Fonction zêta de Riemann - Définition

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Valeurs de la fonction zêta pour s entier supérieur à 1

Euler a calculé (dans le cadre de sa solution au problème de Bâle) la valeur de la fonction \zeta\, pour les entiers positifs pairs en utilisant l'expression de \sin x\over x sous forme de produit infini ; il en a déduit la formule :

 \zeta(2k)=\sum_{n=1}^{\infty}\frac1{n^{2k}} \ = \ \frac{|B_{2k}| \ (2\pi)^{2k}} {2 \, (2k)!}

valable pour tout entier positif k, où les B2k sont les nombres de Bernoulli. De là, nous obtenons des séries infinies correspondant aux puissances paires de π :

\zeta(2) = \frac{\pi^2}{6} \quad ;  \quad \zeta(4) = \frac{\pi^4}{90} \quad ; \quad \zeta(6) = \frac{\pi^6}{945}\quad ; \quad \zeta(8) = \frac{\pi^8}{9450} \quad ; \quad \dots

Pour les entiers impairs, le calcul n'est pas si simple. Ramanujan a beaucoup travaillé sur ces séries et Apéry a démontré en 1979 que ζ(3), qui vaut environ 1,2020569... est irrationnel (voir constante d'Apéry). En 2000, Tanguy Rivoal a démontré qu'il existe une infinité de nombres irrationnels parmi les valeurs aux entiers impairs. On conjecture que toutes les valeurs aux entiers impairs sont irrationnelles et même transcendantes.

Définition par la série de Dirichlet

La fonction zêta de Riemann pour les réels s > 1

La fonction \zeta\, de Riemann est une fonction analytique complexe méromorphe et définie, pour \Re(s)>1, par la série de Dirichlet

\zeta(s)=\sum_{n=1}^\infty{\frac1{n^s}} .

La série ne converge pas en s = 1 : on a

\sum_{k=1}^{k=m}\frac1{k}\ge \int_1^{m+1} \frac{\mathrm{d}u}{u}= \ln (m+1)\,\!

qui tend vers l'infini avec m (voir l'article détaillé série harmonique pour d'autres démonstrations de ce résultat, et une estimation plus précise de la valeur des sommes partielles). La valeur s = 1 est donc une singularité de la fonction.

À partir de la série de Dirichlet de \zeta\, on démontre les formules suivantes :

\frac{1}{\zeta(s)}=\sum_{n=1}^{\infty} \frac{\mu(n)}{n^s}

μ est la fonction de Möbius,

\frac{\zeta(s-1)}{\zeta(s)}=\sum_{n=1}^{\infty}  \frac{\varphi(n)}{n^s}

\varphi est l'indicatrice d'Euler, et

\zeta(s) \zeta(s-a)=\sum_{n=1}^{\infty} \frac{\sigma_{a}(n)}{n^s}
\frac{\zeta(s)\zeta(s-a)\zeta(s-b)\zeta(s-a-b)}{\zeta(2s-a-b)} =\sum_{n=1}^{\infty} \frac{\sigma_a(n)\sigma_b(n)}{n^s}

σa est la fonction diviseur à la puissance a :

\sigma_a(n)= \sum_{d |n} d^a\,\!

Extension à ℂ-{1}

La fonction \zeta\, admet un prolongement analytique à tout le plan complexe, sauf 1. Il existe plusieurs démonstrations, faisant appel à différentes représentations de la fonction \zeta\, .

Par la formule d'Euler-Mac Laurin

La formule d'Euler-MacLaurin, appliquée à la fonction x \mapsto x^{-s} sur l'intervalle [1 ; N], donne pour tout entier n :

\sum_{r=1}^N r^{-s}={{1-N^{1-s}}\over {s-1}}+{{1+N^{-s}}\over {2}}+\sum_{k=2}^nB_k\frac{s(s+1)...(s+k-2)}{k!}(1-N^{-s-k+1}) -R_{n, N}(s),

où les coefficients Bk sont les nombres de Bernoulli,

R_{n, N}(s)={1\over {n!}}s(s+1)...(s+n-1)\int_1^N B_n(x-[x])x^{-s-n}\mathrm dx,\,\!

où les Bn(x) sont les polynômes de Bernoulli et où [x] désigne la partie entière de x.

En faisant tendre N vers l'infini et en restant dans le demi-plan \Re(s)>1, on en déduit pour tout entier n=1, 2, 3\ldots que

\zeta(s)={{1}\over {s-1}}+{1\over {2}}+\sum_{k=2}^nB_k\frac{s(s+1)...(s+k-2)}{k!}  -\frac{s(s+1)...(s+n-1)}{n!}\int_1^\infty B_n(x-[x])x^{-s-n}\mathrm dx.\,\!

Les fonctions x \mapsto B_n(x-[x]) étant périodiques restent bornées sur l'intervalle d'intégration, donc l'intégrale à droite converge si \Re(s)>1-n. Donc le membre de droite définit une fonction, \zeta_n\, sur \Re(s)>1-n, holomorphe en dehors de 1, qui prolonge \zeta\, . L'unicité du prolongement analytique montre que les fonctions \zeta_n\, et sur \zeta_{n+1}\, sont identiques sur \Re(s)>1-n. Ces identités permettent donc de définir une unique fonction méromorphe sur tout le plan complexe (avec un seul pôle en 1), coïncidant avec la fonction \zeta\, déjà définie pour \Re(s)>1 et qu'on appelle encore \zeta\, .

