« La psychanalyse bien comprise et les hypothèses qu’elle permet de faire sur la psychopathologie de l’autisme n’ont aucune prétention causale. Elles cherchent à élucider les mécanismes qu’utilise un enfant, privé, pour toutes sortes de raisons, en grande partie biologiques, d’une communication normale avec son environnement, afin d’organiser sa représentation du monde. »
Parmi les psychanalystes, la question de l'autisme a toujours fait débat d'autant que sous couvert de psychanalyse, l'approche sociogénétique de Bruno Bettelheim ou idéologique de Maud Mannoni ont jeté la confusion. Pour J.J Lustin (psychanalyste) qui parle des états autistiques: « Il m'est toujours apparu nécessaire d'exclure les autismes du cadre strict des psychoses infantiles parce que leur apparition et leur extrême gravité ne semblent pas résulter d'un véritables processus. On peut les considérer que comme des « états » plus ou moins précoces, à l'étiologie très mystérieuse et sans doute multi-factorielle. ». La confusion sur les théories et les pratiques se réclamant de la psychanalyse ont généré des dérives qui ont été vivement dénoncées, en particulier des prétentions causales et des entraves mises aux autres modes de prise en charges. Des controverses importantes ont lieu, notamment en France où de nombreuses réclamations des associations de parents ont abouties entre autres à des rapports du comité consultatif national d'éthique :
Ces controverses résultent aussi en grande partie de la diffusion hyper-médiatisée des travaux et des théories de Bruno Bettelheim, notamment celles concernant l'enfant autiste qui se se replierait sur lui-même parce qu'il aurait été « traumatisé » par son environnement, les parents en particulier et surtout la mère. Ce type d'hypothèse avait déjà été mentionné par Leo Kanner qui n'était pas psychanalyste, mais qui avait observé que les parents des enfants « autistes » étaient froids ou distants. Aujourd'hui cette vision n'a plus cours, la psychanalyse se référant plus volontiers aux écrits de Margaret Mahler, de Frances Tustin ou de Donald Meltzer entre autres, pour théoriser le ou les autisme(s). On parle d'ailleurs plus volontiers d'états autistiques, le vocable nominal laissant place à l'adjectif dans l'expression.
Il n'en reste pas moins que des divergences parfois irréconciliables subsistent entre l'approche psychanalytique de l'autisme et les prises en charge qui s'en réclament, et l'approche cognitivo-comportementale aujourd'hui majoritairement utilisée dans le monde pour comprendre l'autisme et élaborer des pratiques de prise en charge. Par ailleurs de nombreux professionnels, formés à l'époque où l'expression de Bettelheim de l'autisme était considérée comme une référence, y restent attachés, ce qui provoque aujourd'hui encore des situations difficiles pour certaines familles.
Se référer à l'article détaillé pour plus de détails sur cette approche ([Psychanalyse et autisme).
La théorie de l'esprit est définie en 1978 par Premack et Woodruff comme la capacité à inférer des états mentaux (croyances, désirs, intentions…) pour se représenter le comportement d'autrui. Elle expliquerait ainsi la compréhension de l’environnement social, ainsi que la capacité à comprendre et à prédire le comportement d’autrui, et par là-même d’adapter le sien à la situation sociale vécue.
Cette formalisation a été transposée dans le cadre de l'autisme à travers plusieurs séries d'expériences. La première est effectuée par Baron-Cohen, Leslie et Frith en 1985 avec des enfants autistes, des enfants trisomiques et des enfants témoins (en reprenant approximativement le principe du test établi par Wimmer et Perner en 1983), mais sous la forme de l'expérience dite de « Sally et Anne »
L'histoire suivante est représentée aux enfants avec des poupées, l'une nommée Sally et l'autre Anne (et on vérifie si l'enfant reconnaît bien les personnages par leur nom).
L'expérimentateur joue la situation suivante avec les poupées : Sally dépose une bille dans un panier puis elle sort de la pièce. Anne sort la bille du panier et la place dans une boîte. Sally revient dans la pièce. L'expérimentateur demande ensuite à l'enfant : « Où Sally va-t-elle chercher la bille ? »
Si la réponse donnée est « dans le panier », l'expérimentateur considère que l'enfant a réussi à se mettre « dans la peau » du personnage de Sally comme on leur demande de le faire, et à comprendre que dans l'histoire représentée à l'enfant elle ne peut être au courant de la manœuvre d’Anne.
Les enfants trisomiques comme les enfants ordinaires donnent la réponse attendue à plus de 80 %. À l'inverse, sur vingt enfants autistes testés, seize ont échoué à cette question, alors que tous savaient où était la bille.
Les auteurs de l'expérience concluent que l'autisme est le fait un déficit spécifique globalement indépendant d'un retard mental général. L'idée d'un « manque de théorie de l'esprit » étant l'hypothèse de travail, en s'appuyant sur le fait que seule une petite minorité des enfants autistes réussissent le test de « représentation du deuxième ordre » ils précisent que leur hypothèse selon laquelle globalement les enfants autistes « échouent à utiliser la théorie de l'esprit » est renforcée.
