En cinématique ou en géométrie différentielle, le repère de Frenet ou repère de Serret-Frenet est un outil d'étude du comportement local des courbes. Il s'agit d'un repère local associé à un point P, décrivant une courbe (C). Son mode de construction est différent selon si l'espace ambiant est de dimension 2 (courbe plane) ou 3 (courbe gauche) ; il est possible également de définir un repère de Frenet en toute dimension, pourvu que la courbe vérifie des conditions différentielles simples.
Le repère de Frenet, et les formules de Frenet donnant les dérivées des vecteurs de ce repère, permettent de mener de façon systématique des calculs de courbure, de torsion pour les courbes gauches et d'introduire des concepts géométriques associés aux courbes : cercle osculateur, plan osculateur, parallélisme des courbes...
Le cadre est le plan euclidien orienté rapporté à un repère orthonormal, les coordonnées étant notées x et y et l'origine O. L'arc est supposé défini par des fonctions de classe , et régulier. Pour simplifier l'étude, il faut utiliser un paramétrage normal M(s)=(x(s),y(s)).
On se place en un point s particulier. Comme l'arc est paramétré par l'abscisse curviligne, le vecteur dérivé en s est unitaire et tangent à la courbe, il est dirigé dans le sens du mouvement. Il porte le nom de vecteur tangent unitaire à la courbe et est noté traditionnellement T(s).
Le vecteur normal unitaire N(s) complète T(s) en une base orthonormale directe, appelée base de Frenet. Il s'obtient en effectuant une rotation de (quart de tour dans le sens direct) du vecteur T(s). Le repère de Frenet est constitué en prenant en outre pour origine le point M(s). Très souvent on abrège les notations en omettant le paramètre.
Le trièdre de Frenet est un repère mobile puisque les éléments de ce repère changent selon le point considéré. En physique, il ne faut pas confondre cette notion avec celle de référentiel : puisque les vecteurs de Frenet se déplacent avec le point, s'il s'agissait d'un référentiel alors le vecteur position serait le vecteur nul, et la vitesse serait également nulle.
Remarque : il arrive qu'on introduise le vecteur N comme , en plongeant le plan euclidien dans un espace de dimension trois, et en notant k un vecteur complétant la base (i,j) du plan en une base orthonormale directe. Les deux façons de procéder sont équivalentes.
Comme les vecteurs de la base de Frenet forment en permanence une base orthonormale, leurs dérivées vérifient un certain nombre de relations. Notamment le vecteur dérivé de T est orthogonal à T ; il existe donc pour le point de paramètre s un coefficient γ(s) tel que
On donne à γ(s) le nom de courbure (algébrique) de la courbe. Son inverse est souvent utilisé en cinématique et porte le nom de rayon de courbure algébrique R.
On peut également interpréter la courbure comme la vitesse de rotation de la base de Frenet par rapport à une direction fixe (encore une fois, en paramétrage normal) : voir à ce sujet l'article courbure d'un arc.
On appelle centre de courbure Ω de la courbe au point P le point de coordonnées (0,R) dans le repère de Frenet. Vectoriellement, il est obtenu de la façon suivante (exceptionnellement, on utilise ici les flèches pour noter les vecteurs)
Le cercle de centre Ω et de rayon |R| est appelé cercle de courbure ou cercle osculateur à la courbe en P. Il approche en général la courbe mieux que ne le fait la tangente. Courbure et cercle de courbure donnent non seulement une idée de la direction dans laquelle la courbe avance (direction de la tangente), mais aussi de sa tendance à tourner de part ou d'autre de cette tangente.
Les formules de Frenet donnant les dérivées des vecteurs de la base de Frenet s'écrivent à l'aide de la courbure
Reprenant un arc paramétré f(t)=(x(t),y(t)) birégulier, sans le supposer donné en paramétrage normal, il suffit pour exploiter les formules de Frenet de faire le lien entre la dérivation par rapport à t ou à s, ce qui se fait au moyen de la vitesse scalaire
Il est alors possible d'expliciter les vecteurs vitesse et accélération dans la base de Frenet
On retrouve que le vecteur vitesse est tangentiel, allant dans le sens du mouvement. La première composante du vecteur accélération dans la base de Frenet est appelée accélération tangentielle ; elle rend compte de la variation de la vitesse scalaire. L'autre composante, accélération normale , est influencée par la géométrie de la courbe : est d'autant plus forte que le virage effectué est plus serré, et aussi que la vitesse est élevée.
Il est donc possible d'évaluer le rayon de courbure algébrique R en formant le déterminant de ces deux vecteurs
On retrouve la proposition VI des Principia de Newton.
Vérification des dimensions :
Il est important de réaliser que le repère de Frenet a été défini à partir d'un paramétrage normal de la courbe. Tous les reparamétrages préservant l'orientation donneront la même base de Frenet, et la même valeur de la courbure. Il y a également invariance par changement du repère fixe de référence.
En revanche les changements d'orientation de la courbe ou de l'espace ambiant renversent certains signes. Précisément
Mouvement circulaire accéléré
Le vecteur dérivé s'écrit sous la forme vT avec
Le vecteur normal unitaire est donc
Et la courbure vaut γ=1. Le rayon de courbure est constant, égal à 1. Le cercle osculateur coïncide en permanence avec le cercle sur lequel la trajectoire est inscrite. On aurait pu éviter tous ces calculs en utilisant le reparamétrage u=t2.
Courbe en coordonnées polaires
Si la courbe est donnée en coordonnées polaires paramétriques r(t),θ(t), les vecteurs vitesse et accélération peuvent être calculés dans la base mobile. On note par un point la dérivation par rapport au paramètre t
La courbure [inverse d'une longueur] est donnée par
et le rayon de courbure (L) par :