur l'imagination à une approche mercenaire et mercantile, attitude qu'elle associe avec son amant, Gilbert Imlay.

Les Letters Written in Sweden sont le livre de Mary Wollstonecraft le plus populaire dans les années 1790. Il se vend bien et reçoit de nombreuses critiques favorables. William Godwin écrit que « s'il y eut jamais un livre calculé pour rendre un homme amoureux de son auteur, il m'apparait que c'est de ce livre qu'il s'agit ». Les lettres influencent les poètes romantiques, tels William Wordsworth et Samuel Taylor Coleridge, qui s'inspirent de ses thèmes et de son esthétique.

Page générée en 0.303 seconde(s) - site hébergé chez Contabo
Ce site fait l'objet d'une déclaration à la CNIL sous le numéro de dossier 1037632
A propos - Informations légales | Partenaire: HD-Numérique
Version anglaise | Version allemande | Version espagnole | Version portugaise