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Coordonnées | |
Pays | France |
Subdivision | |
Région** | Europe et Amérique du nord |
Type | Culturel |
Critères | (i)(ii)(iv) |
Superficie | 8,57 ha |
Numéro d'identification | 203 |
Année d’inscription | 1982 |
Année d’extension | 2009 |
Extension | Grande saline de Salins-les-Bains |
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La saline royale d'Arc-et-Senans située sur la commune d'Arc-et-Senans (Doubs) est une œuvre de Claude Nicolas Ledoux, célèbre architecte visionnaire. Elle avait pour but la production de sel, et devait remplacer les salines vieillissantes de Salins-les-Bains et de Lons-le-Saunier.
À cette époque, le sel était utilisé pour la conservation de certains aliments comme la viande ou le poisson. C'était donc à ce titre une denrée relativement essentielle. Un impôt était basé sur sa consommation, la gabelle, et était perçu par la ferme générale. La Franche-Comté était une région relativement riche en gisements de sel gemme dans son sous-sol. En conséquence, on trouvait de nombreux puits salés dont on extrayait le sel par ébullition dans des chaudières chauffées au bois. On trouvait à l'époque de nombreux puits à Salins-les-Bains et à Montmorot. On avait construit les chaudières près de ces puits et l'on amenait le bois des forêts voisines. Cependant, après de nombreuses années d'exploitation, ces forêts s'appauvrissaient de plus en plus rapidement, et le combustible devait en conséquence parcourir des distances de plus en plus importantes pour être acheminé, ce qui coûtait de plus en plus d'argent. De plus, au fil des années, la teneur en sel de la saumure diminuait. Durant une période, les experts du Roi cherchèrent même à exploiter les « petites eaux », mais ceci fut stoppé par un arrêt du conseil du Roi en avril 1773. Enfin, la construction d'un bâtiment de graduation était impossible, du fait de la position de Salins-les-Bains dans un vallon, ce qui n'était pas adéquat.
Afin d'approvisionner la saline en « petites eaux » depuis les puits de Salins-les-Bains, un saumoduc fut construit. Il formait une double canalisation en sapin, longue de 21.5 kilomètres, qui traversait collines, routes et forêts, en suivant le cours de la Furieuse et de la Loue. Cette canalisation était enterrée afin de la rendre moins vulnérable aux dégâts du temps, du gel et des pillards.
Afin de le sécuriser plus fortement, 10 postes de garde furent construits le long du tracé du saumoduc, formant ainsi le « chemin des gabelous ». L'écoulement et la teneur en sel de la saumure étaient mesurés à chaque poste, et les résultats étaient relevés chaque samedi et portés à la saline. Les gabelous étaient à l'époque des douaniers responsables du commerce du sel, et donc responsable de la gabelle. Ils devaient faire face à des « faux-sauniers », qui perçaient les canalisations afin de récupérer une partie du liquide chargé de sel.
Le saumoduc suivait la déclivité du terrain (143 mètres de dénivelé), et était formé par des troncs de sapins taillés en forme de crayons pour s'emboîter facilement, et dont le cœur avait été évidé à l'aide d'une tarrière. Les sapins furent choisis du fait de leur grande taille, et aussi du fait de la relative tendresse de leur cœur. Ces troncs de sapins évidés étaient appelés « bourneaux ». L'emboîtement des troncs évidés entre eux devait être solidifié grâce à l'usage de « frettes » en fer. Malgré les nombreux travaux effectués sans interruption sur le saumoduc, de nombreuses fissures apparaissaient, cause de nombreuses fuites (les coûteux travaux étaient effectués sur l'une des canalisations pendant que l'autre assurait le transport de la saumure). Elles étaient estimées à 30%. Ainsi, des 135 000 litres de saumure envoyés quotidiennement depuis Salins, une partie non négligeable était perdue. À partir de 1788, les conduits en bois étaient progressivement remplacés par des conduits en fonte. On trouve encore aujourd'hui le long de ce chemin le poste de la Petite Chaumière, le deuxième après Salins-les-Bains.
Le bâtiment de graduation a été détruit en 1920. Il avait pour objectif à l'époque d'augmenter la concentration en sel de la saumure par évaporation. Il était à l'époque formé d'une immense ossature ouverte en bois, longue de 496 mètres, haute de 7 mètres, ce qui permettait le passage du vent. On trouvait à 5 mètres de hauteur un tuyau percé de trous qui laissait s'échapper l'eau salée qui pouvait alors se répandre sur de très nombreux fagots d'épines. Une évaporation avait alors lieu et était facilitée par le passage du vent. Chaque goutte de saumure était alors collectée par un madrier de sapin rainuré légèrement penché. Ce procédé était répété plusieurs fois afin d'augmenter la salinité de la saumure jusqu'à obtenir une salinité d'environ 24 degrés. La saumure était alors dirigée dans un immense bassin de 5 mètres de profondeur et d'une capacité de 200 000 litres (soit 200 m³). Ce bassin était recouvert d'une couverte de 2 000 m³, et était accompagné d'un poste de garde.
Ce sont de magnifiques bâtiments avec des colonnes doriques situés près des entrées pour pouvoir les contrôler. Elles possédaient des ornements et pas de cheminées comme le reste de la saline. Elles étaient très spacieuses et luxueuses. Ledoux attachait beaucoup d'importance à cela, car pour lui la protection de la saline contre des possibles attaques étrangères était capitale.
Ledoux conçut l'ensemble architectural en forme de demi-cercle (370 m de diamètre), comprenant les installations techniques et les logements des ouvriers.
La maison du directeur avec son fronton et son péristyle imposait une certaine idée de l'ordre. Elle rappelle la villa La Rotonda de Palladio, près de Vicence (Italie).
Emprisonné sous la Révolution, Ledoux imagine la cité idéale de Chaux, qui devait entourer la saline, projet qui restera dans les cartons de l'architecte tombé en disgrâce.
Nul doute que la Saline est l'expression de visions utopiques. Son demi-cercle parfait, l'alignement et la symétrie, quels que soient les points de vue, en font une œuvre architecturale idéaliste. De plus, la plénitude et l'indépendance qu'aurait pu acquérir une telle cité, logeant ses ouvriers, les nourrissant, leur offrant des activités, est une mise en pratique des utopies les plus ancestrales, comme celle de Thomas More (Utopia, 1516).