Un problème de santé publique à l'échelon mondial
Les mutilations génitales féminines sont désormais considérées comme un problème de santé publique prioritaire par les organismes internationaux, gouvernementaux ou non, tel le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, qui œuvrent très activement dans le but de sensibiliser les gouvernements et les populations des pays concernés.
Dans les pays occidentaux, étant donné la multiplication des cas dans les populations immigrées des pays concernés, les gouvernements nationaux commencent également à envisager le problème très sérieusement, en élaborant des plans d'éducation en faveur de la prévention des pratiques de mutilations génitales féminines, et en légiférant dans le sens d'une répression accrue des cas avérés.
Il existe en outre un nombre croissant d'associations de terrain œuvrant en faveur de l'abolition des mutilations sexuelles.
Conséquences physiques, sexuelles et psychologiques
Une étude de l'OMS sur les mutilations génitales féminines, effectuée en 1998, donne des détails sur les conséquences physiques, psychologiques et sexuelles chez les femmes et les filles qui les subissent.
Les conséquences physiques répertoriées par l'OMS sont les suivantes : décès, hémorragies, chocs, lésions des organes voisins, infections, douleurs aiguës, absence de cicatrisation, formations d'abcès, dermoïdes, kystes, chéloïdes, neuromes de cicatrice, dyspareunie, VIH/SIDA, hépatite B et autres maladies transmises par le sang, pseudo-infibulation, infection des voies génitales, dysménorrhées, rétention urinaire, infection des voies urinaires, obstruction chronique des voies urinaires, incontinence urinaire, sténose de l'ouverture artificielle du vagin, complications plus fréquentes lors du travail et de l'accouchement.
Les conséquences sexuelles sont évidemment nombreuses, la principale résidant dans le fait que le gland clitoridien est la partie la plus sensible des organes génitaux externes de la femme. On y retrouve des corpuscules tactiles spécifiques, dits de la volupté. Ils n’existent nulle part ailleurs, et la blessure ou l'ablation partielle ou totale du clitoris entraînent inévitablement une altération de la sensibilité sexuelle : l'autosexualité est rendue impossible car douloureuse.
Quant aux complications psychologiques, elles naissent non seulement de la douleur endurée par les femmes concernées, mais aussi des conséquences calamiteuses fréquentes telles que l'incontinence urinaire et fécale. En pareil cas, la jeune femme ne peut plus retenir ni ses urines ni ses selles, qu’elle perd en permanence. De ce fait, elle est progressivement mise à l’écart par sa famille et par son village. Les tentatives de suicide sont alors fréquentes. De nombreux auteurs rapportent des complications psychiatriques, des angoisses, et notamment des dépressions.
Législation
La plupart des pays occidentaux ont légiféré en faveur de l'interdiction et de la répression des pratiques de mutilations génitales féminines. Il existe toutefois des différences notables entre les pays : par exemple, la circoncision féminine, dite sunna (l'équivalent de la circoncision masculine), pratiquée pour des raisons médicales, constitue un acte légal sur les enfants aux États-Unis, qui autorisent également les autres formes de MGF sur les femmes adultes consentantes. En revanche, au Royaume-Uni, la loi prévoit une interdiction totale de tous les types de MGF. Au Canada, le seul fait de risquer de telles mutilations constitue un motif recevable de demande d'asile politique. En France, au cours de ces dernières années, plusieurs femmes ayant pratiqué l'excision sur des jeunes filles mineures ont été condamnées à des peines d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à cinq ans, les parents étant eux-mêmes condamnés à des peines de 6 à 15 mois.
Certains pays concernés ont également interdit les pratiques de mutilations génitales féminines, mais il est alors fréquent qu'elles se perpétuent dans la clandestinité, d'autant qu'il s'agit rarement d'une question prioritaire du point de vue de ces nations. Certains autres pays ont préféré œuvrer en faveur d'une médicalisation de la procédure, tandis que d'autres n'ont encore jamais légiféré sur la question.
Dans les pays occidentaux, il existe un mouvement de plus en plus virulent en faveur de l'interdiction de ces pratiques sur les mineurs à l'échelon international. Les défenseurs des pratiques de mutilations génitales féminines voient en cela une expression de l'impérialisme culturel de l'Occident, tandis que leurs opposants considèrent que les droits de l'homme sont universels et, donc, réfutent tout argument d'exception culturelle.
