Radar passif - Définition

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Performance

Les performances d'un radar passif sont comparables à celles d'un radar conventionnel à courte ou moyenne portée. La zone de détection peut être déterminée en utilisant les équations radar classiques, mais en s'assurant d'avoir pris en compte les bonnes valeurs pour le gain du traitement et pour la limitation du bruit. De plus, contrairement à un radar conventionnel, la zone de détection est aussi fonction de la géométrie de l'ensemble du système étant donné que la distance entre l'émetteur et le récepteur détermine le niveau du bruit dans lequel la cible devra être reconnue. En première approximation on peut raisonnablement penser qu'un radar passif utilisant comme source une émission de radiodiffusion FM aura une portée de 150 km, et pour des stations à haute puissance de télédiffusion analogique on pourra s'attendre à des portées supérieures à 300 km. Pour des sources de faible puissance — comme les cellules de radiotéléphonie portable — la portée sera de quelques dizaines de kilomètres.

La précision d'un radar passif est très fortement liée à la géométrie du système et au nombre d'émetteurs et de récepteurs utilisés. Les configurations qui n'utilisent qu'un émetteur et un récepteur auront tendance à être beaucoup moins précises qu'un radar de surveillance conventionnel, alors que les systèmes multistatiques permettent d'obtenir des précisions notablement supérieures. La plupart des radars passifs sont en deux dimensions, mais on peut toutefois faire des mesures de hauteur lorsqu'il y a des différences d'altitude significatives entre les émetteurs, le récepteur et la cible, réduisant ainsi les pertes de précision dues à la géométrie.

Principe

Dans le cas d'un radar conventionnel, le moment de l'émission de l'impulsion, et l'onde émise, sont parfaitement connus. Ceci permet de calculer facilement la distance de la cible et d'utiliser un filtre adapté pour obtenir un bon rapport signal sur bruit au niveau du récepteur. Un radar passif n'a pas d'informations directes sur le signal émis et doit donc être associé à un canal de réception (le « canal de référence ») pour « écouter » en direct chaque émetteur dont on utilise le signal et en assurer le traitement en temps réel. Typiquement, un radar passif fonctionne selon le schéma suivant :

  • réception du signal direct de l'émetteur et du signal réfléchi par la cible sur des récepteurs numériques, linéaires et à faible bruit,
  • Beamforming numérique pour déterminer la direction incidente du signal et pour éliminer spatialement les fortes interférences de la bande,
  • filtrage adapté pour supprimer tout retour du signal direct dans le, ou les, canaux de surveillance,
  • mise en forme du signal spécifique à l'émetteur,
  • corrélation croisée du canal de référence avec le, ou les, canaux de surveillance pour déterminer la distance bistatique et le décalage Doppler de l'objet,
  • détection par la méthode du CFAR (Constant false alarm rate),
  • regroupement et suivi des objets détectés dans l'espace distance/Doppler appelé « ligne de poursuite »,
  • regroupement et fusion des lignes de poursuite de chaque émetteur pour obtenir l'estimation finale de la position, de l'azimut et de la vitesse des objets.

Tous ces points sont détaillés dans les sections ci-dessous.

Système de réception

Par opposition à un radar conventionnel qui « écoute » les échos pendant les périodes de silence de l'émetteur, un radar passif doit être capable de détecter des cibles de très petite taille au milieu d'interférences puissantes et ininterrompues. Pour cela, il est indispensable que le récepteur soit à très faible bruit, soit parfaitement linéaire et ait une très bonne dynamique. Malgré ces précautions, le signal des échos reçu est très en dessous du bruit de fond, ce qui tend à limiter la sensibilité du récepteur en raison du signal direct de l'émetteur lui-même et d'autres émetteurs qui peuvent opérer sur la même bande. Les radars passifs utilisent des récepteurs numériques qui restituent un signal de sortie échantillonné et numérisé.

Traitement du signal (beamforming)

La plupart des radars passifs utilisent des antennes réseau à commande de phase constituées de quelques antennes. Ceci permet de calculer l'azimut des échos incidents en utilisant les techniques radar classiques du beamforming comme l'amplitude monopulse, qui utilise une série de faisceaux connus se recouvrant ou encore des méthodes plus sophistiquées de beamforming adaptatif.
D'autre part, quelques systèmes expérimentaux utilisent uniquement deux antennes et la différence de phase à la réception sur chaque antenne (battement) permet de calculer l'azimut des échos. Cette technique est appelée « interférométrie de phase » (phase interferometry).

Mise en forme du signal

Avec certains types d'émetteurs il est indispensable de faire une mise en forme spécifique du signal avant l'étape de la corrélation croisée. Il s'agit de faire un filtrage analogique efficace de la bande passante, de procéder à une équalisation pour augmenter la qualité du signal de référence, de supprimer les structures indésirables du signal numérique pour améliorer la fonction d'ambiguïté, et même de reconstruire des parties du signal de référence à l'aide du signal numérique reçu.

