Contrairement aux royaumes barbares du continent, les régions de Bretagne conquises par les Angles, les Jutes et les Saxons voient la culture latine, sans doute superficielle, entièrement effacée. Cependant, celle-ci se perpétue dans les régions celtes, notamment par l'activité monastique du Pays de Galles et de l'Irlande. En Irlande notamment, les monastères de Clonard, de Bangor, de Derry et d'Armagh constituent des centres d'étude importants où se perpétue l'étude des lettres classiques et des arts libéraux autour de personnalités comme saint Finian, saint Congall et saint Colomba. La réputation de la culture irlandaise s'étend jusqu'à Rome et en Espagne
Les moines irlandais se manifestent en Angleterre et sur le continent, et le plus connu parmi eux est certainement Colomban, qui débarque vers 570 en Gaule mérovingienne. Il fonde avec ses compagnons plusieurs monastères ascétiques (essentiellement au nord de la Loire), notamment celui de Luxeuil (ainsi que Bobbio en Italie du nord, à la toute fin de sa vie). L'activité intellectuelle de ces institutions reste limitée à la culture religieuse, et si l'influence de Colomban est quasi-nulle sur les clercs de son temps, elle est plus remarquable sur les laïcs, notamment au sein de la cour mérovingienne. La spiritualité colombanienne est relayée auprès de Dagobert grâce au référendaire Dadon, disciple de Colomban, aidé par Éloi et le chancelier Didier. Tandis que l'afflux d'Irlandais se poursuit (comme à Rebais), un réseau monastique se crée donc, autour de 640, jusqu'en Gaule méridionale. Des monastères qui suivent en général une règle mixte, mêlant celle de Colomban et celle de Benoît, permettant à celle-ci de gagner le nord de la Gaule comme à Fontenelle et Jumièges.
La stabilité politique de l'Espagne wisigothique permet la poursuite de sa floraison culturelle, parfois surnommée la « renaissance isidorienne », tout au long du VIIe siècle.
Mais cette période dominée par la figure d'Isidore de Séville, dont les Étymologies constituent l'une des bases de la culture médiévale, voit surtout se développer les centres de culture du nord, notamment Saragosse sous l'évêque Braulio, et Tolède, tandis que se précisent les menaces arabes sur Séville et Mérida. L'école épiscopale de Tolède produit des œuvres empreintes de culture humaniste mêlant références chrétiennes et païennes : Eugène se fait remarquer par ses poèmes didactiques, et Julien compose une grammaire pour ses étudiants. Dans le même temps se développent en Espagne du nord-ouest (Bierzo, Galice) des monastères ascétiques rappelant le monachisme celte, notamment sous l'influence de Fructueux de Braga et Valère de Bierzo : ces écoles seront la base de l'activité culturelle mozarabe.
Les missionnaires romains envoyés en 597 par Grégoire le Grand sous la conduite du prieur Augustin s'installent au sud de l'Angleterre, dans le Kent. C'est donc là qu'au VIIe siècle s'établissent des écoles chrétiennes. Il n'est cependant pas sûr qu'il en ait été ainsi à Cantorbéry, même si l'étude y occupait une grande place, notamment la lecture de textes sacrés et l'enseignement du chant religieux, la légende de l'attribution de la modulatio romana à Grégoire le Grand (« chant grégorien » étant probablement née en Angleterre. On peut en revanche retenir des fondations en East Anglie, où le roi Sigebert crée l'école de Dunwich vers 630 par le roi , et dans le Wessex, avec quelques structures épiscopales ou monastiques.
Le nord de l'Angleterre présente un plus grand dynamisme culturel grâce à l'activité des Irlandais. Ceux-ci installent au cours du VIIe siècle des écoles monastiques, notamment Lindisfarne (fondé par Aedan) et Whitby (fondé par les disciples d'Aidan puis dirigée par son élève Hild qui y attire des aristocrates cherchant un enseignement spirituel. C'est d'ailleurs à Whitby que le synode de 664 met un terme à la dissidence celtique en Angleterre septentrionale.
Quoi qu'il en soit, au nord comme au sud, on assiste à une innovation majeure : l'instruction de jeunes laïcs non destinés à la cléricature dans les monastères, contrairement à la tradition antique du précepteur.
