Pierre Bertaux est un universitaire germaniste, résistant français né le 8 octobre 1907 à Lyon (Rhône) et décédé le 14 août 1986 à Saint-Cloud (Hauts-de-Seine).
Membre de plusieurs cabinets de gouvernements de gauche, nommé commissaire de la République à la Libération de Toulouse, il a été fait notamment Officier de la Légion d'honneur, Croix de guerre, et Compagnon de la libération. Il fut sénateur du Soudan de 1953 à 1955.
Pierre Bertaux est le fils de Félix Bertaux auteur de manuels d'allemand, spécialiste de littérature allemande à la NRF qui avait étudié à Berlin avant la Première Guerre mondiale. Lycéen à Rouen, puis à Mayence où son père était chargé du nouveau lycée franco-allemand dans la Rhénanie occupée, enfin à Paris (au lycée Janson-de-Sailly et à Louis-le-Grand ), marqué par ses séjours à Lescun il entre à l'École normale supérieure, il a pour condisciples Aron et Sartre, puis il est agrégé d'allemand (1932) et docteur ès lettres. Après un premier voyage en 1925 avec son père (où il rencontre notamment Thomas Mann) il effectue trois séjours à Berlin entre octobre 1927 et 1933, pendant lesquels il reçoit des auteurs français importants (Supervielle et Gide par exemple) et a des contacts avec Golo Mann. Universitaire, proche de la SFIO, il écrit dans L'Homme nouveau, revue qui veut moderniser le socialisme. Chef des émissions parlées à la Radiodiffusion en 1934-1935, il devient chef de cabinet de Pierre Viénot, sous-secrétaire d'État aux affaires étrangères dans le premier cabinet Léon Blum, puis au ministère de l'éducation nationale sous Jean Zay en 1937 et 1938. Après sa thèse (sur Hölderlin), il retourne un temps enseigner à l'université de Rennes puis de Toulouse.
La visite du Général de Gaulle y met fermement un terme. Le général est particulièrement dur avec les communistes, le CNL (qui tentent de parler seuls à seuls avec de Gaulle en ... l'enfermant dans un bureau) et avec l'agent britannique George Starr (dit "colonel Hilaire"). Dans la voiture qui le conduit de Blagnac à Toulouse, le Général s'offusque notamment en apprenant que celui-ci aurait dit à Pierre Bertaux :
- « Je suis le colonel « Hilaire », j'ai 700 hommes armés, j'ai dans ma poche un ordre signé Churchill et de Gaulle et, s'il y a le bordel ici, je tape sur la table et je dis : "Ici, c'est moi qui commande." »
- Et vous ne l'avez pas fait arrêter sur le champ ? demande le Général.
- Non, « Hilaire » avait avec lui 700 hommes armés.
- Vous ne l'avez pas invité à déjeuner avec moi, au moins ?
- Bien sûr que si, il s'est battu près de deux ans dans le maquis, en invoquant votre nom.
- Eh bien ! Vous lui direz que je ne veux pas prendre un repas avec lui."
A l'issue du repas (qui eut lieu), le Général demanda à Bertaux de faire quitter sur le champ le territoire à celui qui lui aurait dit: « Je suis un militaire britannique en opération. J'ai un commandement à exercer. Je ne le quitterai que sur ordre de mes supérieurs à Londres. Je vous emmerde ; vous êtes le chef d'un gouvernement provisoire que les Alliés n'ont pas reconnu ! ». Bertaux fit dire à « Hilaire » qu'il prenne tout son temps pour faire ses adieux et ses bagages.
Mobilisé comme lieutenant interprète, puis pour faire de la radio en langue allemande au ministère de l'information, il fonde dès décembre 1940, un réseau résistant à Clermont Ferrand, et prend le contact avec la France libre à Londres en juin 1941. Après plusieurs missions de renseignement en zone occupée, il fonde le groupe "Bertaux" qui reçoit des parachutages à Fonsorbes pour les sabotages de la zone Sud. Arrêté par la sureté, jugé il est interné à Toulouse entre 1941 et 1943, puis passe dans la clandestinité, participant comme chef d'équipe de parachutage à l'action dans les Pyrénées. Contacté "sur un banc" pour être commissaire suppléant de la libération à Toulouse, il est finalement désigné pour assurer l'autorité du gouvernement provisoire à Toulouse et sur toute la région, après la libération de la ville, à cause de la grave blessure du commissaire de la République titulaire Jean Cassou, son compagnon de cellule entre 1941 et 1943, lors d'une fusillade par les Allemands le 20 aout 1944. Pierre Séailles est son attaché militaire.
Avec humour, il raconte dans ses mémoires qu'il eut du mal à s'imposer en particulier face à l'influence des FFI locaux de Serge Ravanel et au CNL, comité des résistants du maquis, qui souhaite conserver un pouvoir local marqué. La description qu'il fait de la progressive prise de possession de sa chaise, puis de son bureau, puis de son téléphone, montre une réelle difficulté à mettre de l'ordre entre les différents groupes armés locaux. Cela conduisit à une inquiétude du gouvernement sur une éventuelle "république rouge" à Toulouse.