Par une intégrale de contour

La fonction \zeta(s)\, se prolonge aussi analytiquement par l'intégrale

\zeta(s)=\frac{e^{-i\pi s}\Gamma(1-s)}{2i\pi}\oint_C{\frac{u^{s-1}}{e^u-1}\mathrm du}.

C désigne un lacet longeant l'axe réel et englobant 0 parcouru de +∞ à +∞ dans le sens trigonométrique.

Une fois cette formule démontrée initialement pour \Re(s)>1, l'expression à droite restant valable pour tout valeur bornée de s définit donc une fonction analytique. D'après le théorème du prolongement analytique, elle représente le prolongement (sauf en s = 1) de la fonction \zeta\, .

Par la formule sommatoire d'Abel

Cette formule conduit à l'expression

 \zeta(s)=\frac{s}{s-1}-s\int_1^\infty{\frac{\{u\}}{u^{1+s}}\mathrm du},\,\!

{u} désigne la partie fractionnaire de u. Comme {u} est toujours compris entre 0 et 1, l'intégrale est convergente pour \Re(s)>0.

Par la fonction êta de Dirichlet

On peut encore étendre la fonction \zeta\, sur \Re(s)>0 à partir de la définition de la série alternée (appelée fonction êta de Dirichlet)

\eta(s)=\sum_{n=1}^\infty{\frac{(-1)^{n-1}}{n^s}}=(1-2^{1-s})\zeta(s)

Cette série est convergente pour s réel strictement positif, par application du critère des séries alternées ; il en est en fait de même pour \Re(s)>0, ce qui se démontre en utilisant le lemme d'Abel. Cela réalise ainsi le prolongement de la fonction \zeta\, sur \Re(s)>0. Le pôle en 1 de \zeta\, est annulé par le terme (1 − 21 − s) ; on a η(1) = ln2. À partir du prolongement pour \Re(s)>0 et en appliquant la relation fonctionnelle (voir plus loin), on obtient le prolongement partout sauf en 1 + 2ikπ / ln(2) ( k \in \mathbb{Z} ) qui sont les zéros de 1 − 21 − s.

Pour ces points, on peut appliquer soit la série de Dirichlet de 1/\zeta\, , qui converge sur \Re{e}(s)=1 soit une autre relation du même genre.

De ce que 0<\frac{1}{3n-2}+\frac{1}{3n-1}-\frac{2}{3n}=\frac{1}{3n^2}+O(1/n^3) , on déduit que la série

(1-3^{1-s})\zeta(s)=\sum_{n=1}^\infty{\left(\frac{1}{(3n-2)^s}+\frac{1}{(3n-1)^s}-\frac{2}{(3n)^s}\right)}

est convergente pour \Re{e}(s)=1 . Il suffit donc de calculer la série seulement pour ces points car ln3 / ln2 se trouvant irrationnel, le facteur (1 − 31 − s) ne peut être nul en même temps que celui de (1 − 21 − s).

Par la formule de Landau ou celle de Ramaswami

Dans les formules précédentes, il est à remarquer que le prolongement ne s'obtient que dans une portion du plan et qu'il faut utiliser la relation fonctionnelle pour avoir un prolongement au plan tout entier. Les deux formules qui suivent n'ont pas ce défaut. Ces deux autres méthodes de prolongement de \zeta\, , sans conteste les plus simples, sont fondées, chacune, sur une formule exprimant \zeta(s)\, en fonction de \zeta(s+1)\, , \zeta(s+2)\, , ...

On a ainsi la formule publiée par Landau

\zeta(s)-\frac1{s-1}=1-s\frac{\zeta(s+1)-1}{2!}-s(s+1)\frac{\zeta(s+2)-1}{3!}-s(s+1)(s+2)\frac{\zeta(s+3)-1}{4!}-\ldots

 

\zeta(s)-\frac1{s-1}=1-\sum_{n=1}^\infty s^{\overline{n}}\,\frac{\zeta(s+n)-1}{(n+1)!}\!

s^{\overline{n}} étant la factorielle croissante.

Ou la formule de Ramaswami

(1-2^{1-s})\zeta(s)=\frac{s}{1!}\frac{\zeta(s+1)}{2^{s+1}}+\frac{s(s+1)}{2!}\frac{\zeta(s+2)}{2^{s+2}}+\frac{s(s+1)(s+2)}{3!}\frac{\zeta(s+3)}{2^{s+3}}+\ldots

Ces formules se démontrent par des manipulations classiques sur les termes des séries.

Le prolongement analytique s'effectue par bandes de largeur 1. La série de Dirichlet étant absolument convergente sur \Re(s)>1, la formule choisie prolonge sur \Re(s)>0. En appliquant à nouveau la formule, on prolonge à \Re(s)>-1, et ainsi de suite.

Remarque: la présence du facteur 1 − 21 − s dans la formule de Ramaswami montre que le prolongement de \zeta\, par cette formule souffre du même problème que celui par la fonction η de Dirichlet.

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