Un panier à salade américain (nommé là-bas Paddywagon) de Duluth, Minnesota en 1909
Le panier à salade est un véhicule cellulaire de police, destiné au transport des prévenus et des prisonniers. Son nom lui a été donné par analogie avec le « panier à salade », récipient grillagé destiné à essorer la salade après lavage. Primitivement, le véhicule de police hippomobile, à claire-voie, qui transportait les prisonniers, les secouaient copieusement sur les rues alors pavées des agglomérations.
Littérature française
Victor Hugo, en 1842, dans la « Lettre quatrième : De Villers-Cotterêts à la frontière » de son livre Le Rhin, recueil de lettres fictives à un ami, évoque le fourgon cellulaire en ces termes :
« Cette voiture, que la lanterne éclaira alors vivement, n’avait d’autre ouverture que de petits trous ronds grillés aux deux faces latérales et une porte pratiquée à l’arrière et fermée en dehors par de gros verrous. L’homme au falot tira les verrous, la portière s’ouvrit, et l’intérieur de la carriole apparut brusquement. C’était une espèce de boîte, sans jour et presque sans air, divisée en deux compartiments oblongs par une épaisse cloison qui la coupait transversalement. La portière unique était disposée de manière qu’une fois verrouillée elle revenait toucher la cloison du haut en bas et fermait à la fois les deux compartiments. Aucune communication n’était possible entre les deux cellules, garnies, pour tout siège, d’une planche percée d’un trou. [...] Il était clair que c’était une voleuse, ou peut-être même quelque chose de pis, que la gendarmerie transférait d’un lieu à l’autre dans un de ces odieux véhicules que les gamins de Paris appellent métaphoriquement paniers à salade ; mais enfin c’était une femme. »
Honoré de Balzac, dans la troisième partie, intitulée « Où mènent les mauvais chemins », de son roman Splendeurs et misères des courtisanes, publié en 1846, consacre à ce véhicule un paragraphe le décrivant et indiquant l'étymologie probable de l'expression populaire qui le désigne :
« Cette ignoble voiture à caissejaune, montée sur deux roues et doublée de tôle, est divisée en deux compartiments. Par devant, il se trouve une banquette garnie de cuir sur laquelle se relève un tablier. C'est la partie libre du panier à salade, elle est destinée à un huissier et à un gendarme. Une forte grille en fer treillissé sépare, dans toute la hauteur et la largeur de la voiture, cette espèce de cabriolet du second compartiment où sont deux bancs de bois placés, comme dans les omnibus, de chaque côté de la caisse et sur lesquels s'asseyent les prisonniers; ils y sont introduits au moyen d'un marchepied et par une portière sans jour qui s'ouvre au fond de la voiture. Ce surnom de panier à salade vient de ce que primitivement, la voiture étant à claire-voie de tous côtés, les prisonniers devaient y être secoués absolument comme des salades. Pour plus de sécurité, dans la prévision d'un accident, cette voiture est suivie d'un gendarme à cheval, surtout quand elle emmène des condamnés à mort pour subir leur supplice. Ainsi l'évasion est impossible. La voiture, doublée de tôle, ne se laisse mordre par aucun outil. Les prisonniers, scrupuleusement fouillés au moment de leur arrestation ou de leur écrou, peuvent tout au plus posséder des ressorts de montre propres à scier des barreaux, mais impuissants sur des surfaces planes. Aussi le panier à salade, perfectionné par le génie de la police de Paris, a-t-il fini par servir de modèle pour la voiture cellulaire qui transporte les forçats au bagne et par laquelle on a remplacé l'effroyable charrette, la honte des civilisations précédentes, quoique Manon Lescaut l'ait illustrée. »
Maurice Leblanc livre, en 1906, une autre description du panier à salade, dans la troisième nouvelle narrant les aventures de son héros Arsène Lupin, publiée le 15 janvier 1906, sous le titre « La Vie extraordinaire d'Arsène Lupin : L'Évasion d'Arsène Lupin », dans les colonnes du n° 12 du mensuel Je Sais Tout et reprise, en juin 1907, sous le titre simplifié « L'Évasion d'Arsène Lupin », dans le recueil Arsène Lupin gentleman cambrioleur, publié chez Pierre Lafitte et Cie. La description du véhicule, qui semble différer notablement de ce que rapportaient Hugo et Balzac une soixante d'années plus tôt, tient en un paragraphe et témoigne peut-être des perfectionnements que Balzac attribuait au « génie de la police de Paris » :
« Ces voitures pénitentiaires, vulgairement appelées « paniers à salade », sont divisées, dans leur longueur, par un couloir central, sur lequel s’ouvrent dix cases : cinq à droite et cinq à gauche. Chacune de ces cases est disposée de telle façon que l’on doit s’y tenir assis, et que les cinq prisonniers, outre qu’ils ne disposent chacun que d’une place fort étroite, sont séparés les uns des autres par des cloisons parallèles. Un garde municipal, placé à l’extrémité, surveille le couloir. »