Directive oiseaux - Définition

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L'avenir de la directive Oiseaux

En 2004, la célébration des 25 ans de la directive oiseaux s'est conclue notamment par la signature d'un protocole d'entente entre Birdlife International et la Fédération des associations de chasse et conservation de la faune sauvage de l'UE (FACE)[3] qui a marqué un tournant positif dans les relations entre ces parties prenantes jouant un rôle important dans la conservation des oiseaux.

Face à la multiplication des confrontations nées des diverses interprétations de la directive, la Commission européenne a jugé bon de mettre en place dès 2001 une initiative en faveur d'une chasse durable afin de relancer le dialogue. Ayant pour but de concilier la pratique de la chasse et la conservation des populations d'oiseaux sauvages du territoire européen, cette initiative a conduit à la rédaction en août 2004 d'un guide sur la chasse en application de la directive oiseaux. Basé sur des données scientifiques solides et dans le cadre juridique existant, ce guide a pour but de préciser l'interprétation qui doit être faite de la directive et de certains de ses articles (notamment les articles 7 et 9), ainsi que sur l'abondante jurisprudence communautaire et française.

Mais la directive oiseaux, en plus du poids des confrontations au sujet de la chasse, est accusée de ne pas s'appliquer à un territoire suffisamment large, puisqu'elle ne concerne qu'une partie du territoire des populations migratrices du paléarctique occidental (de l'Afrique de l'Ouest à la Russie). L'élargissement de l'Union de 9 à 15 puis 25 pays en 2004 tend à pallier ce manque, mais reste insuffisant.

Une nouvelle piste se dessine quant à une protection plus large de l'avifaune du paléarctique occidental. Dans le cadre global fixé par la Convention de Bonn est l’accord du 16 juin 1995, sur la Accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie, dit accord AEWA. L'Union européenne a signé l'accord AEWA le 1er octobre 2005. C’est une avancée importante, qui devrait être considérée comme un élément significatif par le juge communautaire et le juge national. Mais beaucoup de ses dispositions constituent des recommandations, plus que des obligations. Il convient de noter que l'accord AEWA ne concerne que le gibier d’eau et non les espèces migratrices en général.

Dans le cadre de la mise en place d'une politique encore plus complète et efficace de protection et de conciliation des usages, l’exemple de l’Amérique du Nord est à cet égard très intéressant. En 1988, les États-Unis, le Canada et le Mexique ont mis en place un système de gestion commun pour les canards et les oies. Ce dispositif permet de moduler le prélèvement, espèce par espèce, pour chacune des grandes voies de migration. Un tel dispositif, s’appuyant sur un réseau efficace d’observation et d’analyse scientifique, permettrait une approche beaucoup plus réaliste de la nécessaire conciliation de la chasse et de la conservation des espèces. L’élargissement de l’Union européenne, en étendant sensiblement l’aire d’action de l’Union, et en faisant de certains États cruciaux en ce domaine, tels que la Russie ou l’Ukraine, des États limitrophes, devrait favoriser largement une telle démarche.

La directive Oiseaux à travers la communauté

En 2006, le baromètre de l'application de la directive oiseaux, publié dans la lettre d'information Natura 2000, présentait les résultats suivants pour les 25 états-membres de l'Union européenne :

avancement de la désignation des ZPS dans les états membres de l'union européenne (source : lettre Natura 2000 n°20, mai 2006)
nombre de sites superficie totale (km²) superficie terrestre (%) nombre de sites maritimes superficie maritime (km²)
Pays membres
Flag of Slovakia.svg  Slovaquie 38 12.294,8 25,2 0 0
Slovénie  Slovénie 27 4.655,9 23 1 2,9
Espagne  Espagne 512 92.377,5 18,2 20 574
Hongrie  Hongrie 55 13.519,1 14,5 0 0
Estonie  Estonie 66 12.160,8 12,8 26 6.394,3
Pays-Bas  Pays-Bas 77 10.109,3 12,5 7 4.912,5
Autriche  Autriche 94 9.275,5 11,1 0 0
Portugal  Portugal 50 9.956,4 10,1 10 622,1
Grèce  Grèce 151 13.703,2 10,1 4 405
Belgique  Belgique 229 2.964,4 9,7 0 0
Lituanie  Lituanie 97 6.751,4 9,6 4 519,5
Allemagne  Allemagne 551 47.841,4 8,9 14 16216,9
République tchèque  République tchèque 38 6936,2 8,8 0 0
Italie  Italie 503 24.864,9 8,1 13 396,2
Lettonie  Lettonie 73 5.286,3 7,8 1 171
Pologne  Pologne 72 33.156,3 7,8 3 8794,5
Finlande  Finlande 452 28.372,7 6,8 65 5511,3
Suède  Suède 509 28.647,8 6,2 107 3.016,6
Danemark  Danemark 113 14.708,9 5,9 59 12.173
 Royaume-Uni 258 14.967,2 5,8 3 710,4
Luxembourg  Luxembourg 12 139,2 5,4 0 0
Irlande  Irlande 131 2.814,8 2,9 66 810,4
France  France 381 75.944,7 2,7 52 2.225,3
Malte  Malte 6 7,6 2,4 0 0
Chypre  Chypre 2 107,9 1,9 0 0
Union Européenne 4.317 412.564,3 8,9 455 63.455,7

