Parallèlement, la compagnie annonce que son activité bas tarifs, commercialisée sous la marque AirLib Express, a transporté près de deux millions de passagers au cours de ses sept derniers mois d'activité entre Paris, Toulouse, Nice, Toulon, Perpignan, Marseille et Tarbes-Lourdes. Enfin, la compagnie confirme l'ouverture, en octobre 2002, de liaisons quotidiennes entre Paris-Orly-Sud et Rome-Fiumiccino, Milan-Malpensa, Venise et Pise. S'inspirant des "low cost", Air Lib a donc fini par se lancer sur le créneau occupé avec succès par Ryanair et EasyJet. Des vols à partir de 100 euros l'aller simple seront par ailleurs ouverts vers Lisbonne et Porto. En fait, le prix évoluera de 29 euros à 200 euros l'aller simple en fonction du remplissage de l'avion.
L'enjeu de cette conversion aux vols "low fare" est vital. La compagnie est parvenue à équilibrer l'exploitation de ses vols vers la Réunion et les Antilles, et le lancement de ses vols vers l'Algérie paraît être un succès. L'essentiel de ses pertes - 7 millions d'euros par mois provient donc des lignes domestiques. Sur ce réseau desservi avec une flotte de 10 MD83 monoclasse de 162 passagers, le pari est d'atteindre un taux de remplissage de 75%, au lieu de 50% à 55%, et de gagner 25% de trafic. Il reste que le lancement des vols à bas prix se heurte sur le plan commercial à la riposte d'Air France. Et, sur le plan social, aux réticences en particulier des navigants protestant contre les modifications de leurs conditions de travail.
Air Lib Express se présentait comme une compagnie "Low Cost" mais était surtout une compagnie qui pratiquait des prix bas, inférieurs à ses prix de revient. L'organisation des compagnies "Low Cost" est assez différente de celle des compagnies classiques et leur permet d'obtenir des prix de revient très faibles, d'où leur nom (exploitation d'aéroports secondaires, facturation de services habituellement compris dans le prix du billet, rotations des avions supérieure aux standards etc.). Cette organisation est le fait de compagnies nouvelles créées et organisées autour de ces objectifs, non le fait d'une compagnie "classique" dont la structure de coût et l'organisation ne sont pas adaptées.
La ligne sur l'Algérie assure une contribution nette aux résultats, seule l'activité long courrier doit être « réorganisée » car le trafic « a chuté de 30% sur les Antilles ». La compagnie avait donc décidé de réduire sa capacité sur les Antilles et de la redéployer sur l'Afrique Noire mais le gouvernement lui a fait savoir que cette restructuration n'était pas compatible avec les textes européens.
Plus d'un an après le reprise de l'ex AOM-Air Liberté, Air Lib n'a toujours pas été en mesure d'annoncer une prise de participation significative au capital de la nouvelle compagnie. De toute évidence, les collectivités territoriales qui avaient été suscitées un temps ont choisi une autre voie. Air Tahiti Nui a accru ses capacités propres lorsque Air Lib a décidé de ne plus se poser à Tahiti-Faaa et La Réunion monte sa propre compagnie, Air Austral. D'autres ont ouvert le dossier avec d'autant plus de prudence que la desserte des DOM est loin d'être sous-capacitaire et que certaines compagnies sont prêtes à renforcer leurs dessertes. Quant aux investisseurs traditionnels, ils ne sont pas nombreux.
Si la compagnie a bien rempli ses avions avec les bas tarifs expérimentés depuis le mois d’avril sur six lignes au départ d’Orly (à partir de 29 euros l’aller simple hors taxes vers la province), elle a en revanche plombé son compte d’exploitation. Selon un audit réalisé en octobre par le cabinet KPMG, le prix moyen du billet sur restait inférieur de 12 euros à son seuil de rentabilité.
Car le modèle des low cost, qui permet de réduire de 35 à 50% les dépenses d’exploitation par rapport à celles des compagnies classiques, répond à une stratégie précise. Les critères, en matière de flotte, de coûts salariaux, de lieux d’atterrissage et de distribution, sont exigeants. Et, pour les respecter, Air Lib doit subir des transformations radicales :
1. Renouveler sa flotte. À l’image d’easyJet qui vient de commander 120 Airbus A319, les appareils doivent être homogènes afin de limiter les frais d’entretien. La flotte d’Air Lib est disparate et vieillissante. Ses DC10 et MD82 ou 83 consomment 30% de carburant de plus que des Airbus de même capacité. Lors de son passage à Paris, le 13 janvier, Erik de Vlieger assure vouloir renouveler la flotte: «Je suis prêt à garantir l’acquisition de 29 Airbus A320 jusqu’à 150 millions d’euros. »
2. Baisser ses coûts de personnel. Soumis aux législations irlandaise et britannique, Ryanair et easyJet paient des charges sociales réduites de moitié par rapport aux compagnies françaises, sur des salaires inférieurs de 20%. Moins nombreux, le personnel de bord accepte de faire le ménage de l’appareil à l’arrivée. Les pilotes volent plus de 800 heures par an, contre 700 pour ceux d’Air Lib.
3. Sortir du circuit des agences. Plus de 90% de la distribution des compagnies low cost s’effectue grâce au Net. Air Lib, qui a investi 70000 euros en 2002 dans la distribution des billets sur Internet, n’assure ainsi que la moitié de ses ventes. L’autre moitié provient des agences, ce qui grève les recettes et souligne une contradiction supplémentaire : Air Lib, qui se veut une compagnie européenne low cost privilégiant Internet, remplit via les agences ses 21 fréquences hebdomadaires sur les Antilles et la Réunion..
Air Lib est alors surtout une compagnie low fares (bas tarifs), plus qu’une compagnie low cost!