Le monastère de Prouille fut fondé en 1206 par Saint Dominique, dans le village languedocien de Prouille (actuelle commune de Fanjeaux, près de Montréal, dans l’Aude).
Première fondation de Saint Dominique, le monastère de Prouille constitue le berceau de l'ordre des dominicains, dit aussi « des Frères prêcheurs ». Il joua un rôle majeur dans la défense active de la doctrine catholique au Moyen-âge et constitue, à ce titre, l'un des plus importants monastères royaux de l'Ancien Régime. Comme l'abbaye royale de Fontevrault, il abritait, suivant la volonté de son fondateur, une double communauté d'hommes et de femmes qui avait à leur tête un prieur et une prieure.
Tout commence lorsque Saint Dominique, originaire d'Espagne, entame ses prédications dans le pays cathare et décide pour cela de se fixer dans la ville proche de Fanjeaux. Il a en 1208 une apparition de la Vierge Marie qui se présente sous le vocable de Notre-Dame du Rosaire et qui lui tend un chapelet. les dominicains seront d'ardents propagateurs du rosaire. Prouille devient le symbole du rayonnement spirituel et politique de la chrétienté de Rome et sert de refuge pour les femmes cathares converties.
L'idéal apostolique des sœurs dominicaines du monastère de Prouille nécessite tout d'abord la séparation du monde extérieur par une vie austère, faite de jeûnes, de veilles, de pénitences, à laquelle les cathares reconverties par Saint Dominique étaient toutes préparées, de par le fait que ce mouvement revendiquait et s'astreignait à ce même mode de vie. La communauté de femmes vivant dans ce monastère vivait selon la règle de Saint Augustin et était ainsi régie par la vita apostolica. Il faut savoir que le monastère est situé en plein territoire cathare. En effet, Prouille se situe à 28 kilomètres à l'ouest de Carcassonne qui constituait au tout début du XIIIe siècle l'un des plus puissants bastions du catharisme.
Ainsi, les femmes restaient cloîtrées dans le monastère et n'étaient pas autorisées à prêcher. Les religieuses occupant le monastère de Prouille n'allaient donc pas à l'extérieur, elles se devaient de rester dans l'enceinte du monastère et s'occuper d'accueillir les cathares repenties qui avaient été reconverties par Saint Dominique et ses frères.
La fondation de la communauté féminine de Prouille restera pendant longtemps la plus nombreuse des communautés de femmes de tout le Languedoc. À l'origine, en 1207, 12 sœurs occupaient le monastère, puis 20 en 1211. Diègue d'Osma et Dominique sont étroitement solidaires lors de la fondation du monastère. L'évêque a l'autorité principale et avant de devoir retourner à son diocèse en Espagne, il prend le soin de confier à Dominique la direction et la charge spirituelle de tout le personnel de Prouille. La communauté naît près de l'église Sainte-Marie et fait initialement partie d'un ensemble lié à la prédication de la Narbonnaise. Le monastère de Prouille, de par la présence quasi exclusive des cisterciens dans la région, se trouve donc fortement influencé par le courant cistercien des abbayes de femmes issues de Fabas, de Fontfroide et de Boulbonne. À la mort de Diègue en décembre 1207, Dominique porte la responsabilité principale de Prouille. Très occupé jusqu'en 1209 à prêcher en Lauragais, engagé par l'évêque Foulque après le concile d'Avignon de septembre 1209, dans une longue campagne de prédication à Toulouse, il ne sera libre de s'occuper vraiment de ses sœurs qu'à partir de mai 1211. Dès ce moment, il regagne ses sœurs et s'occupe, avec une efficacité certaine, à constituer le patrimoine et les bâtiments de la communauté. Un grand nombre de chartes de donation manifestent d'ailleurs sa réussite.
Lors des prédications, Dominique se déplace toujours nus pieds en signe d'humilité et de pénitence. De plus, il reste continuellement fidèle à la pratique des apôtres itinérants, à savoir qu'il ne part jamais avec de l'argent, de l'or ou quelque autre richesse que ce soit. En outre, les prédicateurs n'ont pas d'autre moyen d'existence que l'hospitalité et la mendicité. En effet, St Dominique demande souvent l'hospitalité à des nobles cathares par exemple. Il en profite ainsi pour tenter de les convertir à la foi chrétienne au cours d'une discussion. D'autre part, il trouve une hospitalité plus fondamentale à Prouille. Ce centre sert de port d'attache aux prédicateurs et en particulier à St Dominique. Toute la journée est consacrée à la prédication et le soir, les prêcheurs viennent se nourrir et se reposer dans ce lieu d'hébergement.
Dans la nuit du 4 au 5 mars 1715, les bâtiments médiévaux sont ravagés par un violent incendie. Le monastère est à reconstruire. En septembre 1734, Louis XV charge Mgr Daniel-Bertrand de Langle, évêque de Saint-Papoul, de cette reconstruction. Du fait des difficultés budgétaires de la communauté, celle-ci traîne jusqu'aux années 1740. En 1746, l'évêque et la maîtrise chargés de la reconstruction soumettent leur projet au ministre en charge des provinces du Haut et Bas-Languedoc, Louis Phélyppeaux de La Vrillière, comte de Saint-Florentin. Ministre de la Maison du roi et grand ami de Louis XV, Saint-Florentin sollicite l'avis de son architecte favori, Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne (1711-1778), dernier des Mansart et petit-fils de Jules Hardouin-Mansart. Mansart est très en vue à la cour de Versailles depuis que le roi lui a confié la construction de l'église Saint-Louis de la ville en 1742, grâce à Saint-Florentin. Par arrêt du conseil du 21 mai 1746, Mansart de Sagonne est officiellement chargé de la reconstruction du monastère. Il s'agit là de sa seconde grande réalisation royale après Saint-Louis de Versailles. Suivant cet arrêt, le roi affecte pour le financement du projet, le produit de l'exploitation de la belle forêt de Ramondens voisine.
Pour établir son projet, Mansart se rend à Prouille en janvier 1747, conformément aux ordres du roi. Il laisse ses instructions à son inspecteur, Jean-Charles Damesme de Furcy, arrivé en octobre 1746. Malheureusement, ce jeune homme peu expérimenté dépense des sommes folles sans parvenir à faire avancer les travaux. Devant les plaintes de la prieure, Mme de Bellegarde, Damesme est démis en mars 1751 et Mansart, en novembre 1753, malgré les temporisations de Saint-Florentin. L'architecte reçoit 1000 écus d'indemnité pour son éviction. Seul le rez-de-chaussée d'une des ailes du bâtiment est alors réalisé. Le chantier ne reprend qu'en 1757, sous la direction du Frère Raymond Vergès, dominicain de la province occitane. Son imagination et son énergie dans la quête de nouvelles ressources et de solutions aboutissent à l'achèvement du projet de Mansart en 1786. Le monastère devait hélas demeurer peu de temps.
Saisi et vendu en 1793 pour 165 000 livres à l'élu révolutionnaire Hugues Destrem, celui-ci entame la démolition du monastère à des fins mercantiles en cédant la pierre et les matériaux divers aux villages environnants dont Bram et Fanjeaux. Ces éléments, dont certains ornements, sont encore visibles sur les maisons de ces villages. Ce n'est qu'en 1857, que le célèbre père Henri Lacordaire décide de refonder le berceau de l'ordre. Il entame sa reconstruction dans le style romano-byzantin en vigueur à cette époque. Seule l'église sera réalisée.