La Terre fut longtemps considéré comme étant sphérique, tout d'abord par Parménide (v. 515-450 av. J.-C.) essentiellement pour des raisons esthétiques et géométriques, puis par Platon (v. 428-348 av. J.-C.) pour qui la forme des éclipses de Lune montre que l'ombre projetée de la Terre est toujours circulaire. Cette idée de Terre sphérique sera peu à peu remplacé par l'idée que la terre présente une forme ellipsoïdal.
Les premières indications que la Terre dans son ensemble est légèrement ellipsoïdale, sont à la fois de nature empirique et de nature théorique. Ainsi, Jean-Dominique Cassini avait observé dès 1666 que Jupiter était fortement aplatie. Cette découverte avait aussi été faite en Angleterre par John Flamsteed. L'aplatissement en cause vaut environ 1/15. Il était tentant de mettre ce fait en rapport avec la rotation rapide de Jupiter sur lui-même en un peu moins de 10 heures. Il en allait de même pour Saturne. Par analogie, il était naturel de penser que la Terre elle-même fût quelque peu aplatie.
D'autre part, l'observation de Jean Richer montrant que la longueur du pendule qui battait la seconde était plus grande à Paris qu'à Cayenne fut connue de Newton et de Huyghens, et suscita leur réflexion. Huyghens en déduisit dans son « Discours sur la cause de la pesanteur », paru en 1690, que la Terre est un corps de révolution aplati et, compte tenu de la force centrifuge dont il avait fait lui-même la théorie, il trouve un aplatissement de 1/576.
Newton considère dans les « Principia » une Terre fluide dont la masse volumique est constante du centre à la surface, valant environ 5,5 fois celle de l'eau, tournant sur elle-même en 24 heures. Il trouve que dans ces circonstances, l'aplatissement des surfaces de niveau internes est lui-même constant du centre à la surface et vaut 1/230, à peu de chose près.
Le résultat de Richer s'interprète en notant que sur l'ellipsoïde, la pesanteur g n'est pas constante : pour un ellipsoïde aplati aux pôles, où un point de la surface situé à une latitude plus élevée se trouve plus près du centre de masse qu'un tel point situé à une latitude moins élevée, elle est plus grande aux pôles qu'à l'équateur. Sachant que la période propre d'un pendule simple vaut 2π (ℓ/g)1/2, où ℓ est la longueur du pendule, et que g possède une valeur supérieure à Paris qu'à Cayenne, on comprend que Richer ait dû raccourcir la longueur de son pendule près de l'équateur pour qu'il batte au même rythme qu'à Paris.
Il convient de noter que l'idée d'une Terre aplatie était en rupture complète avec les idées philosophiques traditionnelles héritées des Anciens. En effet, selon les auteurs comme Pythagore, Platon, Aristote, Ptolémée et leur disciples, la Terre devait nécessairement être une sphère, puisque la Terre érigée en divinité cosmique devait être parfaite, et que la sphère est le corps solide «parfait» par excellence. C'est sans aucun doute l'œuvre de Kepler, qui avait osé remplacer les orbites planétaires circulaires par des ellipses, qui fut à l'origine de l'évolution des idées conduisant finalement à ce changement radical des conceptions philosophiques.
Les « Principia » connaîtront plusieurs éditions au cours des décennies suivantes et exerceront une très grande influence sur la Science et la Philosophie. Au fur et à mesure de la parution de ces nouvelles éditions, l'ouvrage fut complété et mis à jour.
En 1683, donc un peu avant la parution de la première édition des « Principia », la méridienne de Picard entre Sourdon et Malvoisine commençait à être prolongée sous la direction de Jean-Dominique Cassini, vers le nord par La Hire, disciple de Picard, et vers le sud par Cassini lui-même. La méridienne de Cassini a joué un rôle historique suffisamment important pour qu'il soit utile de fournir quelques détails à son sujet. Les travaux furent interrompus dès la fin de l'année à cause de la mort de Colbert et son remplacement comme protecteur de l'Académie et surintendant des bâtiments du Roi par Louvois. Ce dernier avait d'autres priorités. La Hire était parvenu à Béthune, et Cassini à Bourges.