Vers l'an 2000, des « Trois Dragons » Taïwan était le premier par sa puissance, devant la Corée du Sud et Singapour. Il était devenu le 12e exportateur mondial, le 3e possesseur de devises, le 2e investisseur de la façade asiatique et le 6e investisseur du monde. Mais il subit deux handicaps majeurs :
La première colonie chinoise sur l’île fut fondée en 1206, mais l’Empire chinois la considérait comme un territoire insulaire sans intérêt.
Les Portugais la découvrirent en 1590 et la baptisèrent « Belle Ile » (« Ilha Formosa » en portugais). Ce nom fait également référence au Pape italo-portugais, le Pape Formose, ( ou « papa Formoso » ) à l'origine évêque de Porto, dont on fêtait cette année là, 1590-1591, le 700e anniversaire de l'accession à la papauté. « Formoso » signifiant "beau". « Ilha Formosa » est aujourd’hui appelée Taïwan. Au début du XVIIe siècle, quand les Hollandais prirent pied, ils ne comptèrent environ 1 500 Chinois, principalement des commerçants et cultivateurs.
En 1661, l’amiral Zheng Chenggong débarqua sur l’île avec 30 000 hommes pour chasser les Hollandais et surtout faire de l’île la base arrière de la reconquête du continent au profit des Légitimistes Ming, chassés par les Mandchous (ce fut un échec car 20 ans après, les Mandchous s’en emparèrent). Les Ming étaient composés principalement de fonctionnaires et lettrés et de leur milice. Seuls les lettrés - environ un millier - furent véritablement actifs : ils apprenaient le chinois aux autochtones. Ce fut le début de la sinisation de Taïwan.
En 1730, l’émigration des Han, interdite en 1390 par un édit impérial, fut ré-autorisée par les Qing. C’est ainsi qu’à la fin du XIXe siècle Taïwan comptait plus de 2 500 000 habitants. En 1895, les Japonais annexèrent l’île et l’émigration s’arrêta net. Ceci étant, ils ne menèrent pas une véritable politique de peuplement. Aussi, lors de la capitulation (Seconde Guerre mondiale), seuls 200 000 Japonais y vivaient. Ils furent tous rapatriés.
Aujourd'hui les deux tiers de la population Han sont les descendants des émigrants « Hokkien » de la région de Xiamen (dans le Fujian). Le reste descend des « Hakkas », un peuple venu du nord de la Chine qui a migré par étapes jusqu’aux massifs limitrophes du Shanxi, Fujian et Guangdong, avant de constituer, dès le début du XIXe siècle, un puissant foyer d’émigration vers Taïwan.
Ces groupes ne représentent aujourd’hui que 2 % de la population, environ 470 000 personnes. Les Han appelaient ces dernières les « Gao shan » (高山, « haute montagne »), depuis 1994 le nom officiel est « Yuan zhu min » (原住民, "aborigènes"). Le gouvernement de Taipei reconnait 13 groupes. Ils se rattachent au système de culture malayo-polynésienne. Autrefois ils vivaient de la chasse, de pêche le long des côtes, et de cultures itinérantes, dont la culture sur brûlis. Désormais ils sont pratiquement acculturés. Leur paysannerie a adopté la riziculture irriguée tandis que les autres vivent principalement du tourisme en mettant en valeur leur folklore.
En 1905, l’île comptait plus de 3,12 millions d’habitants, en 1950 environ 6,5 millions, et aujourd’hui près de 23 millions. Si, dans la première moitié du XXe siècle, la croissance fut relativement modérée, du fait d’une forte mortalité (la population double en 50 ans), elle fut très forte dans la seconde moitié : elle tripla en 45 ans, à cause d’une puissante immigration (replis des nationalistes) et d’une baisse remarquable de mortalité. En 1998, le taux de mortalité n’était que de 5,6/1000, grâce à la relative jeunesse de la population et aussi à une très bonne médecine. Le taux de mortalité infantile est l’indicateur le plus pertinent : il est de 6,7/1000. Mais désormais le pays a accompli sa transition démographique, avec un taux de fécondité de seulement 1,12/femme, parmi les plus bas d’Asie. Cette faible fécondité s’explique, comme partout ailleurs, par le contrôle des naissances (au moyen de la contraception), par l’importance du taux de femme au travail, par la volonté de consommer (surtout de loisirs) et par le très fort taux d’urbanisation (75%). Cette baisse du taux de fécondité associée à la hausse de l’espérance de vie (hommes : 73,3 ans ; femmes : 79 ans) a pour conséquence un vieillissement rapide de la population (9,5% avaient plus de 65 ans en 2004).
Elle est le résultat de contraintes naturelles fortes. Une montagne vide et des plaines peuplées voire surpeuplées (sur la côte, au nord et à l’ouest ; en vallée à l’est). Elle est surtout concentrée au nord, plus près du Japon : dans l’histoire les japonais ont favorisé, pour des raisons de proximité, l’aire de Taipei. Désormais les plaines occidentales ont une densité moyenne de 1 400 habitants/km2 (contre 610 hab./km2 de densité moyenne dans tout le pays).
Le rebord oriental des chaînes montagneuses domine une plaine littorale extrêmement réduite voire inexistante (falaises), tandis que le rebord occidental s’ouvre sur une plaine assez large (15 à 50 km). C’est donc cette dernière qui regroupe l’essentiel de la population, soit plus de 95% ; (puis 2% dans la montagne, et 3% dans la plaine orientale. La région la plus urbanisée est celle de Taipei (5 millions d’hab.), y compris la capitale (3,5 millions), puis celle de Kaohsiung et celle de Taichung (ville même : plus de 1.5 millions d’hab.).
Dans les années 1960, le gouvernement avait entrepris une politique de rééquilibrage qui a largement porté ses fruits. En 1961, fut entrepris un programme d’infrastructure lourd à Kaohsiung, et en 1969 à Taichung. D’autre part il soutient l’activité des villes moyennes comprises entre ces trois pôles en établissant des zones industrielles. La conséquence de cette politique volontariste est une spectaculaire mutation urbaine. Depuis 1950, la proportion des citadins dans les villes de plus de vingt-cinq mille habitants est de 30 à 70%. Parallèlement, l’exode rural, même ralenti par les effets de la réforme agraire et l’industrialisation des campagnes, a entraîné, au début des années 1970, la prédominance des citadins sur les ruraux : ils ne représentent désormais plus que 25% de la population (en 1952 les seuls actifs agricoles comptaient 55%).