Rosée d'étoile - Définition

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Le roman de Kurd Laßwitz n'a pas été traduit en français à ce jour.

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Portrait d'une époque

Le roman de science-fiction de Kurd Laßwitz brosse un portrait détaillé de la vie dans les provinces de l'Allemagne industrielle du début du XXe siècle. L'auteur y décrit les usines équipés d'imposantes machines à vapeur, avec leur lot d'accidents, les nombreux liens qui existaient déjà entre l'industrie et les milieux bancaires et financiers, la concurrence et la course aux brevets, la bienséance et l'éducation bourgeoise dans les milieux aisés, la pratique courante du tennis comme sport d'agrément par une classe industrielle favorisée. En arrière-plan, Kurd Laßwitz décrit la campagne environnante dans un style pastoral, avec ses torrents et ses montagnes.

Du point de vue technique, Kurd Laßwitz fait une brève allusion aux travaux du chimiste et physicien suédois Svante Arrhenius (1859-1927) et tire partie des développements récents de la photographie sur plaques photosensibles. Du point de vue sociologique, Kurd Laßwitz propose un personnage de jeune femme indépendante, Harda, qui rompt avec les traditions bourgeoises d'une époque où les mariages sont arrangés par les parents et le rôle de la femme confiné au foyer. Harda, jeune femme déjà émancipée pour l'époque, souhaite faire des études de botanique, ce qui choque tout son entourage. Son père, Hermann, est présenté sous les traits d'un chef d'entreprise soucieux de préserver ses intérêts par des brevets et à la recherche de toute nouvelle source de revenu. Enfin, le personnage central du docteur Eynitz représente le scientifique pointilleux, soucieux d'appliquer des méthodes rationnelles pour étudier des phénomènes luminescents, les Idones, que la population locale tend encore à rattacher à une forme de mythologie païenne en les appelant des elfes (voir le personnage du gardien de la propriété Kern).

Civilisation végétale

Kurd Laßwitz met en scène des végétaux (arbres, lierres, fleurs, mousses) doués de conscience qui réfléchissent à la nature du règne végétal et le compare à ce qu'ils perçoivent du monde des « Marcheurs », noms que les végétaux donnent aux humains. L'auteur recrée pour les plantes de son roman toute une philosophie qui prend certains accents religieux dans la croyance en une âme universelle et éternelle dans laquelle s'abîme toute notion d'individualité. L'animisme ou psychologisme littéraire de Kurd Laßwitz est un écho des thèses et des écrits de Gustav Theodor Fechner, un philosophe et physicien. Gustav Fechner publia notamment en 1848 Nanna oder über das Seelenleben der Pflanzen (Nanna ou de la vie spirituelle des plantes).

Chez Kurd Laßwitz, les plantes jouissent d'une âme immortelle qui se transmet à leurs graines et à leurs jeunes pousses, ce qui les distingue des Hommes dont l'âme s'évanouit après leur mort. Le règne végétal des plantes du roman s'oppose philosophiquement au monde des humains, car il privilégie l'idée d'une âme universelle au détriment de l'âme individuelle qui est le lot de la vie humaine. La conscience collective des plantes et des Idones est partagée par tous et participe de l'esprit de la planète, perçue comme une entité nourricière et primaire. Kurd Laßwitz emprunte certaines des vues des végétaux au poète et philosophe Friedrich Schiller : « La vie est apparence et l'apparence est la vie. Personne ne tue personne. Tout exprime l'éternelle création. » La naissance, le devenir et la mort dans le règne végétal n'est que l'expression de la nature éternellement créée et recréée face à laquelle tout notion d'individualité s'évanouit. Le seul mode d'individuation du végétal est la floraison, qui la distingue de ses congénères, mais dont le but n'est que la reproduction de soi dans le flux éternel de la nature.

SF didactique

Le roman de Kurd Laßwitz fait une grande place aux considérations botaniques scientifiques. Ces explications très didactiques font de ce roman une œuvre aux vertus pédagogiques. L'auteur insiste particulièrement sur la reproduction sexuée de certaines plantes, sur le besoin de lumière des plantes chlorophylliennes, sur la cryptogamie, sur l'histoire de la colonisation végétale de la Terre, sur les gamétophytes, le biotope, les associations de plantes et l'écosystème.

Classicisme, romantisme et fleur bleue

La « Rosée d'étoile » est également appelée au cours du roman la « fleur bleue », ce qui la rapproche dans l'histoire littéraire de la célèbre « Blaue Blume » (Fleur bleue) du roman inachevé Heinrich von Ofterdingen (Henri d'Ofterdingen) de l'écrivain romantique allemand Novalis. Comme la plante extra-terrestre de Kurd Laßwitz, le héros de Novalis aspire à une unité retrouvée entre l'homme et la nature. En ce sens, le roman de science-fiction de Kurd Laßwitz se situe dans la nette continuité du romantisme allemand, lui même nourri des idées de Friedrich Schiller et Johann Wolfgang von Goethe. Les deux classiques allemands sont d'ailleurs explicitement évoqués par l'auteur, tout d'abord avec une allusion directe au poème philosophique de Friedrich Schiller intitulé Das Ideal und das Leben (L'idéal et la vie), puis avec une large citation tirée du monologue de Faust dans la pièce du même nom, pendant la scène de la forêt (Wald und Höhle). Le personnage de Geo, l'oncle de Harda, qui semble être le double philosophique de l'auteur à l'intérieur du roman, n'omettra pas à cette occasion de souligner le rôle d'éclaireur du poète, seul être capable de retisser le lien déchiré entre l'homme et le nature.

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