AGM-48 Skybolt | |
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Présentation | |
Fonction | ICBM |
Constructeur | Douglas Aircraft, Northrop |
Déploiement | Programme abandonné |
Caractéristiques | |
Moteur | Moteur fusée à carburant liquide de Aerojet, sur deux étages. |
Masse au lancement | 5 000 kg |
Longueur | 11,66 m |
Diamètre | 89 cm |
Envergure | 1,68 m |
Vitesse | 15 300 km/h |
Portée | 1 850 km |
Altitude de croisière | plus de 480 km |
Charge | W-59 1,2 MT thermonucléaire |
Guidage | Guidage inertiel |
Plateforme de lancement | Bombardier |
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Le GAM-87A Skybolt était un missile balistique destiné à être tiré depuis un avion en vol. Il fut développé par Douglas Aircraft à la fin des années 1950. Monté sous les ailes de bombardiers lourds plutôt que lancé depuis des silos, le Skybolt devait être un composant important de la force mobile d'ICBM de l'USAF. Le projet fut rejoint par les forces britanniques en 1960, qui pensaient utiliser le missile sur ses V-Bombers. Une série de problèmes lors du développement de missiles lancés par submersibles fit que le projet fut abandonné au milieu des années 1960. Les britanniques ayant choisi de faire du Skybolt la colonne vertébrale de leur force de dissuasion, l'arrêt du programme provoqua des tensions entre les deux pays, connues comme the Skybolt Crisis. Le problème fut réglé par les accords de Nassau par lesquels les USA s'engageaient à fournir au Royaume-Uni des missiles UGM-27 Polaris, qui construisirent les sous-marins de la classe Resolution pour lancer ceux-ci.
Les théoriciens de la guerre nucléaire réfléchissaient à une façon de conserver la flexibilité et le contrôle des bombardiers pilotés en y ajoutant l'invulnérabilité des missiles balistiques. L'apparition des missiles sol-air dans les années 1950 rendaient le survol du territoire ennemi par des bombardiers trop dangereux. La première solution à ce problème avait été de concevoir des missiles nucléaires tirés depuis le sol, mais qui, une fois tirés, ne pouvaient plus être contrôlés, comme pour un changement de cible par exemple. Ces premiers missiles, comme les ICBM Atlas 1 et Titan 1, ne pouvaient pas être stockés réservoirs pleins à cause de leur carburant corrosif; ils étaient donc vulnérables lors d'une attaque, le temps de leur mise en œuvre.
De plus, la faible précision des missiles de l'époque n'en faisait pas des armes de précision: ils pouvaient être utilisés sur de grandes villes, mais pas sur de petites cibles comme des bases de bombardiers, centres de commandes, bases navales... D'ailleurs, la plupart de ces cibles étaient localisées profondément derrière les frontières de l'URSS, ce qui les rendaient inaccessibles aux ICBM du bloc de l'ouest. L'utilisation de bombardiers comme plateforme de tir, qui offrait plus de flexibilité, était donc en cours de réflexion par les stratèges militaires dans les années 1950.
Par exemple, il aurait été possible de faire décoller les avions, les faire attendre près des frontières les instructions des centres de commandement, qui les auraient aiguillés vers des cibles ratées lors d'une première vague. Les bombardiers auraient aussi pu détruire les défenses anti-aériennes à l'aide de leurs missiles avant de les survoler pour continuer leurs missions. Et surtout, cet emploi des avions aurait rendu le potentiel nucléaire invulnérable, les bombardiers pouvant porter leurs missiles balistiques près des cibles, tout restant au-delà de la portée des armes anti-aériennes. Une gradation de l'attaque aurait alors été possible, les avions pouvant faire demi-tour en cas de retour à la diplomatie. Un missile stocké dans un silo est lui, soit tiré soit non tiré, et les sites de silos sont les premières cibles en cas d'attaque.
Pour les britanniques, ce dilemme se trouvait simplifié par leur géographie et leurs ressources financières. A cause de la faible superficie de leur pays, des silos auraient été facilement repérés quelles que soient les mesures de sécurité employées, et le pays était à portée des ICBM soviétiques.
En 1958, il avait été démontré que des missiles balistiques pourraient être lancés depuis des bombardiers stratégiques en haute altitude. L'utilisation de systèmes d'astronavigation et des systèmes de guidage inertiel permettrait d'atteindre la précision de tir des missiles tirés depuis le sol. L'USAF fut donc intéressée et commença à faire des appels d'offre début 1959. Douglas Aircraft fut désigné comme principal concepteur, sous traitant à Northrop le système de guidage, à Aerojet la propulsion, et à General Electric le véhicule de rentrée. Le missile fut initialement nommé WS-138A, et prit le nom officiel GAM-87 Skybolt en 1960.
Au même moment, la Royal Air Force avait des problèmes avec son projet d'IRBM, le Blue Streak, qui prenait du retard. Elle était de plus confrontée aux mêmes problèmes d'efficacité de leur arme de dissuasion, la flotte de V-bomber qui aurait pu être un cible facile pour des missiles sol-air. Le Skybolt était une solution qui pouvait éviter les gaspillages causés par les programmes de missiles Blue Streak et Blue Steel II.
le premier ministre Macmillan rencontra le président des États-Unis Eisenhower en mai 1960, accepta d'acheter 144 Skybolts pour la RAF, ce qui scella le destin des Blue Streak et Blue Steel II.
Plusieurs prototypes étaient prêts à être testés depuis les B-52 de l'USAF dès janvier 1961, et les essais de lancement du missiles commencèrent. Au Royaume-Uni, les essais se firent à partir d'avril 1962 à l'aide de maquettes installées sur des bombardiers Vulcan. Les tests furent loin d'être concluants, avec un échec différent pour chacune des cinq premières tentatives. Le premier vol réussi eut finalement lieu le 19 décembre 1962.
A cause de ces échecs, le programme Skybolt était sérieusement discrédité. D'autant plus que le SLBM Polaris de l'US Navy, qui avait des capacités à peu près équivalentes, venait d'entrer en service. L'US Air Force, de son côté, s'était engagée dans le développement du missile LGM-30 Minuteman, dont la précision effaçait un des avantages des bombardiers. Robert McNamara, en particulier, était opposé aux bombardiers et ne cessa de répéter que la combinaison de SLBM et d'ICBM les rendait inutiles. Il demandait donc l'arrêt du programme Skybolt, qu'il estimait comme une perte de temps.
Les Britanniques, par contre, avaient annulés tous leurs projets pour se concentrer sur le Skybolt. L'annonce de McNamara d'un arrêt possible du programme en Novembre 1962, déclencha une tempête de protestations à la Chambre des communes. La crise politique s'intensifia, et une réunion de crise eut lieu entre les États-Unis et la Grande Bretagne, laquelle donna lieu aux accords de Nassau.
L'accord consistait en la vente aux Royaume-Uni de SLBM Polaris, équipés de têtes nucléaires britanniques, ce lui permettait de conserver une force de dissuasion nucléaire (bien que cette force passât du contrôle de la RAF à la Royal Navy). Ce missile, bien meilleur pour le Royaume-Uni, fut estimé comme « la meilleure affaire du siècle ». La RAF conserva une capacité nucléaire tactique avec les WE.177 qui équipaient leurs V bombers, puis leurs Panavia Tornado.
Des tests continuèrent après l'arrêt du programme, avec les missiles restants. En juin 1963, les XGAM-87A furent renommés XGAM-48A.