En chimie organique, une élimination (ou β-élimination) est une réaction qui transforme un alcane substitué (halogénoalcanes, alcools...) en dérivé éthylénique, voire en alcène, si la molécule de départ, outre le groupe partant, n'est qu'une chaîne carbonée de type alcane.
Les conditions sont, en plus dures, celles d'une substitution nucléophile, réaction proche par de nombreux aspects et concurrente : l'élimination se produit en présence d'une base forte et en chauffant le mélange réactionnel.
L'un des principaux exemples d'élimination est la transformation d'un halogénoalcane en alcène ; on parle alors de déshydrohalogénation :
Les bases les plus couramment utilisées sont la soude (Na+,HO-), la potasse (K+,HO-), voire les ions alcoolates (RO-) (obtenus en plongeant Na dans un alcool ROH).
Tout comme pour la substitution nucléophile il existe une élimination monomoléculaire et une élimination bimoléculaire que l'on note couramment E1 et E2 respectivement.
Dans la suite de cet article les exemples sont donnés avec un dérivé halogéné en tant que réactif.
La réaction d'élimination bimoléculaire a une cinétique d'ordre global 2 et d'ordre partiel 1 par rapport au dérivé halogéné R-X et à la base B:-. La réaction se fait en une seul étape qui est bimoléculaire la vitesse de la réaction suit donc une loi de type : v=k.[R-X].[B:-].
où:
L'élimination bimoléculaire est une réaction en une étape, bimoléculaire.
Durant une même étape élémentaire se produisent l'arrachage du proton par la base, la formation de la double liaison, et le départ de l'atome d'halogène (nucléofuge) sous forme d'ion halogénure. On parle de mécanisme synchrone ou concerté.
L'E2 est une réaction stéréospécifique.
La réaction ne se fait que lorsqu'un hydrogène et le groupe partant sont en position antipériplanaire.
Cette réaction est non seulement en concurrence avec l'E1, mais aussi avec les réactions de substitutions nucléophiles, en particulier avec la SN2, qui se produit dans des conditions similaires.
La réaction d'élimination monomoléculaire se fait en deux étapes : une étape monomoléculaire qui ne fait intervenir que la molécule du dérivé halogéné du côté des réactifs, qui est l'étape cinétiquement limitante, suivie d'une étape bimoléculaire. Par conséquent la cinétique de la réaction, dans l'approximation de l'étape cinétiquement limitante (ou déterminante), ne dépend que de la concentration de l'espèce RX.
La réaction est donc caractérisée par une cinétique d'ordre global 1, d'ordres partiels 1 par rapport au dérivé halogéné et 0 par rapport à la base B| : v = k.[RX], où:
La réaction se fait en deux étapes.
Comme le montre le mécanisme, le passage par un carbocation, qui est une structure plane, enlève tout élément de stéréospécificité contrairement (voir la suite) au mécanisme d'élimination bimoléculaire.
Mais, si deux stéréoiseomères géométriques peuvent se former, ils ne se forment pas dans les mêmes proportions. L'isomère le plus stable, c'est-à-dire celui dont l'énergie est la plus basse, est formé majoritairement. C'est donc l'isomère E qui est majoritairement formé. On parle alors de stéréosélectivité partielle.
Exemple :
Lorsque plusieurs isomères de constitution peuvent se former, il se forme préférentiellement l'alcène thermodynamiquement le plus stable. S'il n'y a que des groupes alkyles, c'est l'alcène le plus substitué. Si des mésoméries peuvent intervenir, c'est l'alcène le plus conjugué qui est majoritaire. On parle alors de la régiosélectivité ou de la règle de Zaïtsev.
Cependant, parfois l'alcène thermodynamiquement le moins stable se forme préférentiellement, on parle alors de l'élimination d'Hofmann. C'est le cas notamment lorsque la base utilisée est encombrée (ex : KtBuO) ou lorsque que l'on a un ion ammonium qui s'élimine par exemple. (Molécule portant une amine en présence de MeI en nombre d'équivalents suffisant pour former le sel d'ammonium, puis mise en présence d'oxyde d'argent humide et chauffé. Formation de l'alcène par élimination d'Hofmann et donc départ de N(Me)3.)
Les paramètres influençant l'élimination E1 sont :
(> meilleur groupe partant que)
À noter que la base n'influence pas ce type de réaction d'ordre 1 et ceci dans la mesure où elle n'intervient pas lors de la première étape qui détermine la vitesse globale de la réaction.
Le mécanisme passe par un intermédiaire réactionnel de type carbocation. Celui-ci est d'autant plus stable qu'il est substitué. Ainsi, la vitesse de réaction (donc de formation du carbocation) progresse des dérivés primaires, aux secondaires puis aux tertiaires. En pratique, seuls ces derniers, et quelques dérivés secondaires, réagissent par ce mécanisme.
Plus la liaison R-X est polarisable, plus la rupture est facile. La vitesse croit donc ainsi :
(< : réagit plus rapidement que)
Cette réaction est non seulement en concurrence avec l'autre élimination, mais aussi avec les réactions de substitutions nucléophiles, en particulier avec la SN1. Cette dernière se produit en effet dans des conditions similaires (outre le chauffage).