L'Âme de la France est le nom donné par le sculpteur français Carlo Sarrabezolles à trois statues monumentales identiques qu'il a réalisées dans trois matériaux différents durant l'Entre-deux-guerres, la première en plâtre en 1921, la deuxième en pierre en 1922 et la dernière en bronze en 1930. D'une hauteur de 3,20 mètres, elles représentent une guerrière aux seins nus levant les bras vers le ciel.
Réalisée à partir du premier modèle, la sculpture la plus récente est actuellement installée sur un piédestal à l'entrée d'Hell-Bourg, dans les Hauts de l'île de La Réunion, département d'outre-mer de l'océan Indien. Elle a été offerte par le député Lucien Gasparin à la commune de Salazie en 1931 et elle a depuis lors traversé l'histoire réunionnaise d'une façon chaotique.
D'abord érigée dans le petit centre-ville en face de la mairie, elle est rapidement déboulonnée à la dynamite par le curé, puis successivement conservée en morceaux derrière un salon de coiffure, réparée par soudure et enfin déplacée de quelques kilomètres jusqu'au lieu-dit où elle se trouve encore aujourd'hui. Là, elle est à nouveau arrachée de son socle, cette fois par un cyclone tropical, puis laissée à l'abandon face contre terre pendant vingt ans avant d'être finalement retrouvée par hasard lors de travaux en 1968, à la suite de quoi elle est remise en place, réhabilitée en tant que monument aux morts de la Première Guerre mondiale, célébrée publiquement avec faste, inscrite à l'inventaire général des monuments historiques et enfin classée en tant que tel en 2004.
Comme les deux autres modèles, en plâtre et en pierre, L'Âme de la France en bronze est une statue de 3,20 mètres de haut. Elle représente une guerrière casquée étendant ses deux bras vers le ciel, sa main droite terminée par une délicate petite gerbe de fleurs et son poing gauche serrant au contraire avec force un bouclier enfilé sur son avant-bras.
Cette posture singulière formant un V n'est pas gratuite. D'après Le Quotidien de La Réunion, « cette femme symbolise “la victoire de la France à ses morts reconnaissants” », en l'occurrence elle est un hommage aux soldats qui sont tombés pendant la Première Guerre mondiale, une guerre à laquelle La Réunion et les Réunionnais ont participé pour la défense de la Patrie, notamment emmenés par l'aviateur Roland Garros. Ainsi, le personnage figure visuellement la gratitude du pays envers les Poilus grâce à ce que la base Mérimée des Monuments historiques appelle une « allégorie profane », et la statue peut donc faire fonction de monument aux morts, comme c'est le cas sur l'île de l'océan Indien.
Toutefois, le personnage de L'Âme de la France présente également des caractéristiques particulières qui tranchent avec ses attributs martiaux. D'abord, elle a été « façonnée avec amour dans ses moindres détails, des replis de la jupe jusqu'aux splendides tresses », deux longues nattes qui « glissent dans son dos ». Ensuite, chose plus importante encore, elle représente une jeune femme à demi-nue, le ventre et les seins découverts « à l'air libre », le corps élancé et la tête tournée vers la droite dans une position finalement très lascive.