Le terme « convulsionnaire » apparaît spontanément à la fin de l'année 1731. Il n'a alors aucune connotation médicale et est parfaitement inconnu des traités de médecine de l'époque. Il est utilisé à la fois par les partisans des convulsions et par leurs détracteurs, qui parlent cependant aussi de « convulsionnistes ».
Après la fermeture du cimetière Saint-Médard, les convulsionnaires se réunissent dans des lieux privés, salons, caves ou greniers. Les séances se déroulent devant un public restreint formé de partisans convaincus. Les convulsions changent progressivement de signification : de signes de guérison, elle deviennent les manifestations d'une agression du corps du convulsionnaire. Celui-ci demande alors aux autres assistants de le « secourir ». Les secours deviennent alors une action des assistants pour détendre et soulager le convulsionnaire. Il s'agit de tirer ou presser ses membres crispés, de l'aider à supporter l'agression. Les médecins et apothicaires du temps se penchent sur le phénomène, surpris de l'absence de douleur des convulsionnaires :
« On le fit approcher d'une petite couchette ou était la convulsionnaire en convulsion. Il examina tous ses mouvemens et aidait comme les autres à empêcher qu'elle ne se blessât en tombant ou en se heurtant. Ces sortes d'agitations irrégulières aiant duré quelques tems, il fut fort surpris de voir tous les membres de cette fille se raccourcir. Alors, examinant de près et touchant sa poitrine et tous ses membres, il remarqua une contraction de nerfs, qui devint par progression si violente que tout son corps se défigurait d'une manière monstrueuse […]. Il nous dit tout d'un coup : tirés-la donc, Messieurs, car elle va mourir. […] Enfin, la contraction redoublant toujours, il nous fit mettre jusqu'à 5 sur chaque membre, que nous tirâmes de toutes nos forces. »
Rapidement, on donne à ces crispations, ces convulsions martyrisantes, une signification symbolique adaptée au contexte de lutte du moment : le convulsionnaire représente l'Église souffrante, persécutée, contrainte de subir les attaques commises contre la Vérité. Les secours sont alors des figurations des attaques menées contre l'Église. Bien entendu, l'Église figurée par les corps des convulsionnaires n'est pas l'Église réelle du temps, mais l'Église idéale des convulsionnaires, celle où les jansénistes ne seraient pas attaqués et où la bulle Unigenitus n'existerait pas :
« Elles tiraient de toutes leurs forces et pour leur en donner davantage, on tirait ces deux demoiselles par les épaules de façon qu'il y avait 4 personnes occupées à ce secours. Pendant cette opération, sœur Françoise [la convulsionnaire] s'écriait : « tirez fort, arrachez ». C'était aynsi qu'ils arrachaient l'Église comme on m'a rapporté qu'elle l'avait dit la veille. »
Les séances convulsionnaires deviennent des mises en scène de la persécution. Les secours se font de plus en plus violents, et la résistance aux coups est une justification de l'efficacité de la grâce et des prises de position des convulsionnaires : leur action est juste puisque les personnes récipiendaires des secours ne semblent pas éprouver de douleur.
On « joue » également, lors de ces séances, des scènes de persécution de l'histoire de l'Église : « Elle représentait aussi un Christ étendu ayant pour lors les bras et les pieds raides comme des barres de fer. Elle figurait également la descente de Croix et estait pour lors comme une personne véritablement morte. Elle représentait aussi les supplices de St Pierre, c'est-à-dire crucifiée la teste en bas […]. Dans le commencement de ce supplice elle chantait quelquefois un magnificat et d'autrefois un cantique, elle paraissait véritablement morte. […] Ses bras et ses pieds absolument raides, sans mouvement, elle renaissait ensuite. »