C'est au VIIIe siècle que se produisent les progrès les plus spectaculaires sur le sol anglais. Une période préparée par des figures comme saint Wilfrid et Benoît Biscop, et ouverte par l'envoi par le pape de Théodore, archevêque de Cantorbéry, et de l'Africain Hadrien, abbé de Saint-Pierre-Saint-Paul. Au sein de son école épiscopale, Théodore organise en effet un enseignement riche, comprenant métrique, astronomie, comput (qui sera retravaillé par Bède), médecine, exégèse, mais aussi grec, caractéristique très exceptionnelle. Dans le même temps, l'école monastique dirigée par Benoît Biscop puis par Hadrien adopte un programme proche, certains élèves ayant d'ailleurs probablement fréquenté successivement les deux écoles.
Parmi leurs élèves se trouve Aldhelm, auteur de brillantes œuvres qui conduit dans le Wessex le développement de l'abbaye de Malmesbury à partir de 675, avant de poursuivre son enseignement en tant qu'évêque de Sherborne à partir de 705. Ces centres et d'autres écoles proches (Winchester, Exeter, Glastonbury, Waltham) permettent l'émergence d'une génération de clercs cultivés dont Boniface et son disciple Lull sont les plus illustres représentants, marqués par l'héritage littéraire d'Aldhelm, et qui suivent Willibrord sur le continent.
Mais c'est au nord, en Northumbrie, que se trouvent au VIIIe siècle les plus grandes écoles d'Angleterre. Les abbayes de Wearmouth et Yarrow sont le principal centre de cette « renaissance northumbrienne ». Fondées par Benoît Biscop elles réalisent sous Céolfrid (à partir de 686) l'Amiatinus destiné à Grégoire II. Les deux hommes constituent une bibliothèque renommée comprenant des volumes ramenés de voyages en Gaule et à Rome. Surtout, c'est là que Bède est éduqué, et c'est là qu'il demeure pendant cinquante ans, jusqu'à sa mort en 735, élaborant ses œuvres marquées par l'ambition scientifique et la sobriété littéraire, et amenées à devenir parmi les plus utilisées par les maîtres du Moyen Âge.
À proximité, le monastère de Lindisfarne poursuit une activité modeste sous Cuthbert et Eadfrid, dont l'évangéliaire de Lindisfarne (vers 715) est le produit.
Enfin, les écoles des deux évêchés de Northumbrie sont influencées par l'esprit romain, en particulier grâce à Wilfrid : celle d'Hexham, qu'il crée en 678 et qu'Acca dirige ensuite (706-740), et York où il aménage une bibliothèque et un scriptorium. Ses successeurs poursuivent ce travail, en particulier Egbert, frère du roi de Northumbrie, élève de Bède, et évêque d'York en 732. Ce dernier confie la direction de l'école à son parent Aelbert. Parmi les élèves de ce dernier se trouve le jeune Alcuin, né vers 730, qui dirige à son tour l'école après 766, avant de rejoindre le continent et de devenir l'artisan incontournable de la renaissance carolingienne.
Cette « renaissance northumbrienne » telle qu'on la qualifie parfois, ou plus largement anglo-saxonne, a toutefois pour caractéristique principale son hostilité à la culture classique. Il faut notamment signaler que les arts libéraux n'y sont pas réellement redécouverts : Aldhelm ne retient du trivium que la grammaire et du quadrivium, pour ainsi dire, que le comput. Par ailleurs, lui comme Bède prennent leurs distances avec Cassiodore et Isidore, en rejetant tout particulièrement la rhétorique et la dialectique, qu'ils considèrent comme des armes redoutables entre les mains des hérétiques. Les écoles anglo-saxonnes axent donc leurs programmes de manière originale sur l'étude de la Bible, et la grammaire n'en est que l'instrument. Enfin, l'influence de cette renaissance reste limitée, que ce soit au sein même de l'Église anglaise, qui connaît une grave crise intellectuelle et morale au cours du VIIIe siècle, et chez les laïcs, parmi lesquels seule une minorité de princes bénéficie de l'enseignement des moines. C'est le cas d'Aelfred (685-704) et Ceolwulf de Northumbrie (729-737), Alfwold d'Est-Anglie (713-749), Ethelbert II de Kent (725-762) ou encore Aethilwald de Mercie (716-757).