Dans cette expérience, et encore plus dans les suivantes (téléphoner avec une banane, la boîte de Smarties...) le problème du rôle de l'expérimentateur est soulevé par les détracteurs. Ce qui est remis en cause c'est le lien fait entre d'un côté la défaillance de la compréhension d'une situation créée par l'expérimentateur, et de l'autre la conclusion à une défaillance globale du mécanisme de compréhension de l'autre en général.
Pour Simon Baron-Cohen, un des protagoniste de la toute première expérimentation, la difficulté à former des métareprésentations et donc la difficulté à inférer des états mentaux à soi-même et à autrui, a une importante incidence sur le comportement. Un individu plongé dans un environnement peuplé de personnes dont il peine à comprendre et prédire les actions, dont il ne comprend éventuellement pas le langage, va présenter des comportements d’évitement, voire d’agression, motivés par l’incompréhension. C'est pourquoi la structuration de l'environnement, qui le rend prévisible et compréhensible, permet à la personne atteinte d'autisme de mieux gérer son déficit en théorie de l'esprit et améliore les problèmes de comportement.
Pour Tony Attwood et Carol Gray l'interprétation est retournée puisqu'il expriment un handicap due à « la fausse croyance qu’ont les autres de les avoir compris ».
Selon Christiane Riboni, docteur en linguistique, « l'analyse d'entretiens menés avec des patients autistes montre que le manque en théorie de l'esprit n'est pas patent, au contraire même dans certains cas ». Elle décrit une intentionnalité mais « une utilisation du langage plus marquée sur le versant représentationnel que communicationnel ». Elle se réfère également à Tager-Flusberg pour proposer l'explication d'une « défaillance marquée à maîtriser un cadre causal explicatif ».
Cette théorie a été développée depuis une quinzaine d’années par Bruno Gepner et collaborateurs, sur la base de plusieurs études cliniques et psychophysiques réalisées auprès d’enfants et adolescents atteints d’autisme ou de syndrome d’Asperger.
Ces études montrent que les informations sensorielles dynamiques (les mouvements de l’environnement, les mouvements humains corporels ou faciaux, la parole) sont trop rapides pour être perçues en temps réel par les personnes atteintes d’un trouble du spectre autistique. Ce problème de traitement temporel de l’information dynamique expliquerait en cascade leurs troubles de compréhension du langage et des émotions, leurs troubles imitatifs, leurs troubles des fonctions exécutives, et notamment leur retard dans les réponses motrices, et in fine leurs troubles des interactions sociales. Si l’information dynamique pose des problèmes importants aux personnes atteintes de troubles du spectre autistique, ces dernières peuvent en revanche et par compensation montrer une attention accrue pour les informations spatiales statiques, les détails spatiaux ou sonores, et développer des compétences accrues dans le domaine visuo-spatial (puzzles, mémoire spatiale, graphisme), ou du calcul (les voies cérébrales dédiées au calcul sont en partie les mêmes que celles qui traitent les informations spatiales). Ces particularités du traitement temporo-spatial des informations sensorielles sont probablement corrélées à des anomalies de la connectivité cérébrale fonctionnelle et de la synchronisation neuronale, c’est-à-dire de la mise en cohérence des différentes aires cérébrales et groupes neuronaux, que ce soit au repos ou lors de tâches cognitives simples ou complexes. Il ressort des études en IRMf (imagerie par résonance magnétique fonctionnelle) ou de cohérence EEG (électro-encéphalographique) que le cerveau des personnes autistes serait plutôt moins connecté et moins synchronisé lors de tâches impliquant des stimuli visuels ou auditifs dynamiques, et au contraire plus connecté et plus synchronisé au cours de tâches d’attention focalisée ou mettant en jeu des stimuli statiques, par rapport au cerveau des sujets témoins. Gepner et collaborateurs appellent ces mécanismes d’hypo- ou hyper-synchronisation, ou sous- ou sur-connectivité, entre les multiples régions cérébrales : la disconnectivité-dissynchronisation cérébrale multi-système (DDCM).
Toujours à l'état d'hypothèse de travail, cette théorie offre la possibilité de faire des liens avec d'autres troubles souvent associés aux troubles du spectre autistique, comme l'épilepsie (considérée comme une hyper-synchronisation pathologique), et divers troubles du développement (dysphasie, dyslexie, dyspraxie, ...), et donne des pistes pour mieux distinguer les différents troubles, y compris au sein du spectre autistique. Enfin, cette théorie ouvre des voies thérapeutiques nouvelles. En effet, des études de Gepner et collaborateurs montrent que le ralentissement des signaux visuels et auditifs permet d’améliorer la reconnaissance des expressions faciales émotionnelles et non émotionnelles, d’améliorer l’imitation des gestes, et d’améliorer la compréhension du langage chez des enfants autistes, notamment ceux qui sont atteints des désordres les plus sévères ou dont les niveaux de développement sont faibles. Ces résultats pourraient à l’avenir déboucher sur des pistes rééducatives utilisant un logiciel de ralentissement des signaux visuels et sonores.