L'usine Lockheed Martin de Marietta est un important site de construction aéronautique, situé à Marietta, près d'Atlanta, en Géorgie (Etats-Unis).
De 1943 à 1945, des bombardiers B-29 y furent construits par Bell Aircraft. Depuis 1951, l’usine est exploitée par la firme Lockheed, devenue Lockheed-Martin en 1995.
Le déclenchement de la guerre de Corée, en 1950, et de nouveaux besoins en avions militaires conduisirent à la réouverture de l'usine. A la demande du Pentagone, la firme Lockheed de Burbank (Californie), qui avait déjà collaboré avec succès à la construction des B-17 avec Boeing et Douglas, réactiva, en janvier 1951, l'usine de Marietta pour y réaménager des B-29 et construire les nouveaux B-47 Stratojets, conçus par Boeing. Le nouveau directeur de la « Georgia Division » de Lockheed n'était autre que James V. Carmichael, un homme d'affaires de la région, qui avait dirigé l'usine à l'époque de Bell.
Très vite, l'usine de Marietta se consacra à la mise au point d'un nouvel avion capable de transporter des troupes et de l'équipement près du front, en utilisant des pistes courtes en mauvais état : le C-130 Hercules. Les premières études du nouvel appareil avaient commencé en Californie, mais en 1952 Lockheed décida de transférer à Marietta l'ingénieur en chef du projet, Al Brown, et toute son équipe. C'est ainsi que les études du nouvel avion furent achevées en Géorgie.
Grâce au C-130, l'usine Lockheed de Marietta n'était plus une simple usine d'assemblage d'avions conçus ailleurs. Le Sud avait gagné un véritable constructeur aéronautique. Le modèle suivant d'avion de transport, le C-141 Starlifter, fut entièrement conçu et construit en Géorgie. En 1961, le Pentagone annonça une commande de 132 Starlifters, des avions beaucoup plus gros que le C-130. En reconnaissance du rôle nouveau joué par l'usine de Marietta, la « Georgia division » de Lockheed fut réorganisée, devenant une entité séparée, la Lockheed-Georgia Company. De plus en plus d'ingénieurs travaillaient à Marietta. Alors que dans les années 40, les ouvriers horaires représentaient 96 pour cent de la main-d'œuvre, ils n'étaient plus que 63 pour cent dans les années 60. L'effectif total était de 10 000 en 1952 et augmenta jusqu'à atteindre 15 000 en 1959.
Le projet C-141 Starlifter favorisa indirectement la déségrégation de l'un des principaux employeurs du Sud. En effet, dès que le contrat fut rendu public, la National Association for the Advancement of Colored People (Association nationale pour l'avancement des personnes de couleur), ou NAACP, demanda son annulation en raison des pratiques discriminatoires de Lockheed à l'égard des Noirs, en Géorgie. Alors que les usines californiennes de Lockheed étaient « intégrées », celle de Marietta maintenait des postes de travail, des toilettes, des distributeurs d'eau et des cantines séparées, conformément aux habitudes du Sud. Lockheed avait fait l'effort de recruter des ouvriers et même quelques contremaîtres noirs, mais ces derniers travaillaient uniquement dans les ateliers réservés aux Noirs.
Le spécialiste du travail au sein de la NAACP, Herbert Hill, déposa devant le nouveau « Committee on Equal Job Opportunities », présidé par le vice-président Lyndon B. Johnson. Finalement, les différentes parties conclurent un accord de « déségrégation ». Les dirigeants de Lockheed rencontrèrent le président Kennedy à la Maison Blanche, le 25 mai 1961, pour signer le premier plan d'intégration entre une grande entreprise et le gouvernement fédéral. Kennedy qualifia ce plan de « tournant dans l'histoire des droits civiques ».
Lockheed-Georgia accepta d' « intégrer » les chaînes d'assemblage, de recruter des cadres noirs et d'être une usine pilote pour l'égalité des chances au travail, dans le Sud des États-Unis. Cet accord, conclu trois ans avant la loi sur les droits civiques de 1964, constitua une première brèche symbolique dans la « culture de Jim Crow », jusque-là dominante sur les lieux de travail dans le Sud.
Le succès des C-130 et C-141 permit à Lockheed-Georgia de remporter, en 1965, un nouveau contrat pour la réalisation du C-5 Galaxy, un gros appareil de transport, presque deux fois plus gros que le C-141. Mais des dépassements de coût et l'inflexibilité du Pentagone plongèrent l'entreprise dans de sérieuses difficultés financières, si bien que le contrat dut être renégocié avec le Pentagone, Lockheed acceptant une perte limitée. Quant à l'avion lui-même, il s'avéra une merveille technologique, utilisée au Vietnam et ailleurs. C'est alors que l'effectif de l'usine de Marietta atteignit son plus haut niveau historique : 32 945 salariés en 1969.
Mais la fin de la guerre du Vietnam entraîna une forte baisse de l'activité, le personnel retombant à 8 400 en 1977. Les commandes de C-130 passées par le Pentagone jouèrent néanmoins un rôle stabilisateur sur l'activité de Lockheed-Georgia. Au cours des années suivantes, l'usine fut d'abord chargée de rallonger toute la flotte des C-141 et d'ajouter un système de ravitaillement en vol à ces avions, puis, dans les années 1980, de construire 50 exemplaires d'un Galaxy plus puissant, le C-5B.
Mais au début des années 1990, avec la fin de la guerre froide et la réduction du budget de la défense, l'ère des grosses commandes était terminée. Lockheed, comme les autres constructeurs aéronautiques, dut se restructurer. L'usine historique de Burbank fut fermée, les autres usines californiennes se consacrèrent aux missiles et à l'espace, tandis que l'usine de Marietta se concentra sur la construction aéronautique — avec celle de Fort Worth, rachetée en 1993 à General Dynamics.
En 1995, Lockheed Corporation se rapprocha d'un spécialiste de l'espace et des missiles, Martin Marietta Corporation, ancien grand constructeur aéronautique et troisième fournisseur du Pentagone. La fusion des deux entreprises donna naissance à Lockheed Martin Corporation. Les activités de Géorgie furent renommées Lockheed Martin Aeronautical Systems Company (LMASC).
Au début du XXIe siècle, l'usine de Marietta construit une nouvelle version du C-130, le C-130J, ainsi que le chasseur Lockheed F-22 Raptor, et modernise toute la flotte des C-5 Galaxy. En 2005, l'usine, qui emploie 7 800 salariés, a construit le premier C-5M Super Galaxy. Le secrétaire à la Défense Robert Gates a annoncé, le 7 avril 2009, la réduction à quatre des nouvelles commandes de F-22, après les 183 appareils déjà livrés ou commandés, ce qui menace l'emploi de 2 000 salariés qui travaillent sur ce programme, sur les 7 000 que compte l'usine de Marietta.