L'histoire du mètre et du système métrique actuellement utilisés dans tous les échanges scientifiques internationaux, de même d'ailleurs que l'histoire de la détermination de la masse de la Terre, constitue en quelque sorte une histoire dans l'histoire générale de la géodésie et de la détermination de la figure de la Terre. L'introduction du mètre et du système métrique fut assurément la conséquence des difficultés que connurent les géodésiens du XVIIIe siècle à disposer en chaque lieu d'un étalon de longueur suffisamment précis et fiable, et facilement reproductible en principe. Le mètre et le système métrique décimal sont avec la Déclaration des droits de l'homme sans doute les choses les plus importantes léguées par la Révolution française à la postériorité. Il est impossible de raconter en détail dans cet article, et dans un autre article qui en constitue la suite, l'histoire politico-économico-scientifique passionnante qui se cache derrière le système métrique.
On sait que les lois de la Nature ne dépendent pas du choix des unités de mesure. Par exemple, l'attraction gravifique diminuera toujours comme l'inverse du carré de la distance, peu importe si l'on exprime la distance en toises ou en mètres. Elle sera toujours proportionnelle au produit des masses des deux corps qui s'attirent, que l'on exprime ces masses en onces ou en kilogrammes. À la rigueur, on pourrait même exprimer l'une des masses en onces, l'autre en grammes, par exemple. Ce qui va changer avec les unités choisies, ce ne sont donc pas les relations entre grandeurs physiques mais seulement les valeurs numériques des constantes qui interviennent dans ces relations. Dans l'exemple considéré, c'est la valeur numérique de la constante d'attraction qui variera selon le système d'unités adopté. De prime abord, on ne peut donc pas dire qu'un système d'unités est meilleur qu'un autre. C'est le fait qu'il s'est avéré pratique à l'usage et surtout le fait qu'il a fini par être accepté par la plupart des nations civilisées qui donnent sa supériorité au système métrique. Certains États ont longtemps été réticents à accepter ce système de mesures, pour des raisons de prestige national ou tout simplement pour des raisons d'hostilité à la France. Pourtant, dès le départ il avait été conçu dans l'idée d'un système supranational, qui n'appartienne à aucune nation particulière mais à l'ensemble de l'humanité, en accord avec les idées généreuses prévalant sous la France révolutionnaire. C'est la raison pour laquelle le mètre fut initialement défini non comme une quelconque longueur matérialisée à un endroit particulier dans un pays particulier, mais comme la dix millionième partie d'un quart de méridien terrestre. En principe, tout le monde y avait accès, mais le mètre n'appartenait à personne en particulier.
Aux environs de 1770 les travaux de triangulation nécessités par la méridienne de France étaient terminés, si l'on excepte certains opérateurs de Cassini qui poursuivaient le canevas géodésique de la carte de France, dont le 1er ordre fut publié dans son ensemble en 1783. La comparaison des toises utilisées au Nord (Laponie), au Pérou, au Cap et en France avait montré que toutes ces toises étaient égales, dans des marges d'erreur de quelques centièmes de ligne. La toise du Pérou fut adoptée comme étalon et devint la toise de l'Académie. C'est à cette toise qu'on devait rapporter les mesures ultérieures. Malheureusement, ceci ne résolvait pas la question de l'unification des mesures, qui dans tout le Royaume de France (sans parler des autres nations) conservaient farouchement leur indépendance anarchique, malgré plusieurs tentatives d'unification. Cette situation, qui s'avéra grave dans ses conséquences à diverses reprises, ne pouvait plus s'éterniser, mais les choses ne changeaient effectivement que lorsque l'Assemblée Constituante nomma en 1790 (donc un an après le début de la Révolution), sur proposition de Charles-Maurice Talleyrand (1754–1838), une commission composée de Jean-Charles Borda (1733–1799), du comte Joseph-Louis de Lagrange (1736–1813), du marquis Pierre-Simon de Laplace (1749–1827), de Gaspard Monge (1746–1818) et de Marie-Jean-Antoine Caritat, marquis de Condorcet (1743–1794). Celle-ci présentait un rapport le 19 mars 1791 dans lequel elle proposait un double choix pour unifier les mesures de longueur : l'unité serait soit un pendule battant la seconde à la latitude de 45° au niveau de la mer, soit la dix millionième partie du quart du méridien terrestre. Le 26 mars 1791, la Constituante adopta ce rapport et le Roi Louis XVI, représentant encore le Pouvoir Exécutif à ce moment, chargea l'Académie de la nomination des commissaires pour sa mise en œuvre. L'astronome Cassini IV, le mathématicien Legendre (ou Le Gendre) et l'astronome Méchain étaient chargés de mesurer la méridienne. Les deux premiers ne tardèrent pas à se retirer et furent remplacés par le jeune astronome Jean-Baptiste Delambre.