Par contre, il était possible de concilier les valeurs observées de H, de f (déduite des mesures au pendule par la troisième relation de Clairaut fournie plus haut) et une valeur théorique de f en supposant que la densité à l'intérieur de la Terre croît avec la profondeur et en déterminant l'aplatissement théorique en intégrant une équation différentielle aussi fournie par Clairaut dans son ouvrage sur la figure de la Terre. Avec des notations modernes, l'équation différentielle de Clairaut peut s'écrire comme suit :
d²f/ds² + (6 Δ/s) df/ds + [6 (Δ – 1)/s²] f = 0,
où la variable indépendante s est le rayon de la sphère qui possède le même volume que celui contenu à l'intérieur d'une surface équipotentielle quelconque repérée justement par s. L'aplatissement de cette strate équipotentielle interne est f = f(s) et sa densité est ρ = ρ(s). La densité moyenne de la matière contenue dans ce volume est D = D(s). Sous ces conditions, la fonction Δ = Δ(s) représente le rapport ρ/D, qui est un nombre pur. La variable s, communément appelée le rayon moyen, varie de s=0 (le centre) à s=R (la surface extérieure). L'équation différentielle précédente doit être intégrée en imposant qu'au centre l'aplatissement f(s) prenne une valeur finie f(0) et qu'à la surface on ait la relation
[df/ds + 2 f/s]s=R = (5/2) q/R.
Cette dernière condition aux limites résulte de la théorie de Clairaut. Pour que l'on puisse effectuer cette intégration, il faut connaître la fonction Δ(s), et donc la densité ρ(s), à chaque niveau, puisque la densité moyenne D(s) se déduit de ρ(s) par une intégration.
L'équation différentielle de Clairaut relie l'aplatissement à la loi de densité en fonction du rayon moyen ou, ce qui revient au même, en fonction de la profondeur. Au départ, on ne connaissait pas, même de manière approchée, la distribution des masses à l'intérieur de la Terre. On en était donc réduit à des hypothèses plus ou moins plausibles. Dans cette alternative, plutôt que de servir d'équation permettant de calculer l'aplatissement théorique pour un modèle de densité connu, on se servait de cette équation pour valider un modèle de densité hypothétique. On cherchait ainsi un modèle de densité qui soit compatible, via l'équation différentielle de Clairaut, avec une valeur observée de l'aplatissement à laquelle on accordait un certain crédit. Le modèle devait en outre posséder les valeurs réelles du rayon moyen et de la masse de la Terre. Il s'agit-là typiquement de la résolution d'un problème géodésique ou géophysique inverse, consistant à inférer des propriétés concernant l'intérieur de la Terre au moyen de données mesurées en surface ou à l'extérieur.