La partie byzantine de l'Italie est marquée tout au long du VIIe siècle par l'arrivée d'étrangers, chassés par les conquêtes des Perses et des Arabes, ou par la répression religieuse de Byzance. Leur influence est surtout attestée en Sicile où la culture grecque l'emporte à Agrigente, à Syracuse et à Palerme, et la papauté reconnaît la supériorité de certains clercs orientaux, comme Théodore de Tarse et son compagnon, l'Africain Hadrien. Rome reste cependant assez fermée aux influences grecques, notamment par méconnaissance de la langue. Les études n'y sont alors pas privilégiées, comme en témoigne la faiblesse doctrinale romaine dans le conflit monothéliste. La Ville est en revanche renommée pour son enseignement de la liturgie (principalement à la schola cantorum), et pour sa richesse en manuscrits (grâce à l'héritage de Vivarium plus qu'à l'activité du scriptorium du Latran).
Les progrès sont plus notables au VIIIe siècle. La victoire de la papauté contre le monothélisme ouvre en effet une période plus sûre pour les pontifes romains. Alors que la renommée de la schola cantorum attire des clercs de tout l'Occident, on assiste au renouveau de la connaissance du grec et des études helléniques au Latran (les étrangers affluent toujours et plusieurs papes connaissent le grec : Léon II, le Syrien Grégoire III, Zacharie). De plus, un nouveau centre de formation religieuse double la schola : le cubiculum que Zacharie installe bientôt au Latran. La formation des clercs demeure cependant strictement religieuse. Dans le même temps, l'existence d'écoles pour les laïcs n'est pas attestée : l'enseignement familial semble le principal vecteur culturel pour ceux-ci.
Comme elle a survécu aux Ostrogoths, la civilisation romaine survit dans le royaume lombard, notamment après le recul définitif de l'arianisme avec l'installation de la dynastie bavaroise d'Aripert. Les Lombards s'ouvrent au latin et la cour de Pavie est culturellement développée au VIIe siècle, bien qu'uniquement sur le plan religieux. L'activité des monastères est quant à elle mal connue, hormis le cas particulier de Bobbio (voir infra). Au début du VIIIe siècle, sous Liutprand, sont encouragées de nouvelles fondations bénédictines comme Novalaise, Pistoia, Civate et Abbaye de Nonantola. Plus notable est la restauration du Mont-Cassin vers 720, par Petronax, mais là comme dans les centres précédents le modèle suivi est avant tout celui du monachisme ascétique. Le scriptorium du Mont-Cassin ne s'organise que vers 750, et les études classiques n'y trouvent leur essor qu'à la fin du siècle, avec Paul Diacre : la Renaissance carolingienne est alors déjà commencée.
La dernière fondation de Colomban, Bobbio (614) est mieux connue, notamment grâce à l'œuvre de Jonas de Suse, hagiographe de Colomban, qui y est moine de 618 à 640. Il n'est guère probable que Bobbio se soit ouvert à l'étude d'auteurs profanes avant le VIIIe siècle. Dès lors, le scriptorium de Bobbio recopie des œuvres de grammaire, de métrique, de glose, d'histoire profane, ce qui en fait un cas unique d'« humanisme bénédictin ».
Ce dynamisme est probablement dû aux progrès des écoles urbaines de l'Italie du nord. L'essor des villes lombardes est en effet doublé de celui d'une classe de notables instruits (notaires, scribes), ce qui suppose l'existence d'écoles : celles-ci sont désormais exclusivement cléricales dans les villes comme dans les campagnes. Dans la capitale, Pavie, l'école épiscopale est un foyer d'études littéraires où les arts libéraux sont connus. De Cunincpert (688-700) à Liutprand (713-744), la cour s'ouvre à la culture, accueillant Boniface en 719 et 739, Paul Diacre mais aussi le jeune Pépin, envoyé par Charles Martel en 735 pour sa formation. En revanche, aucun enseignement juridique n'est encore vraisemblablement dispensé. Hors de Pavie, les études s'organisent aussi à Milan sous l'évêque et poète Benoît (✝725), à Ravenne (ville byzantine sous l'influence lombarde, d'ailleurs victime des représailles de Byzance dès 709) ou encore à Cividale, dans le Frioul, ville natale de Paul Diacre qui y suit sa formation de base. La cour frioulane a d'ailleurs une activité culturelle remarquée grâce à des personnalités comme Arichis, originaire du Frioul et plus tard duc de Bénévent, que Paul Diacre loue pour sa culture.
