Les phéromones humaines seraient captées par le système olfactif

Publié par Adrien le 25/03/2011 à 00:00
Source: Daniel Baril - Université de Montréal
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Les travaux de M. Frasnelli apportent une contribution majeure à la connaissance du système phéromonal chez l'être humain. (Photo: iStockphoto)
L'existence de phéromones chez les humains est de plus en plus attestée, selon les études réalisées dans ce domaine depuis une dizaine d'années. "Une phéromone est une molécule sécrétée à l'extérieur du corps par les glandes sudoripares et qui modifie le comportement ou l'humeur d'un autre individu", explique Johannes Frasnelli, chercheur postdoctoral au Centre de recherche en neuropsychologie et cognition du Département de psychologie de l'Université de Montréal. Ses travaux viennent d'apporter une contribution majeure à la connaissance du système phéromonal chez l'être humain et montrent que, contrairement à une croyance très répandue, l'organe voméronasal (OVN) n'est pas à l'oeuvre dans la détection de ces molécules.

Un système attesté

Chez les mammifères, les phéromones sont captées par un circuit nerveux distinct du système olfactif appelé "organe voméronasal" (du nom latin de l'os qui sépare les deux narines, le vomer). Cet organe est composé de terminaisons nerveuses situées de part et d'autre de la cloison nasale et conduisant à un bulbe olfactif secondaire ou accessoire.

L'existence d'un OVN chez l'humain a été l'objet de controverses parce que les résultats des recherches se sont avérés contradictoires. "Il faut un endoscope pour scruter cette zone nasale et les observations varient selon l'état des muqueuses", précise Johannes Frasnelli.

Selon la méthode employée, les observations font état d'une structure nerveuse particulière là où se trouve l'OVN chez les animaux, soit à deux ou trois centimètres de l'entrée de la cavité nasale, chez 25 à 75 % des personnes. "Cette structure est néanmoins révélée chez 100 % des individus lorsqu'on procède par autopsie", ajoute le chercheur. Il y aurait donc bel et bien une structure voméronasale chez l'être humain.

Il n'en fallait pas plus pour qu'on déduise que la perception des phéromones passe par ce circuit, ce qui a soulevé de nouvelles polémiques, puisque des travaux ont montré que ce système semblait inactif. Les expériences de Johannes Frasnelli vont dans le sens de cette dernière observation et pourraient bien clore le débat.


Johannes Frasnelli
Simple vestige ?

Le chercheur et son équipe, dirigée par la professeure Marilyn Jones-Gotman de l'Université McGill, ont fait respirer à des femmes hétérosexuelles des concentrés d'androstadiénone, soit l'une des principales molécules reconnue comme étant une phéromone humaine. Sécrétée par les glandes sudoripares des aisselles des hommes, l'androstadiénone influerait sur l'humeur, l'état psychophysiologique, le flot sanguin cérébral et le taux de cortisol des femmes, mais serait sans effet sur les hommes. Cette molécule a son équivalent féminin, l'estratétraénol, qui a une influence sur les hommes.

À forte concentration, l'androstadiénone dégage une odeur perceptible par les femmes. Chez celles qui ont participé à l'expérience, de 72 à 75 % avaient un OVN visible. "L'expérience n'a mis au jour aucune différence significative dans le seuil de perception de la phéromone entre les femmes qui ont un OVN visible et celles qui n'en ont pas", affirme Johannes Frasnelli. Des tests de perception olfactive ont aussi été effectués à l'aide d'une odeur de bois de santal et aucune différence n'a été notée entre les deux groupes de femmes.

La même expérience a été reprise en obstruant la zone de l'OVN à l'aide d'une pièce de latex et a donné les mêmes résultats: il n'y a aucune différence significative dans la perception de la phéromone ou de l'odeur de santal que cette zone soit obstruée ou non.

Dans une troisième expérience, les chercheurs ont recouru à la tomographie par émission de positrons pour observer l'effet de la phéromone dans le cerveau. L'imagerie cérébrale montre que l'hypothalamus est activé par l'androstadiénone, mais pas l'aire associée à la perception des odeurs dans le cortex orbitofrontal droit. L'effet est exactement le même chez les femmes avec ou sans OVN visible et chez celles dont cette zone a été obstruée par du latex ou a été laissée libre.

"Cela démontre que la zone voméronasale n'a pas de fonction chez les humains et que les phéromones sont sans doute captées par le système olfactif, déclare le chercheur. D'ailleurs, les terminaisons nerveuses de l'OVN ne se rendent pas au cerveau, sauf chez le foetus. Le système voméronasal humain ne serait donc qu'un vestige de ce qu'on trouve chez les autres mammifères."

Ce type d'expériences produit généralement des résultats différents selon la phase du cycle menstruel de la femme, mais les chercheurs n'ont pas tenu compte de ce facteur parce que la différence serait minime, selon Johannes Frasnelli.

Ces travaux sont publiés dans le numéro de mars de la revue Human Brain Mapping.
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