Centrale nucléaire de Gentilly | |
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Administration | |
Pays | Canada |
Province | Québec |
Région | Centre-du-Québec |
Municipalité | Bécancour |
Coordonnées | |
Opérateur | Hydro-Québec |
Année de construction | novembre 1973 |
Date de mise en service | 1er octobre 1983 |
Statut | En fonction |
Réacteurs | |
Fournisseurs | EACL |
Type | CANDU-6 |
Réacteurs actifs | 635 MW |
Production d'électricité | |
Puissance nominale | 635 MW |
Électricité générée annuelle | 3 648 GWh (2008) |
Électricité moyenne | 4 378 GWh |
Production totale | 110 165 GWh |
Divers | |
Source froide | Fleuve Saint-Laurent |
Site internet | Centrale nucléaire de Gentilly-2 |
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La centrale nucléaire de Gentilly est une centrale nucléaire d'Hydro-Québec située à Bécancour au Québec. La centrale, située sur la rive sud du fleuve Saint-Laurent, à la hauteur de Trois-Rivières possède une capacité de 675 MW. Elle est la seule centrale nucléaire en opération au Québec.
Le développement d'une centrale nucléaire au Québec a fait l'objet d'un débat passionné dans les années 1960 et au début des années 1970 entre les partisans de cette forme d'énergie et ceux qui favorisaient la construction de grands projets hydroélectriques pour répondre à la très forte croissance des besoins.
Au lendemain de la deuxième étape de la nationalisation de l'électricité en 1963, un lobby favorisant le développement de l'énergie nucléaire est actif à l'intérieur d'Hydro-Québec. En cela, ils rejoignent les objectifs du gouvernement du Canada, qui s'inquiète de la signification politique et symbolique de la prise de contrôle de l'électricité par la majorité francophone aux dépens du monde des affaires anglo-protestant. Le gouvernement de Lester B. Pearson à Ottawa redouble d'efforts afin de « partager les bénéfices du Canada avec les citoyens francophones du pays ».
Ces partisans du nucléaire au sein de l'entreprise peuvent compter sur le soutien de Jean-Claude Lessard, ancien haut-fonctionnaire fédéral et président d'Hydro-Québec de 1960 à 1969. M. Lessard est d'ailleurs nommé membre du conseil d'administration d'Énergie atomique du Canada (EACL), à compter de 1963, ce qui marquait un changement de cap majeur pour Hydro-Québec, qui boycottait l'entreprise nucléaire fédérale depuis 1954. La faction pro-nucléaire s'exprime au moment de la décision d'investir dans le projet de la chute Churchill, au Labrador, où les coûts prévus du développement nucléaire servaient d'étalon pour évaluer la faisabilité et la désirabilité de développer de nouveaux aménagements hydroélectriques. L'économiste et haut-fonctionnaire Jacques Parizeau est l'un des principaux tenants de cet argument.
Hydro-Québec engage les discussions au cours de l'été 1964 et Énergie atomique du Canada Limitée (EACL) étudie la possibilité de construire un réacteur de 250 MW, version augmentée du réacteur expérimental de Douglas Point, en Ontario. La société fédérale pose comme condition à l'aide financière d'Ottawa que le réacteur soit d'un type expérimental. Le président d'EACL, Lorne Gray, propose alors à l'entreprise publique québécoise un réacteur à eau naturelle bouillante, qui offrait plusieurs avantages, notamment le fait que la vapeur produite par le réacteur peut être utilisée par les turbines.
Avant de s'engager plus avant, le gouvernement Lesage pose certaines conditions. Dans une lettre adressée au premier ministre Pearson le 6 avril 1965, Lesage propose un site à Saint-Édouard-de-Gentilly — aujourd'hui un secteur de Bécancour. Québec demande aussi à obtenir qu'Ottawa défraie une partie des coûts de construction de la centrale, comme ce fut le cas lors de la construction du réacteur de Douglas Point. Le cabinet québécois approuve le projet en février 1966, quelques mois avant de subir la défaite lors de l'élection générale.
Le nouveau gouvernement de Daniel Johnson poursuit la même politique à l'égard du développement nucléaire et les travaux de construction peuvent commencer sur le site à compter de l'automne 1966. Malgré les conflits de travail qui stoppent les travaux pendant cinq mois, le réacteur CANDU-BLW de la centrale Gentilly-1 a été mis en service en novembre 1970.
Dès le départ, la centrale connaît sa part de problèmes. D'abord, une pénurie d'eau lourde retarde la mise en marche de la centrale de 266 mégawatts, les approvisionnements d'eau lourde étant destinés en priorité aux réacteurs de Pickering. Par ailleurs, Gentilly-1 est affligé de plusieurs problèmes techniques et ne produit de l'électricité que pendant deux brèves périodes, totalisant 183 jours, en 1972 pour une production totale de 837,7 GWh. La centrale, qui demeure la propriété d'EACL, a été mise en état de conservation en 1980 en vue de son démantèlement éventuel.
Au début des années 1970, les nouveaux grands patrons d'Hydro-Québec — dont le président Roland Giroux et les commissaires Yvon De Guise et Robert A. Boyd — sont solidement derrière le projet de développement du complexe hydroélectrique de la Baie-James, dans le Nord-du-Québec. Le financier Giroux soutient que les bailleurs de fonds internationaux « sont encore très méfiants vis-à-vis du nucléaire. Si on leur apporte un bon projet hydroélectrique, et celui de la Baie-James en est un, ils vont vite montrer où va leur préférence. » L'ingénieur Boyd invoque l'incertitude qui plane déjà à cette époque sur l'énergie nucléaire, recommande de maintenir une certaine expertise dans ce domaine mais soutient qu'il faut « repousser cette échéance le plus loin possible. »
Sceptiques par rapport à la stratégie de développement hydroélectrique intensif proposée par le premier ministre, plusieurs porte-paroles du Parti québécois, notamment le député Guy Joron et le conseiller économique du parti, Jacques Parizeau, n'hésitent pas à indiquer clairement leur préférence à l'égard de l'option nucléaire. Dans une entrevue qu'il accorde au Devoir à l'époque, l'économiste, qui deviendra premier ministre du Québec dans les années 1990, se fait ironique. « Ce n'est pas parce qu'il y a une rivière canadienne-française et catholique qu'il faut absolument mettre un barrage dessus. »
Le gouvernement Bourassa choisit de construire la centrale nucléaire, sans pour autant délaisser l'aménagement de la rivière La Grande. Gentilly-2, un réacteur CANDU-6 de 675 mégawatts, sera construit sur le même site que Gentilly-I, à compter de 1973. Mais les circonstances changent au cours de la construction, les coûts augmentent et l'opposition du public au développement de l'énergie nucléaire s'organise. Élu en novembre 1976, le gouvernement du Parti québécois publie un livre blanc sur l'énergie au printemps de 1978, qui revoit les estimations de croissance de la demande électrique à la baisse, écarte la construction d'une éventuelle centrale Gentilly-3, tout en indiquant une préférence à l'égard de la poursuite du développement hydroélectrique. La nouvelle politique du gouvernement québécois n'arrête toutefois pas la construction de la centrale de Gentilly-2.