Symbolique du serpent - Définition

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Symbolique numérique

Le choix de ces attributions numériques n’est certainement pas dû au hasard. En fait, dans ces allégories, les sept têtes de Muchalinda représentent le royaume souterrain des naga, chacune étant associée à l’un des sept enfers qui constituent les mondes inférieurs. Inverses des mondes supérieurs, les Enfers se situeraient en effet juste en dessous du Mont Meru, le centre de l’univers, composé lui-même de sept faces, orientée chacune vers l’un des sept océans (saptasagara) et vers l’une des sept îles-continents (sapta dvipa).

Il est donc fait appel ici au caractère essentiellement céleste du symbole ainsi mis à contribution : Muchalinda n’était autre en effet que le serpent originel, celui-là même qui aurait engendré la nature primordiale. Car le Mont Meru, montagne mythique et sacrée des religions indiennes, qui se trouve ainsi associé symboliquement au nombre sept, reçoit ses feux précisément de l’étoile polaire (α Ursae Minoris), la dernière des sept étoiles de la Petite Ourse, située exactement sur la même ligne que cet «axe du monde».

Les quatre têtes de Kaliya représentent, en revanche, la nature essentiellement terrestre de l’espèce rampante. Et on sait que dans la pensée mystique indienne, la terre correspond symboliquement au nombre quatre, celle-ci étant en effet mise en correspondance avec le carré, lui-même associé aux quatre points cardinaux. Par contre, les mille têtes de Shesha-Ananta symbolisent à la fois la multitude indénombrable et la durée éternelle.

Quant à la lutte évoquée plus haut entre Krishna et le roi des naga, elle est elle-même l’expression mystique de la rivalité entre l’homme et le serpent. Or, cette dualité homme-serpent est justement exprimée d’une manière très symbolique dans la littérature védique (notamment dans le Chhandogya Upanishad), où Krishna, le Noir, non encore divinisé, est un simple érudit ou encore un asura (c’est-à-dire un anti-dieu). Mais dès lors qu’il est rangé parmi les divinités du panthéon hindou, il devient la huitième incarnation (avatar) de Vishnu, avant même de devenir le bienfaisant protecteur de l’humanité.

Mais cette dualité s’exprime aussi de manière numérique, car le rang attribué à Krishna en tant qu’incarnation de Vishnu est égal à 8, soit exactement la valeur mystique du naga. Le naga, on l’a vu, est en effet considéré non seulement comme un génie du sol, un esprit chtonien possédant la terre et ses trésors, mais aussi et surtout comme un symbole aquatique ; c’est un esprit des eaux vivant dans les enfers. Or, la terre a 4 pour valeur symbolique. Et comme dans la pensée mystique indienne, l’eau (en sanskrit : jala) a également pour valeur 4, l’ambivalence du serpent s’exprime donc bien par la relation : naga = terre + eau = 4+4=8. Cette valeur se trouve confirmée par le fait que les naga se reproduisent par couples et évoluent toujours en compagnie des nagini leurs femelles ; ce qui donne bien le nombre 8 comme résultat de la multiplication symbolique de 2 (le naga et sa nagini) par 4 (la terre ou l’eau). Et c’est pourquoi la désignation générique de cette espèce est devenue un mot-symbole de valeur numérique égale à 8.

Ananta

Le roi des naga représente ainsi la nature primordiale, la durée sans limite de l’éternité et l’immensité sans bornes de l’infini. Shesha n’est donc autre qu’Ananta : cet immense serpent flottant sur les eaux primordiales du chaos originel et de l’«océan d’inconscience», et sur les anneaux duquel Vishnu, couché, se repose entre deux créations du monde ; c’est là que ce dernier donne naissance à Brahma qui surgit de son nombril.

Kaliya vaincu par Krishna

Mais Ananta, c’est aussi le grand prince des ténèbres. Chaque fois qu’il ouvre sa gueule, un tremblement de terre se produit. Et c’est bien lui qui, à la fin de chaque kalpa (cycle cosmique de 4 320 000 000 d’années), provoque, en crachant, le feu destructeur de toute création de l’univers. Or, Ananta, c’est également Ahirbudhnya (ou Ahi Budhnya), le fameux serpent des profondeurs de l’océan qui, selon la mythologie védique, serait né des eaux sombres. En plus de génie du sol et d’esprit chtonien possédant la terre et ses trésors, le serpent apparaît donc ainsi comme un esprit des eaux (aptya) vivant dans les mondes inférieurs (patala).

A leur manière, certains mythes indiquent clairement cette ambivalence de la nature du reptile, comme la légende qui rapporte l’histoire de Kaliya, le roi des naga de la rivière Yamuna ; c’est un serpent à quatre têtes aux proportions monstrueuses, qui, vaincu par Krishna, alors âgé de cinq ans seulement, était allé se réfugier dans les profondeurs de l’océan.

Dans ce mythe, il faut noter cette allusion aux quatre têtes du roi des naga, alors que celui-ci, sous le nom de Muchalinda, est souvent muni de sept capuchons de cobra (concept exporté et fermement institué au Cambodge), lorsqu’il ne s’agit pas des mille têtes d’Ananta.

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