Législations dans les pays où les MGF sont pratiques courantes (informations du Département d'État des États-Unis) :
- Burkina Faso : Une loi interdisant les MGF a été promulguée en 1996, pour entrer en vigueur en février 1997. Auparavant, il existait déjà un décret présidentiel établissant un Comité national contre l'excision et prévoyant des amendes à l'encontre des personnes reconnues coupables d'excision sur des fillettes ou des femmes. La loi de 1996 a renforcé la répression. Depuis, plusieurs exciseuses ont été condamnées à des peines d'emprisonnement
- Côte d'Ivoire : Une loi promulguée le 18 décembre 1998 prévoit que toute atteinte à l'intégrité des organes génitaux d'une femme, par voie de mutilation totale ou partielle, excision, désensibilisation ou toute autre pratique, si elle s'avère sanitairement néfaste, est passible d'une peine d'emprisonnement de un à cinq ans, et d'une forte amende (de 360 000 à deux millions de Francs CFA). La peine est portée de cinq à vingt ans d'emprisonnement si la victime meurt des suites de son opération. Par ailleurs, si la procédure est effectuée par un médecin, il risque jusqu'à cinq ans d'interdiction de pratique professionnelle.
- Djibouti : Les MGF ont été interdites par la révision du Code Pénal du pays, entrée en vigueur en avril 1995. L'article 333 du Code Pénal prévoit, pour les personnes reconnues coupables de ces pratiques, une peine d'emprisonnement de cinq ans et une amende de un million de Francs de Djibouti.
- Égypte : Il n'existe en Égypte où, à l'heure actuelle, 97 % des femmes subissent encore l'excision, aucune loi spécifique à l'encontre des MGF. Le Code Pénal prévoit toutefois des cas de « blessure » et de « traumatisme intentionnel ayant entraîné la mort », qui peuvent éventuellement être juridiquement applicables. On a relevé dans la presse au moins treize cas de personnes poursuivies sur la base des termes du Code Pénal, notamment des médecins, des sages femmes et des barbiers, accusés d'avoir pratiqué des MGF ayant entraîné des hémorragies, des états de choc et des décès. Il existe en outre un décret ministériel qui interdit les MGF. En décembre 1997, la Cour de Cassation égyptienne a rendu un arrêt en faveur d'une interdiction gouvernementale de ces pratiques, dans lequel il est stipulé que les contrevenants s'exposent à des sanctions criminelles et administratives. Malgré cette interdiction, les MGF se perpétuent dans de nombreux villages en Égypte, même si certains, comme Abou Shawareb en juillet 2005, ont décidé d'eux-mêmes de mettre fin à ces pratiques.
- Ghana : En 1989, le chef du gouvernement du Ghana, le Président Rawlings, s'est formellement prononcé contre les MGF et les autres types de pratiques traditionnelles néfastes. L'article 39 de la Constitution du Ghana contient en outre des éléments visant l'abolition des pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé et au bien-être des personnes. Certains pensent que cette loi a, en fait, généré une migration des pratiques vers la clandestinité.
- Guinée : Les MGF sont illégales en Guinée, selon l'article 265 du Code Pénal. Elles sont punies par une peine de travaux forcés à perpétuité et, si elles entraînent le décès de la victime dans un délai de 40 jours, le contrevenant s'expose à la peine de mort. Aucun cas de MGF n'a toutefois, à ce jour, été porté devant les tribunaux. L'article 6 de la Constitution guinéenne, qui interdit les traitements cruels et inhumains, peut aussi être interprété dans le sens de l'inclusion de ces pratiques, si un cas venait à être porté devant la Cour Suprême. L'un des membres de la Cour Suprême de Guinée travaille actuellement en collaboration avec une ONG locale, en vue d'insérer dans la Constitution guinéenne une clause spécifique interdisant ces pratiques.
- Indonésie : Les autorités préparent actuellement un décret interdisant aux médecins et aux personnels paramédicaux toutes pratiques de MGF. Les MGF sont aujourd'hui encore très répandues en Indonésie, qui constitue la plus grande nation musulmane du monde. Azrul Azwar, le Directeur général des affaires de santé du pays, a déclaré que « Toutes les structures de santé gouvernementales seront formées à relayer les informations concernant la décision d'interdiction et l'étendue du problème de la circoncision féminine.»
