L'une des principales caractéristiques des macaques est qu'ils ont, au cours de l'évolution, acquis la capacité à former des groupes sociaux pouvant compter jusqu'à plusieurs dizaines d'individus. Dans ces groupes, on trouve à la fois des mâles et des femelles adultes, des sub-adultes, des juvéniles et des petits de l'année. La vie collective est une réponse adaptative pour faire face aux milieux auxquels ils sont confrontés, qui leur permet, par exemple, d'être plus efficace dans la recherche alimentaire, de mieux se protéger des prédateurs ou de s'assurer la mainmise sur des ressources convoitées par d'autres groupes de la même espèce qui entrent en compétition. Toutefois, la vie sociale pose des problèmes cognitifs incomparablement plus complexes que ceux posés par le simple environnement physique où ils vivent.
Les macaques représentent le genre le plus géographiquement étalé et comportementalement diversifié de tous les genres de primates. Beaucoup de ces différences dans le comportement et l'organisation sociale ont été attribuées à des différences écologiques du milieu de vie. Cependant, certains aspects centraux du comportement social et de l'organisation apparaissent très conservés, suggérant un haut degré d'inertie phylogénétique.
Les macaques possèdent un vaste répertoire de gestes, cris et mimiques. Ils peuvent ainsi exprimer une émotion, annoncer leurs intentions pacifiques, inciter un compagnon à s'approcher, montrer de la soumission ou au contraire menacer un adversaire.
En entendant les cris d'un compagnon, les macaques peuvent reconnaître sa voix et comprendre où il est. Mais ils font encore plus. Lorsque l'un d'entre eux découvre de la nourriture, les autres savent s'il y a beaucoup de nourriture d'après ses cris d'excitation. Et quand ils entendent deux compagnons qui se disputent, ils comprennent par ses cris que celui qui proteste est en position de force ou bien qu'il appelle à l'aide.
Les macaques s'expriment par de nombreuses mimiques. Ce qui compte avant tout pour comprendre leurs expressions, ce sont les yeux et la bouche qui peuvent être plus ou moins ouverts. La coloration des paupières souligne parfois l'expression. Il faut aussi faire attention aux mouvements de la tête et des oreilles, et bien sûr aux cris qui souvent les accompagnent.
Certains signaux ne sont pas les mêmes dans toutes les espèces de macaques. Chez le macaque de Tonkean, le mâle dominant pousse un cri spécial. Chez la même espèce, la mimique avec découvrement des dents est une mimique qui annonce les intentions pacifiques de celui qui l'émet, c'est l'équivalent d'un sourire. Chez le macaque crabier et le macaque rhésus, la même mimique est au contraire un signal de soumission par lequel le dominé reconnaît qu’il est plus faible.
La vie en groupe implique à la fois coopération et compétition. Pour vivre ensemble, il faut être capable d'établir des relations avec ses compagnons, s'accorder sur le chemin à prendre, participer à l'élevage des jeunes ou venir à l'aide d'un compagnon en danger. Mais quand deux membres du groupe désirent la même nourriture ou le même compagnon, cela provoque des conflits et chacun doit savoir se défendre et négocier.
Les membres d'un groupe doivent avoir de bonnes relations. Ils se toilettent régulièrement les uns les autres pour rester propres et éliminer les parasites, mais aussi pour entretenir leurs relations sociales. On va toiletter un compagnon parce que c'est un parent, ou parce qu'il s'agit d'un allié puissant, ou encore pour obtenir une faveur, avoir la permission de toucher un bébé par exemple. Chez le macaque berbère, les grands mâles utilisent même les petits pour s'approcher et s'apaiser les uns des autres. Chez tous les macaques, le jeu est fréquent et il peut impliquer les adultes.
Lorsqu’une dispute survient, on crie beaucoup mais on évite généralement de se mordre. Les entraides sont fréquentes : deux compagnons s'associent pour en attaquer un troisième, les disputes deviennent vite assez compliquées. Une soumission ou un apaisement termine généralement le conflit. Il est important de maintenir les relations sociales malgré les désaccords et il n'est pas rare que les adversaires se réconcilient par une étreinte ou un toilettage. Dans certaines espèces, un individu peut arrêter la dispute en apaisant l'agresseur.
