Éducation populaire - Définition

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Introduction

L'éducation populaire est un courant d'idées qui milite pour une diffusion de la connaissance au plus grand nombre afin de permettre à chacun de s'épanouir et de trouver la place de citoyen qui lui revient.

Elle se définit généralement en complément des actions de l'enseignement formel. C'est une éducation qui reconnaît à chacun la volonté et la capacité de progresser et de se développer, à tous les âges de la vie. Elle ne se limite pas à la diffusion de la culture académique ni même à l'art au sens large, mais également aux sciences, aux techniques, aux sports et aux activités ludiques, ...

Ces apprentissages sont perçus comme l'occasion de développer ses capacités à vivre en société : confronter ses idées, partager une vie de groupe, s'exprimer en public, écouter, etc.

En Belgique francophone, l'éducation populaire est souvent désignée par le terme éducation permanente. Elle n'est pas à confondre avec une formation professionnelle continue.

Histoire

En France, on considère comme fondateurs de l'éducation populaire : la Révolution française avec le rapport Condorcet, la création par Jean Macé de la Ligue de l'enseignement en 1866, en 1899 le Sillon de Marc Sangnier et le Front Populaire. À la Libération la Résistance entend réaliser son programme.

Déclaration de Condorcet

En avril 1792, Condorcet remet un rapport intitulé « l'organisation générale de l'instruction publique ». On peut notamment y lire : « tant qu'il y aura des hommes qui n'obéiront pas à leur raison seule, qui recevront leurs opinions d'une opinion étrangère, en vain toutes les chaînes auraient été brisées, en vain ces opinions de commandes seraient d'utiles vérités ; le genre humain n'en resterait pas moins partagé entre deux classes : celle des hommes qui raisonnent, et celle des hommes qui croient. Celle des maîtres et celle des esclaves ».

Cette déclaration reconnait à l'éducation une finalité civique : « L'instruction permet d'établir une égalité de fait et de rendre l'égalité politique reconnue par la loi ». Condorcet prône une instruction en deux temps : 1) l'éducation de l'école primaire 2) L'éducation tout au long de la vie.

L'essor d'une idée

Les révolutions parisiennes de 1830 et 1848, qui ont mêlé sur les mêmes barricades étudiants (à l'époque presque exclusivement issus de la bourgeoisie), artisans et ouvriers, vont entraîner la formation de premières grandes associations laïques d'éducation populaire : l'Association polytechnique (créée par des membres de l'École polytechnique et animée par Auguste Comte) puis l'Association philotechnique (issue en 1848 de l'Association polytechnique). Mais c'est avec la création de la Ligue de l'enseignement en 1866 qui se prolonge par des comités scolaires et des bibliothèques, que le vrai départ est donné.

La Commune de Paris en 1871 affirme certains droits, parmi lesquels la séparation de l'Église et de l'État, l'instauration d'un ministère du travail, l'enseignement laïc et gratuit, l'enseignement professionnel assuré par les travailleurs, et les fournitures scolaires gratuites.

La Troisième République va d'abord s'installer avant de mettre en place ou tout au moins favoriser quelques années plus tard l'école publique laïque et obligatoire et les premières bourses du travail.

Les ouvriers réclament des bibliothèques dans les entreprises, des cours du soir en sus des formations professionnelles destinées à augmenter leur productivité : de l'économie, de la philosophie, de l'histoire. C'est l'époque de l'apparition des premiers musées du travail : statut culturel de l'outil, œuvre de culture. Pour Fernand Pelloutier, l'éducation est un prélude à la révolution « ce qui manquait à l'ouvrier, c'est la science de son malheur », « [il faut] instruire pour révolter ». La création dans chaque ville importante d'une Bourse du Travail est très représentative de ce courant du socialisme.

Le Sillon de Marc Sangnier

Marc Sangnier (1873-1950) transforme son journal Le Sillon en organe d'un vaste mouvement qui réunit la jeunesse ouvrière et les fils de notables afin de réconcilier les classes laborieuses avec l'Église et la République. En s'appuyant sur les patronages catholiques, Sangnier crée en 1901 des Instituts Populaires qui donnent bientôt des cours et des conférences publiques. Lors du congrès national de 1905, près de mille cercles venus de la France entière sont ainsi représentés. Appuyé par les jeunes prêtres et quelques évêques c'est très vite un succès.

Cependant, le mouvement doit combattre l'opposition de l'extrême gauche marxiste qui parfois perturbe les réunions organisées par Le Sillon ou la presse de l'Action française de Charles Maurras. En 1910 Marc Sangnier, condamné par le Pape sur le plan doctrinal se soumet mais passe au terrain politique.