- Nigeria : Au Nigeria, il n'existe aucune loi fédérale interdisant les pratiques de MGF. Les opposants à ces pratiques se réfèrent à la section 34(1)(a) de la Constitution de la République Fédérale du Nigeria de 1999, qui stipule que « aucun individu ne sera soumis à la torture ou à des traitements inhumains ou dégradants », pour en appeler à l'interdiction des pratiques de MGF sur tout le territoire. Un membre du parlement a élaboré un projet de législation en faveur de l'interdiction, mais ce projet n'est pas encore passé en commission.
- Ouganda : Il n'existe en Ouganda aucune loi réprimant les pratiques de MGF. En 1996, toutefois, un tribunal a statué en faveur de la prohibition de ces pratiques, sur la base des termes de la section 8 de la Charte des Enfants, promulguée cette même année, qui rend illégal le fait de soumettre un enfant à des pratiques sociales ou coutumières néfastes pour sa santé.
- République centrafricaine : En 1996, le Président a émis une ordonnance interdisant les MGF sur tout le territoire. Cette ordonnance a force de loi, et toute infraction à son égard est passible d'une peine d'emprisonnement allant de un mois à deux ans, et d'une amende de 5100 à 100 000 francs centrafricains. Il ne semble toutefois pas que cette loi ait jamais été appliquée dans les faits.
- Sénégal : Depuis une loi promulguée en janvier 1999, les pratiques de MGF sont illégales au Sénégal. Le Président Diouf a fait un appel solennel en faveur de l'arrêt de ces pratiques et de la législation les interdisant. La loi modifie le Code Pénal en faisant des MGF des actes criminels, réprimés par une sentence pouvant aller de un à cinq ans d'emprisonnement. Un porte-parole du RADDHO (Rassemblement africain pour la défense des droits de l'homme) a déclaré dans la presse : « L'adoption de la loi ne se suffit pas en elle-même, car il est désormais nécessaire de la faire appliquer rigoureusement pour que les femmes en bénéficient. » Quelques femmes se penchent sur la question.
- Somalie : En Somalie, il n'existe aucune loi nationale spécifique interdisant les MGF. Le Code Pénal mis en place par le précédent gouvernement prévoit toutefois des clauses de « blessures », « blessures graves » et « blessures très graves », qui pourraient éventuellement être juridiquement applicables. En novembre 1999, le Parlement de l'administration Puntland a approuvé à l'unanimité une législation rendant ces pratiques illégales. Il ne semble toutefois exister aucun cas de mise en application de cette loi.
- Tanzanie : La section 169A de la Circulaire spéciale sur les crimes sexuels de 1998 interdit les MGF. Ces pratiques sont punies de peines d'emprisonnement allant de cinq à quinze ans, et/ou d'une amende ne pouvant pas excéder 300 000 shillings tanzaniens. Cette législation a débouché sur quelques arrestations, mais qui ne semblent pas avoir, jusqu'à présent, abouti sur des poursuites pénales.
- Togo : Le 30 octobre 1998, l'Assemblée Nationale a voté à l'unanimité une loi interdisant les pratiques de MGF. Les sentences prévues vont de peines d'emprisonnement de deux mois à dix ans, à des amendes de 100 000 à un million de francs CFA. Toute personne qui aurait connaissance de telles pratiques dans son entourage et qui n'en informerait pas les autorités, est passible d'une peine de un mois à un an d'emprisonnement, et d'une amende de 20 000 à 500 000 Francs togolais.
En France
La législation française fait obligation aux soignants de dénoncer toutes agressions sexuelles sur mineur. Les médecins sont tenus au signalement des cas (même potentiels) de mutilations génitales féminines, même si ces derniers sont ou devraient être effectués hors du territoire français. Depuis les années 1980, des féministes (la Dr Emmanuelle Piet, Maître Linda Weil-Curiel, entre autres) se sont emparées de l'excision en France pour faire condamner les exciseuses, les parents complices et surtout, faire de la prévention. Celle-ci, notamment au sein des PMI (Protections maternelles et infantiles), a porté ses fruits.Sur l'excision en France, de 1982 à aujourd'hui: "Exciseuse", Natacha Henry et Linda Weil-Curiel, City éditions 2007.