Tunnel ferroviaire du Saint-Gothard | |
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Type | Tunnel ferroviaire |
Exploitant | CFF Infrastrucutre |
Traversée | Massif du Saint-Gothard |
Altitude | 1 151 m |
Mode de transport | Train |
Pays | Suisse |
Longueur du tunnel | 15,003 km |
Nombre de tubes | 1 |
Nombre de voies par tubes | 2 |
Début des travaux | 1872 |
Fin des travaux | 1881 |
Ouverture à la circulation | 1882 |
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Le premier tunnel du Saint-Gothard, tunnel ferroviaire à double voie de 15 km de long, fut construit de 1872 à 1881. Il relie Göschenen au nord, dans le canton d'Uri à Airolo dans le canton du Tessin. L'entrée nord est à 1 106 m d'altitude, le point culminant à 1 151 m et la sortie à 1 142 m. Les trains parcourent le tunnel en 11 minutes.
L'axe ferroviaire transalpin du Saint-Gothard fut imaginé dès 1851 par l'ingénieur Gottlieb Keller, qui mit ce projet à l'étude dès 1853. En 1863, quinze cantons ainsi que deux compagnies de chemin de fer formèrent une « Union du Gothard » pour soutenir cette idée. Trois ans plus tard, le Conseil fédéral approuva le projet en le préférant à celui d'un tunnel empruntant le Lukmanier (Grisons).
La ligne ferroviaire du Saint-Gothard et son tunnel furent concédés à la « Compagnie du chemin de fer du Saint-Gothard », fondée le 6 décembre 1871 et présidée par le principal artisan de l'Union du Gothard, le Zurichois Alfred Escher (fondateur du Crédit Suisse). Afin de réunir les fonds nécessaires, la Compagnie fit appel aux deux grands pays intéressés par l'ouverture de cet axe de communication Nord-Sud : l'Allemagne et l'Italie, signataires avec la Suisse d'un « Traité du Gothard » (28 octobre 1871), investirent respectivement 20 et 45 millions de francs sur les 187 millions nécessaires. La Compagnie n'avait d'ailleurs pas hésité à soudoyer un député allemand, en lui versant 25 000 francs pour qu'il plaide la cause du projet au Reichstag.
La construction du tunnel fut confiée en 1871 à l'ingénieur et entrepreneur genevois Louis Favre. Une des conditions de l'adjudication fixait à huit ans la durée du chantier et à 500 francs par jour le montant des indemnités en cas de retard. Cette pression explique peut-être le peu d'attention qui fut accordé aux conditions de travail des ouvriers.
Ces derniers, originaires pour la plupart de la région du Piémont en Italie, vivaient en effet dans des conditions particulièrement difficiles, entassés dans des baraquements exigus et privés de tout confort. Quant aux conditions de travail, elle étaient dramatiques en raison des accidents, de la chaleur régnant dans les galeries (plus de 30°C) ou de l'atmosphère polluée par les poussières : 307 ouvriers trouvèrent la mort, sans compter les victimes de maladies comme la silicose ou en raison de la chaleur et de l'humidité, de l'ankylostomose, une maladie parasitaire responsable d'anémie. Les ouvriers, dont l'effectif varia entre 2 000 et 4 000, étaient payés entre 4 et 5 francs par jour, mais il fallait retrancher à cette somme les frais de logement et de nourriture (2,50 francs) ainsi que l'achat du matériel et une retenue de 30 centimes par jour pour l'huile des lampes.
Le 27 juillet 1875, une grève éclata à Göschenen : les ouvriers demandaient, outre une réduction du temps de travail de 8 à 6 heures, le versement bimensuel d'un salaire en argent (au lieu d'un paye mensuelle grévée par des acomptes en bons d'achat utilisables dans les épiceries de l'entreprise).
Inquiet à l'idée de prendre du retard et de devoir verser des indemnités, Favre fit appel au gouvernement uranais, qui envoya quelques policiers, bientôt renforcés par une vingtaine de miliciens civils armés (auxquels Favre fut contraint de verser une indemnité de 3 000 francs). Le 28 juillet, ils firent feu sur les grévistes tuant quatre d'entre eux. Cet incident relança le débat sur les conditions de travail et la protection des travailleurs.
Louis Favre, qui avait rencontré des difficultés imprévues en raison de la nature du sol et qui dut faire face à des dépassements du devis constatés dès 1876, fit un malaise lors d'une visite d'inspection du chantier et mourut d'un arrêt cardiaque le 19 juillet 1879. Même si le dépassement des délais restait minime, entre le début des travaux le 13 septembre 1872 (d'abord par le sud, le côté nord ayant été entrepris au mois suivant) et l'ouverture du tunnel au trafic le 1er janvier 1882, la Compagnie du Gothard attaqua les héritiers de Favre en justice.
La ligne fut reprise par les CFF en 1909 suite à la signature, avec l'Allemagne et l'Italie de la convention du Gothard et le tunnel a été électrifié en 1920.