Le tracé à l'italienne (improprement traduit en trace italienne) désigne une fortification bastionnée (en italien : Fortificazione alla moderna), un style de fortification qui s'est développé en Europe lorsque l'artillerie rendit caduque la fortification médiévale.
L'enceinte circulaire passive qui dominait l'Architecture militaire au Moyen Âge s'avérait vulnérable aux tirs de canon effectués de but en blanc. La forteresse bastionnée, au contraire, était un ouvrage bas sur l'horizon, formé de murs de revêtement à pans inclinés enserrant des bastions d'où l'assaillant pouvait être bombardé lorsqu'il installait ses batteries et surtout permettant le flanquement parfait des abords de l'enceinte. Avec ce système, il devenait très difficile de poster des canons frappant perpendiculairement la muraille : les boulets étaient déviés à l'impact, perdant une partie de leur énergie cinétique ; en outre, les défenseurs des bastions se couvraient les uns les autres, et pouvaient mieux viser les fossés. De nouveaux éléments architecturaux comme la demi-lune, l'ouvrage à cornes ou la contrescarpe, ainsi que les redoutes furent adjoints peu à peu à la conception initiale, donnant naissance à des structures symétriques complexes qui façonnèrent l'urbanisme de plusieurs villes européennes à l'époque moderne.
Les fortifications angulaires ou à plan en étoile se développèrent graduellement en Italie entre le milieu et la fin du XVe siècle sur la base des idées de plusieurs ingénieurs, dont Francesco di Giorgio Martini, Giuliano et Antonio da Sangallo, Michele Sanmicheli et Le Filarète.
Cette mutation de l'architecture militaire prit naissance principalement en réaction aux multiples intrusions des Français dans la péninsule italienne. Dotée d'une artillerie considérable et moderne, l'armée des rois des France disposait à la fois de canons et de bombardes capables de détruire en l'espace de quelques jours des fortifications dont l'édification avait nécessité des années durant le Moyen Âge. Afin de déjouer la force de ces nouvelles armes, on construisit des remparts moins hauts (ils offraient ainsi moins de prise aux impacts) et plus épais. Devant la relative faiblesse de la maçonnerie aux impacts de projectiles en fer, ces remparts étaient désormais composites, mêlant remblais en terre et revêtement en maçonnerie. La maçonnerie était souvent faite de brique, un matériau offrant une meilleure résilience que les moellons de pierre. Une autre innovation capitale fut le bastion, une avancée de la muraille de plan pentagonal, dont les parement obliques permettaient un feu croisé sur les assaillants tout en déjouant la force des projectiles, dont seule une fraction de l'énergie accablait la muraille, par suite de l'angle d'impact. L'adjonction des bastions sur le pourtour des murailles engendra le plan en étoile, ou "tracé à l'italienne" ou "à la moderne".
Les bastions mis en œuvre par Michel-Ange pour défendre les glacis en terre de Florence furent améliorés au XVIe siècle par Baldassare Peruzzi et Scamozzi.
La nouvelle architecture militaire se diffuse hors d'Italie à partir des années 1530 et 1540 et poursuit son développement jusqu'au début du XVIIe siècle. Pendant trois siècles, constituée en système, elle sera la doctrine de base de la fortification, non seulement en Europe, mais dans presque toutes les colonies européennes outre-mer. Les ingénieurs italiens seront longtemps les seuls experts de ce système, et on les trouve employés dans toute l'Europe jusqu'au milieu du XVIIe siècle.
Le « tracé à l'italienne » ou « tracé bastionné » atteint son apogée à la fin du XVIIe siècle avec les réalisations des ingénieurs Menno van Coehoorn et Vauban :
« Les forteresses... se dotèrent de demi-lunes et de redoutes, de bonnettes et de lunettes, de tenailles et tenaillons, de contre-gardes, de courtines, de cornes, de curvettes et de fausse-brayes, de murs d'escarpe, de cordons, de banquettes et contrescarpes... toute une profusion baroque qui faisait les délices d'un Tristram Shandy »
— The Oxford history of modern war de Charles Townsend
Le tracé italien influença la morphologie de la cité idéale de la Renaissance :
— Espace, temps, architecture, Siegfried Giedion
Au XIXe siècle, l'apparition des obus changea la nature des dispositifs défensifs.