Durant les saisons estivales de 1919 et 1920, des expéditions hydrologiques sont conduites sur les rivières Manicouagan et Outardes qui se jettent dans le fleuve Saint-Laurent aux environs de Baie-Comeau. On évalue alors leur débit combiné à 40 millions de mètres cubes ce qui en fait l'un des plus importants systèmes hydriques au Canada. Le harnachement de ce potentiel est donc très intéressant mais l'éloignement des grands centres et l'absence de réseau routier pour les atteindre ne permet pas de les développer à ce moment-là. De plus, les investissements pour construire des barrages dans cette région étaient prohibitifs.
Après la Seconde Guerre mondiale, les gisements de fer découverts dans la région et l'exploitation de la forêt donnent lieu à un formidable développement de la Côte-Nord. Des villes comme Sept-Îles et Baie-Comeau sont maintenant reliées au centre de la province par une route. En même temps, l'industrie demande de plus en plus d'électricité dans le sud du Québec et les techniques de transport d'électricité sur de grandes distances se sont améliorées.
En 1955, Hydro-Québec lance une campagne d'évaluation très poussée du potentiel hydroélectrique qui durera cinq ans. Ces études montrent le potentiel exceptionnel du site et mettent en évidence la nécessité de construire plusieurs barrages de manière à graduer le relâchement d'eau et ainsi profiter au maximum du dénivelé. Avant la fin de ces études, en 1959, le projet Manicouagan-Outardes est lancé, tellement les données préliminaires sont prometteuses. On prévoit de construire cinq barrages sur la rivière Manicouagan (nommés Manic-1, Manic-2, Manic-3, Manic-4 et Manic-5) ainsi que trois sur la rivière aux Outardes (Outardes-2, Outardes-3 et Outardes-4). Manic-4 ne verra jamais le jour suite à une erreur de calcul : en effet, après la construction de Manic-5 et le début des travaux de Manic-3, les ingénieurs réalisent que le projet Manic-4 empiète sur le bassin Manic-3 et le barrage Manic-5.
À l'automne 1959, les installations des différents chantiers de barrages débutent. On construit également une route d'accès, des pistes d'atterrissage, des lignes de communication à micro-ondes et on débute la ligne de transport à haute tension qui servira à acheminer le courant vers les grands centres.
Les ingénieurs d'Hydro-Québec ont fait l'évaluation de plusieurs types de barrages pour ce projet. Les deux principaux retenus sont ceux à enrochements et à voûtes multiples. Les deux types ont une stabilité et une sécurité similaires mais le type à voûtes est moins coûteux. L'enrochement sera retenu pour les barrages plus modestes du projet mais ils choisissent le second type pour les autres. Au printemps suivant à Manic 5, on commence les travaux d'enlèvement du sol pour atteindre la roche-mère, la construction des tunnels de dérivation, la construction du batardeau qui déviera la rivière vers ces tunnels afin d'assécher la rivière pour la construction du barrage. Ces travaux préliminaires prennent deux années et le 22 septembre 1962, la première coulée de béton s'effectue sur le barrage. La construction se terminera au printemps 1964.
La fin des travaux sur le barrage ne veut pas dire que Manic 5 est terminé. En effet, les tunnels des conduites de dérivation sont fermés et l'eau commence à s'accumuler derrière le barrage. On estimait qu'il faudrait au moins sept ans pour obtenir un volume d'eau commercialement exploitable et dix ans pour atteindre le plein potentiel.
On peut maintenant procéder à la construction de la centrale électrique et à la pose des turbines. Les travaux se terminent en 1968 et le premier ministre Daniel Johnson est l'invité d'honneur pour l'inauguration.