Maltraitance - Définition

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L'importance quantitative de la maltraitance

Exemples à l'étranger

La maltraitance est un phénomène universel qui semble toucher toutes les sociétés. En Inde, par exemple, selon une enquête réalisée en 2005-2006 auprès de 12 447 enfants (de 5 à 12 ans) et de 2 324 jeunes adultes, 54% des enfants seraient victimes de maltraitance et, selon les autorités, un nombre aussi important concernerait les femmes, dont une sur six serait violée, assassinée, envoyée à l'asile ou battue à mort. Cette situation a incité la Ministre indienne de la femme et du développement de l'enfant, Renuka Chowdhury, à faire écrire et voter en septembre 2005 une loi révolutionnaire pour ce pays, la "Domestic Violence Bill" réprimant les violences faites aux femmes et leur donnant le droit de quitter leur logement en cas de maltraitance.

Plus près de nous, au Canada, selon une enquête nationale sur l'agression contre la conjointe, 51% des canadiennes ont déclaré avoir vécu au moins un cas de violence physique ou sexuelle. En 1993, parmi les conjointes, 29% des canadiennes ont déclaré avoir subi une agression physique ou sexuelle de la part de leur conjoint. Et ce phénomène semble avoir des risques importants de se reproduire encore longtemps, puisque les hommes violents ont appris à concevoir leur violence comme normale dans leur enfance : ils ont été en effet trois fois plus souvent les témoins de violence entre leurs parents que les hommes non violents. Toutefois, nous pouvons espérer que les efforts des gouvernements canadiens et québécois pour informer et lutter contre ce phénomène pourront infléchir quelque peu ce processus dévastateur pour les habitants de cette terre civilisée.

En France

Selon l'Enquête nationale sur les violences envers les femmes en France, une femme sur dix a déclaré avoir été victime de violence au sein de son couple. En 2003 et 2004, 211 personnes sont décédées en France de violences conjugales, à peu près 4 femmes pour un homme : très précisément 163 femmes victimes d'un homme et une d'une femme, 46 hommes victimes d'une femme et un d'un homme. Selon les mêmes sources, dans plus d'un cas sur deux, la mort violente surviendrait dans un contexte de dispute, et dans un cas sur trois, l'alcool serait impliqué.

Il y a aussi une maltraitance de tous les jours, aux conséquences usantes, même si elle est moins définitive, qui s'exerce contre les femmes, dans la rue ou dans les espaces publics. Toujours selon l'enquête ENVEFF, "dans la rue, les transports en commun ou les lieux publics, l'agression la plus fréquente est l'insulte ou la menace verbale. 13 % des femmes interrogées disent en avoir été victimes au cours de l'année. Pour plus de la moitié d'entre elles, cet affront s'est répété. Dans 25 % des cas, les femmes connaissent la personne qui a proféré l'insulte. Connus ou non, les trois quarts des auteurs sont des hommes".

Dans le domaine des placements en institution spécialisée, les résultats des études administratives et sociologiques donnent en France des chiffres contradictoires. Du côté administratif, les institutions de la DASS (Direction de l'action sanitaire et sociale) minimisent fortement l'importance des maltraitances. Selon elle, il n'y aurait eu que 209 signalements de maltraitance reçus pour l'année 2002 dans les établissements sociaux et médico-sociaux. Plus de la moitié des situations signalées (53 %) se seraient déroulées dans des établissements accueillant des mineurs. À peu près la moitié concernent des établissements pour enfants handicapés, 34 % des signalements concernent des adultes handicapés, et 13 % des personnes âgées. Enfin, les établissements concernés ont, pour 80 % d'entre eux, un statut d'établissement privé.

Si le personnel se trouve à l'origine du signalement dans 45 % des cas, la victime ou sa famille le sont dans 43%. Dans les 12 % restants, l'information provient d'un tiers extérieur, stagiaire, professionnel exerçant une activité libérale. Les violences les plus fréquemment signalées sont les violences sexuelles, à hauteur de 48 %, dont un tiers de viols, les violences physiques ne comptant que pour 21% et les négligences graves ne représentant que 8 %. Mais dans 7 % des cas, violences sexuelles et physiques se cumulent. Parmi les adultes, deux fois sur trois, la victime est une femme. Alors que quand les victimes sont mineures, on dénombre deux fois plus de garçons que de filles.

Du côté sociologique, il faut remarquer que les formes de maltraitance institutionnalisées sont beaucoup plus générales et subtiles, comme le notait le sociologue Erving Goffman au terme d'une enquête dans des asiles psychiatriques : l'individu qui arrive dans une institution carcérale est dès son arrivée « immédiatement dépouillé du soutien que lui assuraient [son environnement domestique], en même temps que commence pour lui ... une série d'humiliations, de dégradations, de mortifications et de profanations de sa personnalité ». De nombreux travaux scientifiques permettent d'y voir plus clair sur les limites des « chiffres officiels » de la délinquance et leurs compléments nécessaires par les enquêtes de victimation. Dans cette mesure, nous pouvons penser que les décomptes des signalements de maltraitance par l'administration sont très fortement sous-estimés parce que la plupart des mortifications sont considérés comme si normales qu'elles ne sont même pas perçues.

C'est un peu ce phénomène auquel fait allusion le Livre blanc de l'Unapei lorsqu'il déclare : « Le handicap constitue en soi un facteur de risque de maltraitance. Par ailleurs, de façon générique, on peut également avancer que toute institution est potentiellement maltraitante, ne serait-ce que parce que la vie en collectivité limite souvent l'expression de la singularité de chaque personne accueillie ». Un directeur de CAT (Centre d'aide par le travail) précisait : « Nous sommes confrontés par exemple à des cas de méchanceté chronique d'une personne vis-à-vis de plus jeunes. [...] nous sommes un peu gênés parce que, même si nous demandons une orientation et que nous l'obtenons, la procédure est tellement longue et difficile que nous ne pouvons pas régler immédiatement les cas de maltraitance de ce type ». De même, M. Pascal Vivet, éducateur spécialisé, insiste dans ce même rapport au Sénat sur la difficulté à obtenir des statistiques sérieuses sur la maltraitance des personnes handicapées, notamment en ce qui concerne la maltraitance « en creux » : « le domaine des violences psychologiques, que j'ai appelé violences en creux, reste très difficile à cerner. Autant il est possible de déterminer, par un contrôle médical adéquat, les violences "en bosse", autant pour ce qui relève du domaine de l'insuffisance, et qui représente selon moi près de 40 % des violences commises sur les personnes handicapées dans les institutions, nous éprouvons de grandes difficultés à incriminer qui que ce soit ». En conclusion, une responsable de la DASS fait remarquer que « les données qui nous sont transmises restent très faibles ». Force est de souligner, selon elle, « l'insignifiance de ces données. Assurément, le nombre extrêmement faible de signalements constitue le meilleur aveu de la sous-estimation, en France, de la maltraitance envers les personnes handicapées accueillies en établissements. Ils pourraient paraître signifier que rien ne s'est passé dans des milliers d'établissements répartis sur des dizaines de départements, ce qui, eu égard à la population visée, est tout simplement inconcevable ! »

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