Après la première guerre mondiale il ouvre la première Auberge de jeunesse en France, baptisée l'Épi d'Or, elle est construite en 1929 à Boissy-la-Rivière (Essonne) L'année suivante est fondée à son initiative la Ligue Française pour les Auberges de Jeunesse.

Le Front populaire

Mais la menace du fascisme, la « montée des périls » permet l'arrivée du Front populaire et la relance des mouvements d'éducation populaire par les partis de gauche, notamment grâce à l'action du secrétariat d'État aux Sports et aux Loisirs de Léo Lagrange. On voit la naissance des CEMEA (Centre d'entraînement aux méthodes d'éducation active), des CLAJ (Club Loisirs Action Jeunesse) et la relance d'un second réseau d'Auberges de jeunesse.

L'après-guerre

La guerre puis le gouvernement Pétain conduit à un retour en arrière. Mais très vite on retrouve dans la résistance des hommes et des femmes venus de divers milieux qui pensent de l'éducation populaire d'une France libérée. Peuple et culture est ainsi créée en 1943. Dans leur manifeste de 1945 :

« Une culture vivante suscite un type d'homme. Elle suppose des méthodes pour transmettre la connaissance et former la personnalité. Enfin, elle entraîne la création d'institutions éducatives. Ainsi la culture populaire a besoin d'un humanisme, d'une technique, d'une organisation propres - faute de quoi, elle risque de rester prisonnière d'un enseignement périmé. »

Lors d'une réflexion sur la place de la culture, Joffre Dumazedier conceptualise la notion de « développement culturel » pour combattre intellectuellement celle de « développement économique », dans une logique où il s'agit de se forger des armes critiques contre le capitalisme.

À la Libération, on assiste à la naissance de la direction de la culture populaire et des mouvements de jeunesse, puis de la direction de l'éducation populaire et des mouvements de jeunesse au sein de l'Éducation nationale (dirigée par Christiane Faure en 1944). Le courant laïc considère à ce moment-là que l'école publique est acquise et n'est plus à défendre, qu'il faut travailler autour de l'école.

Le mouvement ouvrier est puissant et organisé. C'est autour du travail dans l'entreprise que s'organise la culture (voir Comité d'entreprise). En lien avec la production, il s'agit d'établir un regard sur la gestion. Naissance de Travail et Culture, de Tourisme et Travail. L'éducation populaire est florissante. La Ligue de l'Enseignement se reconstitue et s'engage à nouveau dans le combat laïc.

La Ve République

Puis l'arrivée de la Cinquième République provoque des modifications importantes : la jeunesse est séparée de l'éducation et est confiée à Maurice Herzog, la culture s'émancipe également sous la tutelle de André Malraux. On voit des choses bizarres comme la pratique du théâtre amateur restée une pratique d'éducation populaire et donc dépendant de la jeunesse, alors que le reste du théâtre (les professionnels, les « cultureux » pour reprendre le mot, péjoratif, entendu lors du débat par des animateurs socioculturels, ce qui montre bien un fossé) passe à la culture avec Malraux.

1968 marque un tournant de l'éducation populaire. Le 25 mai, les responsables des maisons de la culture publient la Déclaration de Villeurbanne :

« (..) nous refusons délibérément toute conception de la culture qui ferait de celle-ci l'objet d'une simple transmission. Non point que nous tenions pour nul, ou contestable en soi, cet héritage sans lequel nous ne serions peut-être pas en mesure d'opérer sur nous-mêmes, aujourd'hui, cette contestation radicale: mais parce que nous ne pouvons plus ignorer que, pour la très grande majorité de nos contemporains, l'accès à cet héritage passe par une entreprise de ressaisissement qui doit avant tout les mettre en mesure d'affronter et de pratiquer, de façon de plus en plus efficace, un monde qui, de toute façon, n'a pas la moindre chance de s'humaniser sans eux. »

L’exigence de transformation sociale est forte, mais très vite une partie de cette révolte est récupérée, étouffée. L'éducation populaire perd de sa force en même temps que le mouvement ouvrier. Les années 1970 voient la naissance de l'animation socioculturelle qui se réclament de la neutralité sans pouvoir en donner une définition précise. C'est également la loi de 1971 sur l'éducation permanente, fortement inspiré du mouvement de l'éducation nouvelle, mais qui n'en reprend cependant que la partie consacrée à la formation, à l'employabilité et oublie la critique de l'action, la démocratie, bref met l'accent plus sur les fins que sur les moyens.

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