Les nouveaux états membres avaient pour obligation de désigner des ZPS et de proposer des SIC à la date de leur entrée dans l'Union (1er mai 2004). Ils ont tous soumis leur liste et l'évaluation est en cours.

Les problèmes d'interprétation en matière de chasse

La chasse, selon les dispositions et considérants de la directive, est envisagée comme "une exploitation admissible" des espèces d'oiseaux, et la directive en elle même ne soulève pas de difficultés particulières. Aucune date n’est clairement indiquée pour les périodes d'ouverture ou de fermeture de la chasse. Elle rappelle uniquement que les états doivent veiller à ce que "les espèces auxquelles s’applique la législation de la chasse ne soient pas chassées pendant la période nidicole ni pendant les différents stades de reproduction et de dépendance. Lorsqu’il s’agit d’espèces migratrices, ils veillent en particulier à ce que les espèces auxquelles s’applique la législation de la chasse ne soient pas chassées pendant leur période de reproduction et pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification."

En revanche, les problèmes rencontrés pour la mise en œuvre de la directive sont progressivement apparus lorsque la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) a donné de ces dispositions une interprétation excessivement restrictive, en introduisant des notions (protection complète, confusion, dérangement...) qui ne sont pas initialement mentionnées par la directive.

Royaume-Uni

Vue de la colline de Rùm depuis le mausolée Harris

La directive oiseaux ne précisant pas de critères particuliers pour la désignation des ZPS (SPA pour Special Protection Areas en anglais), c'est le Joint Nature Conservation Committee, avec le soutien des agences nationales de conservation (Countryside council for Wales, English Nature, Scottish Natural Heritage et Environment and Heritage Service in Northern Ireland) et du gouvernement britannique qui a réalisé le SPA Selection Guidelines for the use in the UK.

Les trois premières SPA du Royaume-Uni ont été classées le 31 août 1982 selon les recommandations de ce guide méthodologique. Il s'agit des trois sites suivants :

  • l'île de Rùm en Écosse au sud ouest de Skye ;
  • les trois îles de en:Skomer, Skokholm et Middleholm au Pays de Galles ;
  • la zone d'estuaire dite The Swale au sud-est de l'Angleterre.

Vers le milieu des années 1990, le gouvernement britannique a commandé au JNCC une revue de l'ensemble des SPA désignés au Royaume-Uni. Ce processus d'inventaire a abouti à la réalisation de ce qui est communément appelé le SPA Review. Un groupe de travail a ensuite été formé par le gouvernement, le SPAR SWG (Special Protection Aeras & Ramsar Scientific Working Group) afin d'élaborer une stratégie de développement du réseau de SPA.

France

L'application de la directive en France a surtout été rendue difficile en ce qui concerne les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux migrateurs et aux oiseaux d'eau, et fait encore débat à l'heure actuelle.

À l'occasion du trentième anniversaire de la Directive Oiseaux, un bilan de son application a été réalisé par la LPO. Il évalue l'évolution de la "santé" des oiseaux nicheurs, en se basant sur les données des effectifs reproducteurs.

Le réseau de Zones de Protection Spéciales (ZPS)

Dès 1988, la Cour de justice des Communautés européennes (qui est chargée d’interpréter les textes européens et de sanctionner leur éventuelle violation par les états membres) a conclu au manquement de la France à ses obligations de transposition des dispositions de cette directive dans la loi française. Après avoir pris un retard alarmant, dénoncé par la commission européenne, l'État français a pris des dispositions afin de combler son retard.

Ainsi, au 30 avril 2006, le réseau français de sites Natura 2000 comprenait 367 zones de protection spéciales, contre 117 en 1986, pour une superficie totale de 4 477 962 ha (source : site web Natura 2000 du Ministère de l'écologie et du développement durable français).

