Ardoise (élément de couverture) - Définition

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Introduction

Toits de Laguiole.

L'ardoise est un petit élément de couverture des bâtiments, façonné par débit et fente de certains schistes fins dits ardoisiers.

Pérouse de Montclos la définit comme : « plaque de roche schisteuse, posée à recouvrement », dans la rubrique des matériaux de couverture d'Architecture, méthode et vocabulaire. Brandilly, dans le Manuel du Couvreur-Ardoisier, précisait déjà que ce sont : « des dalles minces fendues dans des blocs de schistes ardoisiers ». Le mode de fabrication par fendage et l'usage en couverture des bâtiments par assemblage de petits éléments se recouvrant, caractérisent l'ardoise de couverture en l'opposant à tout autre objet fait de schiste ardoisier.

On désigne aussi par ce nom des matériaux analogues par l'aspect ou par la mise en œuvre (ardoise de fibro-ciment, ardoise de zinc, etc.)

château de Chenonceau, « Plus que le marbre dur me plaist l’ardoise fine » Du Bellay.

Historique

Étymologie

Au XVIIe siècle, Jacob Huchet, érudit français cité par Furcy Soulez-Larivière, se fonde sur son intuition linguistique pour rapprocher ardoise du toponyme Ardenne par le truchement des formes locales ardouèse et ardnaise. Il évoque une érosion patoisante de l'expression pierre ardenaise laquelle aurait abouti à la forme ardoise. C'est ignorer que Chrétien de Troyes enfermait déjà entre 1160 et 1184 un malheureux captif en un « palais couvert d'ardoise », dans son roman le Perceval.

Émile Littré, dès 1889 envisage une origine celtique arddu, ardwn signifiant sombre et qui aurait évolué en ardoise et Ardenne, « la sombre forêt des Gaules ».

Oscar Bloch et Walther von Wartburg établissent une première occurrence certaine du terme au XIIe siècle, sous la forme latinisée ardesia. Ils supposent qu'elle s'apparente au celte ard qui signifie haut et dont a probablement dérivé le latin arduenna (sylva) puis le français « Ardenne ».

Pierre-Yves Lambert propose la forme gauloise *aritisia, apparentée au latin paries, parietis, paroi, mur (Chute du /p/ indo-européen initial en celtique. Cf. latin pater / vieil irlandais atir.). Il doute de la reconstruction de la forme latinisée ardesia en *ardēsia.

Légende

Aux temps mérovingiens, Lucinius, brave capitaine, connétable du roi Clotaire, gouverneur de l'Armorique, mais aussi zélé chrétien, adopta la règle monastique après que sa promise fut entrée en ladrerie. La lèpre était si redoutée en ce temps là, qu'on accompagnait les malades au lieu qui leur était réservé, en chantant l'office des morts ! La vanité de ses projets mondains l'incita à se retirer dans la pauvreté, non loin d'Angers, la capitale de la province armoricaine, en louant Dieu de sa mansuétude pour avoir gardé son corps de la souillure.

Le peuple l'élut bientôt évêque pour la vertu et les mérites dont il faisait montre du fond de sa retraite. Lézin, notre bon capitaine, eut alors à charge la gestion de quelque carrière appartenant à l'évêché et dont le bénéfice semble avoir été assez fructueux. L'on prétend pourtant que l'avantage spirituel surpassa le temporel. Lézin lisait l'office au bord de la carrière et suspendit à l'occasion la chute d'un rocher qui, sans cette heureuse intervention, aurait brisé et mortifié quelques laborieux perreyeurs.

En 1820 environ, pendant la restauration monarchique, Lézin, promu à la dignité de saint, se vit attribuer la découverte de la fissilité du schiste et, par conséquent, la prospérité du bassin ardoisier. On en fit alors le saint patron des ardoisiers. Belle carrière !

Traces archéologiques et monumentales

Dictionnaire raisonné de l'architecture française par Eugène Viollet-Le-Duc

Viollet-Le-Duc mentionne, dans son Dictionnaire raisonné de l'architecture française du onzième au quinzième siècle, la découverte « dans des constructions du XIe siècle… de nombreux fragments de grandes ardoises très épaisses et mal coupées… ». Il estime qu'elles « constituaient une excellente couverture ». À ce propos, il ne parait pas distinguer clairement l'ardoise de la lauze. Pourtant les deux matériaux, faits de la même roche, contrastent à maints égards.

La lauze est la fleur du schiste, au flanc du coteau où il affleure. Le soleil et la pluie la métamorphosent ; la froidure l'épanouit et l'homme vient la cueillir au bas d'un éboulis, naturellement façonnée, cadeau. Posée à bain de mortier, elle garnira une forte charpente ou le hourdis d'une voûte robuste sur un four banal, un lavoir ou un grand puits. L'industrie en est occasionnelle, personnelle, tout au plus villageoise, et ne suppose aucun investissement. Son poids important ne lui permet guère de franchir que de faibles portées. Son relief rustique lui interdit d'habiller un toit aux formes variées ou aux lignes précises. Ses couleurs de roche dégradée enracinent la maison dans le pays.

L'ardoise circule dans des veines aux tréfonds de la terre. C'est un trésor caché qu'on ira quérir par le fer et le feu, de haute lutte. Elle verra le jour encore suintante de son eau de carrière, et ce n'est que dans cet état qu'on pourra la fendre en fines dalles qui sonnent claire. Dès que le bloc aurait séché, on n'en ferait plus qu'un perron, ou un moellon ! Son industrie est coûteuse ; elle exige une main d'œuvre nombreuse et très qualifiée. Sa finesse et sa légèreté la rendent apte aux mouvements les plus complexes, aux flèches hardies comme aux majestueux dômes. Elle élève la maison au ciel qui se reflète dans ses cristaux rangés.

Retrouvées près de mille ans après qu'elles sont tombées du toit, on ne perçoit pas toujours bien la différence entre la lauze et l'ardoise, une grosse ardoise, une fine lauze, va savoir ! La certitude, c'est de voir un clou, un de ces clous à tête plate qui enflé par la rouille, a fermé le trou épaufré, fait au marteau, toc ! Pas avant le XIIe siècle, pas avant, mais assez nombreux depuis ce moment, comme si une grande industrie moderne avait fleuri sur les bords de la Meuse, en ce temps là, dans les pays d'Ardennes, pour parer les beaux toits de France et des pays allemands.

Le prompt développement des ordres cistercien et prémontré dans les régions avoisinantes aux gisements de schistes ardoisiers, réunit toutes les conditions d'une exploitation rationalisée. De vastes organisations disposant de grands pouvoirs et de finances prospères, entreprenaient l'érection de bâtiments qu'elles souhaitaient pérennes. L'émulation entre les deux ordres et l'opportunité de quelques progrès technologiques dans l'art de l'étaiement et celui du pompage détermina l'approfondissement des carrières. On eut recours à des galeries d'assèchement et d'accès. Progressivement l'extraction devint souterraine. La façon fit vite école. Dès la fin du XIIe siècle les Angevins couvraient déjà des chapelles et des églises de bonnes et claires escailles. À la même époque, au Pays de Galles, on produisait d'excellentes ardoises, et en Bretagne, un peu plus tard.

Dès la fin du XVe siècle les châteaux de la Loire sont tous couronnés des ardoises de l'Anjou. Leurs fines flèches et leurs nombreuses lucarnes n'eussent point été possible sans ce matériaux.

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