Sélection sexuelle - Définition

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Historique de la notion

En publiant L'Origine des espèces (1859), Charles Darwin révolutionne la théorie de l'évolution en proposant le mécanisme de sélection naturelle basé sur la reproduction différentielle des individus en fonction de leur capacité à survivre. Plus tard, il ajoute un autre versant à sa théorie de l'évolution, versant qu'il baptisera lui-même sélection sexuelle, arguant que la compétition entre individus pour la reproduction sexuée peut aussi être un facteur majeur d'évolution de certains traits inexplicables dans le seul cadre de la sélection écologique, l'exemple le plus connu cité par Darwin étant celui de la queue du paon.

Dans l'Angleterre victorienne, Darwin eut beaucoup de difficultés à défendre cet aspect de sa théorie contre ses contemporains, comme face à son collègue Alfred Wallace qui était pourtant simultanément arrivé à une formulation analogue de la théorie de la sélection écologique. La majorité des savants de l'époque refusait en effet de voir dans la sélection sexuelle autre chose qu'une forme de sélection de survie liée à la compétition entre les mâles d'une espèce, refusant l'idée que le choix des femelles puisse exercer une quelconque pression évolutive. La théorie de la sélection se voit d'autant moins acceptée que Darwin la développe dans un ouvrage intitulé La Filiation de l'homme et la sélection liée au sexe où il défend aussi l'idée que certains attributs humain sont des purs produits de la sélection naturelle. Il cite ainsi des traits dimorphiques comme la barbe présente chez les seuls individus mâles ou la relativement faible pilosité humaine comparée aux autres mammifères comme exemples de produits de la sélection sexuelle chez l'être humain.

Ce n'est qu'au cours du XXe siècle, notamment grâce aux travaux de Ronald Fisher dans les années 1930 mais surtout à partir des années 1970, avec les travaux de Robert Trivers ou Robert Williams que cet aspect de la théorie darwinienne sera pleinement accepté comme un mécanisme à part entière. Ronald Fisher contribue par exemple à renouveler la notion en appliquant des méthodes statistiques à la génétique des populations. Il montre par exemple qu'un léger biais dans la préférence des femelles qui les ferait préférer des mâles dotés de longues plumes à des mâles dotés de plumes plus courte peut conduire à une situation évolutive où de génération en génération, le plumage des mâles augmente car à chaque génération les mâles les plus fertiles sont ceux qui ont les plumes les plus longues dans la population. Dans le même temps, le biais de préférence des femelles s'accentue : celle qui choisissent les mâles les plus reproductifs sont aussi celle dont les descendants seront le plus nombreux. Ainsi dans la démonstration de Fisher, un léger biais dans la préférence d'un sexe pour les attributs de l'autre peut conduire à une situation extrême jusqu'au point où l'avantage reproductif est compensé par le désavantage en termes de survie (risque d'être repéré par un prédateur, par exemple).

Au cours des années 1960, William Hamilton poursuivra les travaux de Fisher. Il contribuera par exemple à la théorie de la reine rouge expliquant l'avantage de la reproduction sexuée en ce qu'elle permet de résister de façon plus efficace aux parasites.

L'idée d'évolution désavantageuse sera poussé plus avant par Amotz Zahavi qui explique, en 1975, par sa théorie du handicap que le fait qu'un attribut soit un handicap entraîne précisément qu'il soit préféré par les membres de l'autre sexe. En effet, ce handicap est aussi un signal faisant la preuve directe de la qualité de l'individu puisque ce dernier est capable de survivre malgré ce handicap. Ainsi, pour les espèces du genre Paon, plus les plumes de la queue sont longues, plus le mâle a du succès quand bien même elles handicapent fortement les déplacements de l'animal.

Enfin, en appuyant sur le rôle du conflit sexuel défini par William Rice, Locke Rowe et Göran Arnvist, Thierry Lodé réintroduit la divergence d'intérêt entre mâle et femelle comme une force fondamentale de la théorie évolutive. Mâles et femelles pratiquent une guerre des sexes depuis la mante religieuse au combat des otaries. Le conflit sexuel entraîne un processus de co-évolution antagoniste dans lequel un des sexes évolue en développant des traits manipulateurs tandis que l'autre sexe (souvent les femelles) contre cette évolution en manifestant des caractéristiques de résistances. Ce phénomène détermine ce que Thierry Lodé appelle, « le tir à la corde évolutif ». C'est l'existence de la diversité des stratégies sexuelles et le conflit sexuel qui favorisent la spéciation.

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