Claude Cahen - Définition

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Hommages à Claude Cahen

  •  La revue Arabica, à l'initiative de Mohammed Arkoun et sous la direction de Abdallah Cheikh-Moussa, lui a rendu hommage dans son n°43 (numéro spécial, lectures critiques, en collaboration avec D. Gazagnadou et F. Micheau, 1996).
  •  Le chapitre III du livre Humanisme et Islam : Combats et propositions de Mohammed Arkoun, intitulé Transgresser, déplacer, dépasser : histoire générale et histoire de la pensée, qui constitue une analyse détaillée de son apport, est écrit en hommage à Claude Cahen.
  •  La revue Res Orientales a consacré son numéro VI, Itinéraires d'Orient. Hommages à Claude Cahen, Raoul Curiel et Rika Gyselen (éd.), à Claude Cahen (1994).

Pensée

Claude Cahen et la science historique

Mohammed Arkoun, dont il fut le maître et l'ami, voit en Claude Cahen le fondateur de l'école historienne en France dans le domaine arabe et plus généralement islamique. Il fut, dans ce domaine, le premier historien reconnu comme tel par ses pairs occidentaux, le premier « à avoir imposé, en tout cas en France, une histoire de l'« Orient » intégrable par ses thèmes, ses contenus, ses méthodes ses ambitions cognitives à celle de « l'Occident ». Il parvint à faire créer, dans la Sorbonne d'avant 1968, une chaire d'histoire de « l'Orient », dont il est nommé professeur, qui disparaîtra à sa retraite, n'étant rétablie qu'en 1999.

Claude Cahen travaille tout d'abord sur le régime féodal de l'Italie Normande et sur la Syrie du Nord au temps des Croisades. Après la guerre, il continue à travailler sur le thème des Croisades, mais, sur l'histoire de l'Islam, il concentre ses recherches sur l'histoire économique. En août 1954, il présente à Cambridge, au Congrès des orientalistes, un véritable article-manifeste intitulé L'histoire économique et sociale de l'Orient musulman médiéval, dans lequel il met en cause la notion même d'orientalisme :

« ...le milieu orientaliste dans son ensemble [...] se ressent d'une insuffisance de préparation historienne [...] ; d'autre part, la séparation d'origine entre orientalisme et historiens a fait que l'histoire orientale et l'histoire occidentale ont marché chacune de leur côté, que les méthodes de la seconde ont imparfaitement pénétré la première [...] »

Claude Cahen énumère alors une impressionnante liste de piste de recherches qui créent, dans cet auditoire d'orientalistes classiques, la stupéfaction. Par la suite, il est amené à écrire, dans L'histoire générale des Civilisations, les chapitres sur l'Islam et plusieurs chapitres sur l'histoire des croisades. Il s'intéresse au commerce maritime dans l'Égypte médiévale, à l'économie et aux finances dans cette même Égypte. Il écrit également sur les mouvements populaires et l'autonomisme urbain dans l'Asie musulmane du Moyen Âge, et, plus généralement, sur l'histoire de l'Orient musulman et sur les peuples musulmans dans l'histoire médiévale.

Claude Cahen a signé, chez Brill Academic Publishers, plusieurs articles de l'Encyclopédie de l'Islam et de la revue Arabica. Il a été rédacteur au Journal of the Social and Economic History of the Orient.

Claude Cahen et la politique

Ce n'est pas en tant que militant politique que Claude Cahen adhère au Parti communiste, on le voit dans un article publié dans les Annales, où il écrit : « Le matérialisme marxiste est un matérialisme scientifique, c'est-à-dire que pour atteindre un but qui est le développement de l'homme, il se pose la question de la méthode qui doit permettre de se rapprocher réellement de ce but, et constate que cette méthode, dans la connaissance comme dans l'action, doit prendre appui sur la matière. »