Filtrage adapté

Dans la plupart des systèmes de radar passif, le ratio signal/interférence limite la portée en raison du signal direct venant de l'émetteur qui est continu et très puissant devant le signal réfléchi. Pour s'affranchir de ce problème, on utilise un filtre adapté pour atténuer ou supprimer le signal direct avec un traitement voisin du contrôle actif du bruit. Cette étape est indispensable pour s'assurer que les lobes latéraux, dus au décalage Doppler dans le signal direct, n'occultent pas les échos plus petits résultant de l'étape de corrélation croisée.

Dans quelques cas particuliers, les interférences dues au signal direct ne constituent pas un réel problème, l'émetteur se trouvant derrière l'horizon ou derrière un relief de terrain. Mais ceci reste exceptionnel car l'émetteur est le plus souvent choisi « à vue » pour obtenir une bonne couverture à basse altitude.

Corrélation croisée

L'étape clef dans le traitement du signal d'un radar passif est la corrélation croisée. Cette étape se comporte comme celle du filtrage adapté et permet aussi d'obtenir une valeur approchée de l'angle bistatique et du décalage Doppler bistatique sur chacun des échos. La plupart des signaux de radiodiffusion, qu'ils soient analogiques ou numériques, se comportent comme du bruit et ont tendance à ne pouvoir être mis en corrélation qu'avec eux-mêmes. Ceci est un véritable problème avec les cibles mobiles car, en raison de l'effet Doppler qui en résulte, l'écho ne sera pas en corrélation avec le signal direct. Pour s'affranchir de ce problème, et pour réussir la corrélation croisée, il faudra mettre en œuvre une batterie spécifique de filtres adaptés, chacun étant réglé sur un décalage Doppler particulier. Une corrélation croisée basée sur la transformée de Fourier discrète (TFD) donne de très bons résultats. On peut considérer que le gain est égal au produit temps × bande passante, BT, où B est la largeur de bande et T la longueur de la séquence du signal traité. Un gain de 50 dB n'est pas rare. L'augmentation du temps d'intégration est limitée par la vitesse de la cible et par sa stabilité en distance et en décalage Doppler pendant la période de mesure.

Détection de la cible

On isole les cibles sur la surface de corrélation croisée en déterminant un seuil adaptatif et en admettant que tous les retours au-dessus de cette surface correspondent bien à des cibles. Classiquement, on utilise l'algorithme CFAR (constant false alarm rate).

Ligne de poursuite

La ligne de poursuite est formée par les retours des différentes cibles au cours d'un temps donné dans l'espace Doppler fourni par la corrélation croisée. Classiquement, on utilise un filtre de Kalman. Une part importante des fausses alarmes est rejetée à ce stade du traitement.

Association de trajectoires et estimation de position

Dans le cas d'une configuration bistatique (un émetteur et un récepteur) on peut déterminer la position de la cible simplement en calculant l'intersection de l'azimut avec l'ellipse de la distance bistatique. Cependant, les erreurs sur la distance bistatique et l'azimut rendent cette méthode très imprécise. On obtient de meilleurs résultats en estimant l'ensemble des coordonnées bistatiques (position, azimut et vitesse) à partir de la totalité des mesures de la distance bistatique, azimut et décalage Doppler et en utilisant un filtre non linéaire tel que le filtre de Kalman.

Lorsqu'on utilise plusieurs émetteurs, la cible peut être potentiellement détectée par chacun d'eux. Comme l'écho de chaque cible apparaît à une distance bistatique et un décalage Doppler différents, il est indispensable de savoir quelle cible reçue par l'intermédiaire d'un émetteur correspond à quelles cibles reçues par l'intermédiaire des autres émetteurs. Lorsqu'on a fait ce rapprochement, le point d'intersection des ellipses des distances bistatiques des différents émetteurs correspond à la position de la cible. La précision dans ce cas est très supérieure à celui où on n'utilise qu'une seule ellipse. Une fois encore, pour obtenir la meilleure précision on associe les résultats obtenus de chaque émetteur en utilisant un filtre non linéaire comme le filtre de Kalman.

Sources à bande étroite et porteuse continue

La description ci-dessus part du principe que l'onde issue de l'émetteur utilisé possède une fonction d'ambiguïté utilisable, et partant, que la corrélation croisée fournira des résultats exploitables. Mais certains signaux de radiodiffusion (la télévision analogique, par exemple) contiennent une structure dans leur domaine temporel qui restitue, après corrélation croisée, un signal extrêmement ambigu et imprécis. Dans ce cas, la méthode décrite ci-dessus ne fonctionne pas. En revanche, si le signal comporte une composante porteuse continue (CW) suffisamment puissante, il est possible de détecter et de suivre des cibles en utilisant une autre méthode : dans le temps, le décalage Doppler et la modification de l'angle d'incidence de l'écho des cibles en mouvement vont modifier la porteuse qui est caractéristique de la position, de la vitesse et de la direction de la cible. Par conséquent, on va pouvoir utiliser un estimateur non linéaire pour estimer l'état de la cible à partir de l'historique des valeurs du décalage Doppler et de la direction. Des travaux ont été publiés démontrant la faisabilité de cette approche pour la poursuite d'avions en utilisant les signaux de télédiffusion analogiques. Cependant, l'initialisation des mesures est longue et difficile et l'utilisation de signaux à bande étroite est certainement mieux adaptée comme complément à l'usage de sources ayant une meilleure surface d'ambiguïté.

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