Dans la deuxième moitié du VIIe siècle, la Gaule, notamment nourrie par l'apport des Irlandais, est le théâtre d'un renouveau littéraire dans les écoles et scriptoria du nord et du centre, comme dans les abbayes de Corbie, Luxeuil (où est réalisé vers 700 un fameux Lectionnaire peint), Soissons, Fontenelle, ou autour des évêchés de Nivelles, Rebais, Remiremont, Laon, Autun, Auxerre mais aussi Lyon dont la bibliothèque est réputée. Une activité littéraire est aussi constatée plus au sud, à travers des Vies de saints rédigées à Méobecq, Saint-Maixent, Volvic, Rodez ou Ligugé. Mais ce renouveau est mis en danger par les conflits qui ravagent la Gaule romaine au VIIIe siècle, entre les razzias des Sarrasins et la conquêt des Francs : en Aquitaine, en Provence, à Lyon en Bourgogne, les centres de culture déclinent, y compris des pôles d'importance comme Lérins. L'illettrisme est également une réalité bien perceptible chez les laïcs (à travers l'usage fréquent de croix en guise de signature) et chez les clercs, quoique dans une moindre mesure puisque les membres de l'administration y sont recrutés (pour la cour carolingienne notamment).
La vigueur monastique demeure toutefois une réalité dans de nombreux scriptoria de Gaule et de Germanie. À Corbie toujours, où est élaborée une écriture combinant éléments anglo-saxons et romains, qui préfigure la « minuscule caroline ». Dans les scriptoria de Luxeuil, de Laon et, plus au sud, de Fleury et de Saint-Martin de Tours. Les manuscrits peints dans ces différents ateliers présentent des traits communs (motifs orientaux et coptes, éléments géométriques ou zoomorphes) permettant d'y voir une véritable « école mérovingienne ».
En Germanie, le travail des missionnaires, Pirmin, Killien, Willibrord, puis Boniface permet l'établissement de centres d'études dynamiques parmi lesquels les plus renommés demeurent Fulda, le monastère de Boniface, et une fondation colombanienne, Saint-Gall. Les études chrétiennes se propagent aussi en Bavière, où se ressent aussi l'influence irlandaise : on le constate chez Virgile de Salzbourg et Arbeo de Freising à l'orée de la renaissance carolingienne aura déjà commencé.
Enfin, il faut souligner le rôle de la cour franque dans l'essor culturel qui se prépare. Car si Charles Martel est la cible de critiques de la part des milieux ecclésiastiques, en raison de la sécularisation des biens de l'Église, il ne rejette pas pour autant l'influence chrétienne, et surtout de la sphère monastique. Dès Pépin de Herstal l'œuvre des missionnaires irlandais est encouragée, mais Charles va plus loin, d'une part en confiant l'éducation de ses fils Pépin et sans doute Carloman aux moines de Saint Denis, d'autre part en s'y faisant enterrer. Les liens privilégiés ainsi établis sont ensuite entretenu. C'est à Saint-Denis que Pépin se fait sacrer par Étienne II en 754. Et sur le plan strictement culturel c'est là qu'est sans doute rédigé le Liber Historiae Francorum, essentiel dans la formation du mythe de l'origine troyenne. Outre Saint-Denis, d'autres moines ont du moins passagèrement un rôle auprès de la cour : ainsi Chrodegang, qui pousse Pépin à la généralisation du chant liturgique romain, l'abbé de Saint-Vaast Aldaric, Virgile de Salzbourg qui séjourne deux ans à la cour, et peut-être Ambroise Autpert qui y aurait passé sa jeunesse. Il faut par ailleurs noter que la cour connaît aussi sous Charles et ses fils des progrès dans les questions juridiques, avec des copies de la loi salique, de la loi des Alamans et de la loi des Ripuaires, alors même qu'on constate dans tout le royaume franc un renouveau de l'attention prêtée aux actes et à leur préservation. Enfin, si peu d'efforts sont remarqués en ce qui concerne le progrès des écoles, Chrodegang s'efforce de réformer l'enseignement en ce qui concerne son évêché de Metz : sa règle préfigure la Renaissance carolingienne.
Les conditions de celle-ci sont donc réunies. Culture monastique de haut niveau, d'une part (illustrée notamment par les argumentations du concile de Gentilly de 767 face aux évêques grecs, sur la question trinitaire et sur le culte des images) ; volonté réformatrice des pippinides, d'autre part.