Le calcul des propositions est un calcul logique restreint. On emploie souvent le nom de proposition pour désigner une formule logique non quantifiée. Il existe deux façons de valider une formule P du calcul des propositions :
Un système de déduction correct doit être construit de façon que, à partir de formules vraies (tautologies), on puisse déduire d'autres formules vraies. Dans ce cas, si est vérifié, alors l'est également.
Le système de déduction sera complet, si inversement, il permet de déduire toute formule vraie. Autrement dit, si est vérifié, le système de déduction doit permettre de démontrer qu'on a également .
Le théorème de complétude du calcul des propositions énonce que les systèmes de déduction, décrits dans les articles calcul des propositions ou déduction naturelle ou calcul des séquents, sont complets. Il y a équivalence entre être une tautologie et être prouvable.
Le théorème de complétude du calcul des propositions classique a été démontré par Paul Bernays en 1926.
Pour le calcul des propositions, il n’est pas nécessaire d’analyser la structure des formules atomiques en prédicats et objets. La seule propriété des propositions atomiques qui compte dans les calculs de la logique classique est leur vérité ou leur fausseté. On peut représenter les propositions par des lettres, p, q, r, ... et les concevoir comme des variables qui peuvent recevoir deux valeurs, V pour vrai, et F pour faux.
Un modèle est défini par l’attribution de valeurs de vérité, V ou F, aux propositions atomiques. Par exemple (p = V,q = F,r = V) désigne le modèle dans lequel il y a trois propositions atomiques p, q, et r, la seconde étant fausse et les deux autres vraies.
On peut définir un calcul des vérités semblable au calcul des nombres et utilisant les connecteurs logiques non , et , ou , implique . Ses axiomes sont données par les tables de vérité suivantes :
Les règles relatives à et s'en déduisent en posant :
On peut alors calculer, par exemple, que dans le modèle
défini par p = F :
On en conclut que est vraie dans le modèle p = F. On montre de même qu'elle est aussi vraie dans le modèle p = V et puisqu’elle ne contient que p comme proposition atomique, elle est vraie dans tous les modèles et est donc une tautologie.
On peut montrer que les systèmes de déduction cités en préambule permettent en particulier d'effectuer les déductions suivantes :
Nous allons maintenant démontrer que, dans ces systèmes :
Il suffit de montrer le théorème pour des modèles finis. En effet, donnons-nous un ensemble infini dénombrable, ordonné par les entiers positifs, de propositions atomiques, toutes distinctes, p1, p2, p3... Un modèle initial de longueur n contient ou bien pi = V ou bien pi = F, mais pas les deux, pour . Comme une proposition P ne contient qu’un nombre fini de propositions atomiques, notons n le plus grand indice d'une proposition pn ayant une occurrence dans P. Si P est vraie dans tous les modèles initiaux de longueur n, alors elle est vraie dans tous les modèles où sa vérité est définie, puisque les propositions pm n'interviennent pas dans P pour m > n.
Pour démontrer (i), on va d’abord démontrer (ii) et (iii) ci-dessous. Soit P une formule propositionnelle, et un modèle. Notons la conjonction de toutes les formules atomiques pn telle que pn = V est dans et de toutes les négations des formules atomiques pn telles que pn = F est dans .
On va démontrer (ii) par induction sur la complexité des formules. Celle-ci est mesurée par le nombre maximal d’opérateurs emboités. Par exemple dans
, le ou et le non sont emboités l’un dans l’autre. Mais le non et le et ne le sont pas. Cette proposition est de complexité 2 parce qu’elle a au maximum deux opérateurs emboités.
Soit pi une proposition de complexité 0, c’est-à-dire une proposition atomique. La formule est dérivable, de même que toute formule du type , où H est n’importe quelle conjonction de propositions atomiques ou de leurs négations qui contient pi parmi elles. Si pi est vraie dans le modèle , contient pi. (ii) est donc démontrée pour les propositions de complexité 0. La démonstration de (iii) est identique.
Supposons que (ii) et (iii) soient vraies pour toutes les propositions de complexité au plus égale à n. Soit P une proposition de complexité n + 1. Deux cas sont possibles.
a) il y a un Q tel que
b) il y a R et S tels que
Cela termine cette démonstration de (ii) et (iii).
Prouvons maintenant (i), le théorème de complétude, par induction sur la longueur des modèles. Soit In l’énoncé : Si P est vraie dans tous les modèles de longueur n alors P est dérivable. Démontrons par récurrence les énoncés In.
Prouvons d’abord I1. Supposons que P est vraie dans tous les modèles de longueur 1, c’est-à-dire les deux modèles p1 = V et p1 = F. On a alors, d'après (ii)
et
. Par la règle de disjonction des hypothèses, on en déduit que
mais
est elle-même une formule dérivable : c’est le principe du tiers-exclu. La règle du modus ponens suffit alors pour démontrer que
.
Supposons que In soit vrai. Soit P une proposition vraie dans tous les modèles de longueur n + 1. Soit
un modèle de longueur n. P est vraie dans
et dans
. D'après (ii), on a alors
et
. Comme ci-dessus, on en déduit que
. Comme
un modèle quelconque de longueur n, l'hypothèse de récurrence In permet de conclure que
. In + 1 est donc vérifiée.
Cela termine cette démonstration du théorème de complétude du calcul des propositions.