Pour que le comportement de chacun soit prévisible, les macaques suivent des règles qui respectent les rapports de force, c'est ce qu'on appelle les relations de dominance-subordination. On reconnaît les individus dominants à leur démarche assurée, ils ont la priorité dans les situations de compétition, par exemple lorsqu'il s'agit de s'alimenter. Quand un dominé rencontre un dominant, il s'écarte devant lui et fait preuve de soumission pour éviter une agression.
Attention, il ne suffit pas d'être le plus fort pour être dominant. Il faut aussi avoir des alliés prêts à vous soutenir dans les disputes. La fille d'une femelle dominante sera également dominante, elle vient juste après sa mère. Et un grand mâle qui n'a pas d'alliés restera très bas dans la hiérarchie. Les liens de parenté sont importants dans la vie des macaques. Comme ils ne connaissent pas leur père, c'est la parenté par la mère qui compte. On s'entraide entre mères, filles, fils, sœurs et frères, grand-mères et petits-enfants, on se toilette souvent, on forme des coalitions, le résultat est la formation de puissants clans d'individus apparentés. Il y des clans dominants et des clans dominés. Le rang de dominance d'un individu dépend de son clan de naissance, il vaut mieux être bien né...
Les femelles restent toute leur vie dans leur groupe natal. Le destin des mâles est bien différent. La plupart d'entre eux quittent leur groupe d'origine vers quatre à sept ans, rompant tous leurs liens familiaux. On pense qu'ils agissent ainsi pour rencontrer d'autres femelles et s'accoupler avec elles. En effet, en matière sexuelle on préfère l'étranger au familier, c'est nécessaire pour éviter de se reproduire avec son frère ou sa sœur.
Les mâles qui émigrent peuvent rester seuls quelque temps, mais la vie solitaire est dangereuse. Personne n'est là pour vous aider et les prédateurs rodent... Souvent les jeunes mâles s'associent pour former de petits groupes de célibataires qui voyagent ensemble. Quand ils aperçoivent des femelles en chaleur dans un groupe, ils tentent de les attirer vers eux. Toute l'affaire est de s'accoupler sans que les mâles dominants du groupe ne s'en rendent compte. Heureusement pour les jeunes étrangers, les arbres sont nombreux dans la forêt et la végétation souvent épaisse, les grands mâles ne peuvent pas tout surveiller.
Mais il vient un temps où le mâle décide d'entrer dans un groupe et de s'y installer. Il peut choisir entre deux stratégies. Il peut défier le mâle dominant du groupe et l'obliger à se soumettre, c'est une tactique dangereuse car les combats peuvent entraîner de graves blessures. Seuls les mâles entre dix et quinze ans choisissent cette solution car ils sont les plus forts. Les mâles plus jeunes doivent employer une autre stratégie. Il leur faut se montrer prudent et entrer dans le bas de la hiérarchie. Ils observent et apprennent à reconnaître les relations qui unissent les différents membres du groupe, ils se font des alliés en soutenant l'un ou l'autre dans les conflits. Avec les années, ils gagnent en force et en expérience, ils deviennent des mâles dominants.
Dans les régions tempérées, toutes les femelles viennent en chaleur en même temps à la saison de reproduction. Aucun mâle ne peut monopoliser toutes les femelles et celles-ci peuvent faire des choix, refuser certains mâles et en préférer d'autres. Par conséquent, même les mâles dominés peuvent se reproduire, à condition de rester discrets...
Rappelons-nous que les femelles préfèrent les mâles non familiers, c’est-à-dire ceux qu'elles ne connaissent pas. Alors, à quoi sert-il donc d'être un mâle dominant, installé dans un groupe depuis plusieurs années ? Ne vaut-il pas mieux émigrer et partir à la conquête de femelles inconnues ? C'est précisément ce que font les mâles. Une majorité d'entre eux va partir à nouveau après quelques années passées dans un groupe, ils vont connaître une nouvelle période solitaire, entrer dans un nouveau groupe… C'est ainsi qu'un mâle peut changer de groupe plusieurs fois dans sa vie.