L'expression 2 + 2 = 5 (« deux plus deux égalent cinq ») est parfois utilisée comme une représentation brève et frappante d'un sophisme destiné à perpétuer une idéologie politique. Elle illustre également le caractère formel de la logique, qui étudie les mécanismes du raisonnement indépendamment de la matière à laquelle celui-ci peut s'appliquer.
Le philosophe et logicien britannique Bertrand Russell (1872-1970), afin d'illustrer le principe selon lequel n'importe quelle proposition peut être déduite d'une proposition fausse, a eu recours à cette identité mathématique. À un de ses étudiants en philosophie qui lui demandait : « Prétendez-vous que de 2 + 2 = 5, il s’ensuit que vous êtes le pape ? », Russell proposa la démonstration suivante :
Léo Ferré fait référence à l'expression et à son utilisation chez Dostoïevski dans la chanson "L'Imaginaire" (album Ludwig-L'Imaginaire-Le Bateau ivre, 1982) : "Les logarithmes lanceront un défi aux machines à calculer / Les machines à calculer se tromperont et deux et deux feront peut-être cinq comme disait Dostoïevski et ça sera charmant".
« 2 + 2 = 5 » est le titre de la première chanson de l'album Hail to the Thief du groupe Radiohead. Les paroles permettent de supposer qu'il s'agit d'une référence au 1984 de George Orwell.
Dom Juan (dans la pièce de Molière de 1665) : « Je crois que deux et deux sont quatre, Sganarelle, et que quatre et quatre sont huit. » (Acte III, sc. 1), à quoi Sganarelle, valet du libertin, répond : « Votre religion, à ce que je vois, est donc l'arithmétique ? »
Notes d'un souterrain (Dostoievski - 1864) : « Hé messieurs ! Quelle sera alors ma volonté quand on en arrivera au formulaire et à l'arithmétique, quand il n'y aura en usage que deux fois deux font quatre ? »
Lettre de Nietzsche à sa sœur (1865) : « En ce qui concerne ton principe selon lequel le vrai serait toujours du côté de la difficulté, je suis en partie d'accord avec toi. On a néanmoins du mal à concevoir que deux fois deux ne font pas quatre ; en est-ce plus vrai pour autant ? »
Lettre d'Ibsen à Georg Brandes (17/02/1871) : « Qu'est-ce qui m'assure que, sur la planète Jupiter, 2 et 2 ne font pas 5 ? »
(De Stalker Éditeur - Paris)
Deux et deux font cinq, sous-titré 2 + 2 = 5, est un recueil de contes humoristiques publié par Alphonse Allais en 1895. Le contenu même du recueil n'a pas de rapport avec son titre, si ce n'est qu'il est tout aussi absurde.
Dans un sketch de Pierre Desproges : « Savez-vous seulement quelle différence il y a entre un psychotique et un névrosé ?
Un psychotique, c'est quelqu'un qui croit dur comme fer que 2 et 2 font 5, et qui en est pleinement satisfait. Un névrosé, c'est quelqu'un qui sait pertinemment que 2 et 2 font 4, et ça le rend malade. »
George Orwell avait déjà utilisé ce concept avant la publication de 1984. À l'époque où il était employé à la BBC, il devint habitué aux méthodes de la propagande nazie. Dans son essai Looking Back on the Spanish War, publié quatre années avant 1984, Orwell explique que la théorie nazie nie l'existence d'une chose telle que la « vérité » et tente de prendre contrôle du passé en transformant les affirmations du leader en vérité absolue : « S'il dit que deux et deux font cinq, eh bien, deux et deux font cinq. Cette perspective m'effraie bien plus que les bombes. »
Sur le plan politique, cet usage a été illustré par le roman 1984 (troisième partie, chapitre II), où cette formule est opposée au truisme « deux plus deux égale quatre ». Le héros, Winston Smith, se demande dans son journal si l'État a le pouvoir de définir la formule « deux plus deux égale cinq » comme exacte ; il se demande si le fait que tout le monde y croie en fait une vérité (Solipsisme).
À la fin du livre, le héros écrit rêveusement l'équation « 2 + 2 = ». Dans la version originale, il laisse un blanc énigmatique, tandis que dans la version française, il écrit « 5 ».
Lors de l'explication de la doctrine du parti, le dirigeant dit à Winston que le parti peut décider de dire que 2 + 2 = 5 dans certaines circonstances, mais que dans d'autres il est obligé d'admettre que 2 + 2 = 4. En pratique, la vérité scientifique officielle donnée au public doit coller avec la doctrine politique, tandis que les ingénieurs militaires utilisent des théories correctes dans leur travail. Cette contradiction apparente n'est qu'un aspect de la doublepensée.
Pour de nombreux biographes d'Orwell, la source principale de cette réflexion a été Assignment in Utopia de Eugene Lyons, récit décrivant l'Union soviétique à son époque. Il comporte un chapitre intitulé « 2 + 2 = 5 », slogan utilisé par le gouvernement de Staline pour annoncer que le plan quinquennal serait accompli sur une période de quatre ans, et qui fut pendant un moment utilisé largement à Moscou.