En 18 mois, la France a transmis un nombre de dossier à la commission se traduisant par un accroissement de la surface du réseau de + 167% au titre de la directive Oiseaux. Cet effort considérable permet à la France de présenter, au 30 avril 2006, un réseau cohérent au regard des enjeux de sauvegarde de la biodiversité de son territoire, comme elle s'y était fermement engagée auprès de la Commission européenne.

Les ZPS concernent principalement des sites littoraux et côtiers (Corse, Bretagne), des zones humides (Arcachon, la baie du Mont Saint-Michel, les basses vallées angevines, etc.) et les espaces protégés en haute montagne. Les autres milieux (forêts, tourbières, milieux bocagers, plaines céréalières) sont en revanche très peu représentés.

Avec les Zones Spéciales de Conservation de la Directive habitats, le réseau des sites Natura couvre 6 496 917 ha (hors milieux marins), soit 11,83% du territoire métropolitain.

Le débat des dates de la chasse

Face à la pression du lobby des chasseurs, la méthode qui a prévalu pour le gouvernement a été de mettre en place un système de fermeture échelonnée par espèce. Ce système a pourtant été jugé incompatible avec les objectifs de la directive par le parlement européen, lors d'une consultation du 15 février 1996. Le rapporteur, Mme Van Putten, préconise d'ailleurs de durcir la Directive Oiseaux, notamment son article 7 paragraphe 4, en imposant la fermeture de la chasse au plus tard le 31 janvier. Mais cela allant contre le principe de subsidiarité de l'Union européenne, les chasseurs rétorquent qu'il est nécessaire de prendre en compte les différences entre pays : de la Norvège au sud de l’Espagne, de la Laponie à la baie de Somme, les saisons et les mouvements migratoires ne sont pas les mêmes.

Cependant, cette date limite du 31 janvier refait surface quelques années plus tard, lors de la commande, le 12 mars 1999, par la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement Mme Dominique Voynet, d'une étude sur les dates de migration et de nidification des oiseaux d'eau et des oiseaux migrateurs en France. Le but était de parvenir à éclaircir la situation et d'essayer d'obtenir un consensus avec les chasseurs, grâce à des données scientifiques. Un groupe de travail est formé autour du Professeur Jean-Claude Lefeuvre, Directeur de l'Institut d'Ecologie et de gestion de la biodiversité et chercheur au Muséum national d'histoire naturelle et son groupe de travail (rapport en téléchargement sur cette page). Les conclusions principales de ce rapport (consultables ici) sont les suivantes, pour ce qui nous intéresse ici :

  • concernant le principe de l'échelonnement des dates de chasse : les risques de confusion, du fait d'un déficit de connaissance naturaliste des chasseurs mais également d'une grande partie de la population, rendent difficile la détermination des multiples oiseaux d'eau chassables. Il est alors difficile de décliner les périodes de chasse espèce par espèce. "Le principe de date unique rendant opérationnelles les dispositions relatives à l’exercice de la chasse aux oiseaux migrateurs est donc à privilégier".
  • concernant les dates de chasse en elles-mêmes : la confrontation des données actuelles sur la chronologie de la migration prénuptiale et sur la chronologie de la reproduction en France des oiseaux d'eaux et migrateurs chassables ou non met en évidence que "la période permettant d’assurer la plus grande sécurité des oiseaux d’eau et migrateurs chassables pendant leur migration prénuptiale et pendant leur reproduction s'étend du 31 janvier au 1er octobre".

Les recommandations de ce rapport ont fait grand bruit auprès des chasseurs et de l'ONCFS, mais également auprès de certains scientifiques extérieurs au débat. Ainsi, pour conclure sur la période optimale de protection du 31 janvier au 1er octobre, ce rapport a, en effet, souvent tenu compte du comportement d’individus atypiques, ce qui le distingue profondément du rapport du comité ORNIS qui prend soin de préciser que "les données extrêmes, isolées et fluctuantes ont été exclues en raison de leur caractère incertain et parce qu’elles tombent en dehors des modèles de variation annuelle et intra–annuelle normaux". Selon le professeur Herby Kalchreuter, dont les travaux sont internationalement reconnus : "Ces conclusions ont été établies sur la base d’une recherche bibliographique très sélective et biaisée, conjuguée à une mauvaise interprétation des résultats des études."

En 2006, l'affaire des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse en France n'est toujours pas résolue. Les arrêtés ministériels du ministre de l'écologie et du développement durable sont régulièrement annulés par le Conseil d'État, comme ce fut le cas en 2001, puis régulièrement en 2002, l'échange s'accélérant en 2003 où 2 arrêtés de la ministre Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ont été jugés et annulés par le Conseil d'État en moins d'une semaine.

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