C'est dans le soutien à la pédagogie Freinet (Célestin Freinet avait rejoint le maquis du Briançonnais dont il était devenu le principal chef) que Claude Cahen prend, pour la première fois, publiquement position au sein du Parti communiste : il s'oppose sur ce sujet à Georges Snyders, qui condamne toute la "pédagogie moderne", à Roger Garaudy et à Georges Cogniot. Étant donné l'ampleur du débat, la revue la "Nouvelle critique" accepte de publier, parmi quelques contributions d'instituteurs communistes membres du mouvement Freinet, une longue lettre signée P. Cahen (il s'agit de Pauline Cahen). Après trois ans d'attaques contre lui, Freinet ne reprit pas sa carte, ce qui ne stoppa pas les attaques d'Etienne Fajon contre lui (et, au passage, contre "Mme Cahen de Strasbourg").

Au début de 1956, à propos de l'affaire Pierre Hervé, Claude Cahen commence à ressentir l'impression qu'on ne répond pas aux arguments de l'accusé et qu'il existe une « impossibilité à se faire entendre, notamment à cause des fonctionnaires de l'appareil ».

Au sein du Parti communiste, Claude Cahen participe en 1957 au "Groupe de travail des historiens communistes", puis à des actions et à divers mouvements intellectuels ( Cellule Sorbonne-Lettres et "Voies Nouvelles"), il rédige un texte intitulé "L'intellectuel et la solidarité de Parti".

Ayant quitté le Parti communiste, il signe, en 1963, l'appel du bulletin oppositionnel Unir-Débat pour la réhabilitation d'André Marty.

Il éprouve une réelle sympathie pour le groupe de réflexion intellectuelle Socialisme et Barbarie, animé par Cornelius Castoriadis (actif de 1949 à 1967).

Il participe au GRAPP (Groupe de recherche pour le règlement du problème palestinien), créé par Maxime Rodinson et Jacques Berque (Paris 1967–1973).

Il signe un appel attirant l'attention sur les dégâts scientifiques de la guerre d'Irak puis condamne, par avance, l'opération médiatisée "Tempête du désert" :

« Nous voici donc devant la sale guerre où nous ont entraîné les Américains, derrière le voile verbal des Nations Unies. Par orgueil, ils se sont trompés et nous ont trompé. [...] Ce qui, par contre, est certain est que nous aurons perdu pour longtemps l'amitié des peuples arabes auxquels nous liaient tant d'intérêts scientifiques et culturels [...] »

Pratiquement aveugle, il signe en 1991 une pétition pour la libération de l'Israélien Michel Warschawski, dirigeant du « Comité d'information sur la Palestine », qui venait d'être arrêté en Israël.

Claude Cahen et la société

Bien que le noyau historique de la famille Cahen réside dans les vieilles communautés juives autour de Metz (Lorraine), Claude Cahen, athée convaincu, refuse de ce fait tout lien spécifique avec la communauté juive française. Michel Cahen écrit : «...mais le nom définit-il la personne? Pour mon père en tout cas, la réponse était catégoriquement négative. Il refusa même systématiquement l'appellation "intellectuel d'origine juive" car si l'origine était certaine, elle était pour lui si lointaine qu'elle n'était plus pertinente pour le définir. »

C'est à ses étudiants que Claude Cahen consacre ses contacts : ils semblent avoir gardé de leur « prof » — « un grand prof » — un vif souvenir pour sa rigueur, son exigence, sa gentillesse son humour.

Sa vue ayant trop baissé pour continuer à travailler, Claude Cahen donne sa bibliothèque scientifique au Collège de France, où son fond rejoint ceux de Sauvaget, Laoust, Berque et Massignon (2000 livres orientaux, 1000 exemplaires de revues pour 20 grands titres, 3365 tirés à part, 80 thèses, 475 livres hors monde arabo-musulman, 60 actes de colloques). La photo ci-dessus, qui date d'une époque où Claude Cahen est déjà très diminué physiquement mais toujours pleinement maître de ses capacités intellectuelles, le montre fier de son travail accompli et partageant une forte complicité avec son épouse Pauline.

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