Le lemme de classe monotone, dû à Wacław Sierpiński et popularisé par Dynkin, permet de démontrer, de manière économique, l'égalité entre deux lois de probabilité : de même que deux applications linéaires qui coïncident sur une base coïncident sur l'espace entier, deux mesures de probabilité qui coïncident sur un π-système, coïncident sur la tribu engendrée par ce π-système.
Dans certains ouvrages, le lemme de classe monotone apparaît sous le nom de « Théorème pi-lambda de Dynkin ».
Soit deux mesures de probabilité et définies sur La classe est une classe monotone.
Le lemme de classe monotone a une conséquence immédiate
Lemme d'unicité des mesures de probabilité — Deux mesures de probabilité et définies sur l'espace probabilisable et coincidant sur le π-système concident aussi sur la tribu engendrée par :
On pose
On vérifie facilement que est une classe monotone. Comme est une classe monotone contenant contient la plus petite classe monotone contenant à savoir
Parmi de nombreuses applications importantes du lemme d'unicité, citons celle qui est peut-être la plus importante :
Corollaire — Il suit que :
On pose
La classe est un π-système, et Comme les deux mesures de probabilité et ont même fonction de répartition, i.e.
et coïncident sur donc sur Par définition, deux variables aléatoires réelles, et ont même fonction de répartition si leurs lois de probabilité, et ont même fonction de répartition :
Ainsi, si et ont même fonction de répartition, et coïncident sur donc
Expliquons brièvement pourquoi :
Pour l'inclusion en sens inverse ( contient ), notons que est la tribu engendrée par tous les fermés de alors que est engendrée par certains fermés de seulement.
Par exemple,
Critères — Soit X et Y deux variables aléatoires réelles définies sur un espace probabilisé
La démonstration du dernier critère ne nécessite pas le lemme de classe monotone, mais ce lemme est très utile pour la démonstration des deux premiers critères. On peut utiliser le deuxième critère pour démontrer, par exemple, que dans la méthode de rejet, le nombre d'itérations est indépendant de l'objet aléatoire (souvent un nombre aléatoire) engendré au terme de ces itérations. Pour la démonstration de ces critères, ainsi que pour la démonstration du lemme de regroupement, on a besoin de la définition et de la proposition suivantes.
Définition — Dans un espace probabilisé une famille finie de classes incluses dans est une famille indépendante si et seulement si
Proposition — Si, dans un espace probabilisé une famille finie de π-systèmes inclus dans est une famille indépendante, alors la famille est une famille de tribus indépendantes.
On pose
On vérifie facilement que est une classe monotone. Comme est une classe monotone contenant contient la plus petite classe monotone contenant à savoir La nouvelle famille de π-systèmes obtenue en remplaçant par dans la famille est donc encore une famille de π-systèmes indépendants. On peut par le même raisonnement remplacer successivement chaque par dans la famille sans que cette famille perde sa propriété d'indépendance. Notons qu'une tribu, et en particulier chaque est aussi, nécessairement, un π-système.