Hussard noir est le surnom donné aux instituteurs publics sous la IIIe République après le vote des lois scolaires dites « Lois Jules Ferry » et le vote de la Loi de séparation des Églises et de l'État en 1905.
Du fait de son étymologie hongroise « huszar », certains font référence à l'efficacité et au dévouement des terribles hussards hongrois dont le corps de cavalerie a été créé au XVe siècle en Hongrie.
Christian Bouyer, lui, écrit que « Péguy compare, avec son imagination enfantine, cet uniforme (des normaliens-ndlr) à celui du fameux cadre de Saumur » dont la couleur noire fut décidée sous le règne de Louis-Philippe pour ce corps des cavaliers d'élite français.
Enfin, la référence aux fameux Hussards Noirs, l'escadron de cavalerie constitué pendant la Révolution en 1793 par la jeune République française semble mieux correspondre au propos de Charles Péguy.
La comparaison par Charles Péguy des futurs instituteurs de son école primaire annexe avec « des hussards noirs » témoigne bien de la mission confiée par la République aux instituteurs mais aussi aux institutrices. Une mission fondamentale : assurer l'instruction obligatoire, gratuite et laïque de tous les garçons et de toutes les filles de France âgés de 6 ans révolus à 11 ans pour ceux admis au certificat d'études primaires ou à 13 ans pour les autres dans un cadre républicain et civique. Et cela afin de « faire disparaître la dernière, la plus redoutable des inégalités qui vient de la naissance, l'inégalité d'éducation » comme l'avait déclaré Jules Ferry dès 1870.
Mission que précise en ces termes l'historien Serge Issautier : « En 1879, avant le vote des lois laïques, [...] cet enseignement est prioritairement aux mains de l'Eglise et de ses congrégations. Et c'est à la « superstition » que les Républicains veulent arracher l'École. [...] Mais il faut les moyens. Ce sera les Écoles Normales car les Républicains ont pour objectif prioritaire l'enseignement primaire qui reçoit la masse des élèves. [...] Les Écoles normales remplissent pleinement leur mission : former des maîtres et maîtresses d'école pénétrés de la dignité de leur mission, dans un esprit de dévouement obscur, de sacrifices librement consentis dans le respect des hiérarchies et de l'ordre social. Les Républicains se servirent alors de cette infanterie enseignante pour, en quarante ans, démanteler l'Ecole catholique... » Mais démantèlement relatif car les associations (religieuses ou non) créées à cet effet eurent alors toute liberté pour créer et gérer légalement des écoles privées dites « libres ».
Véritables missionnaires laïcs d'une révolution par la loi du système éducatif français, la ressemblance méliorative du corps des instituteurs avec une armée dévouée et disciplinée au service de la République participe des raisons expliquant le succès de ce surnom de « hussards noirs » à connotation militaire.
De par cette mission autant que par leur statut de fonctionnaires (à partir de 1889) et donc de petits bourgeois (de la petite bourgeoisie d'État), les « hussards noirs » représentaient tant une des élites de la nouvelle république qu'une autorité morale, civique et intellectuelle certaine. C'est le cas dans La Gloire de mon père et La Fille du puisatier de Marcel Pagnol.
Le surnom a par la suite été repris de diverses manières, et l'on a pu dire les hussards de la sévérité, les hussards de la République ou les hussards noirs de la République tant pour les instituteurs de la IIIe République que pour ceux des IVe et Ve Républiques.
Mais trois questions se posent. Dans la société machiste de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, ce surnom guerrier et masculin n'a-t-il servi qu'à désigner les seuls instituteurs hommes à l'exclusion des institutrices dont la mission était pourtant identique ? Ou a-t-il servi pour désigner les deux composantes - masculine et féminine - de ce corps des instituteurs pilier de la République ?
En second lieu, ce surnom n'a-t-il été utilisé que pour les instituteurs de la IIIe République ? Ou également pour ceux de la IVe voire de la Ve République mais alors avec un sens différent compte-tenu de l'évolution de la société française ?
Et enfin, ce surnom n'a-t-il pas été utilisé de manière contradictoire ? Ou bien élogieuse comme le fit Charles Péguy, ou bien critique de la part des adversaires de l'école publique ?