Jean Prouvé, né à Paris le 8 avril 1901 et mort à Nancy le 23 mars 1984, est un architecte et un designer autodidacte français.
Il est le fils du peintre art nouveau Victor Prouvé et le père de l'architecte Claude Prouvé.
En 1919, Jean Prouvé part apprendre la ferronnerie d’art dans les ateliers d’Émile Robert à Enghien. Il installe en 1924 son premier atelier à Nancy, berceau de la famille. Ses premières réalisations sont des ferronneries pour des édifices privés : hôtel Thiers de Nancy, devantures de magasins parisiens, grilles du casino de Saint-Jean-de-Luz. Prouvé conservera tout au long de sa carrière le goût de l'expérimentation et le soin du détail hérités de cet apprentissage. Il sera le gagnant d'un grand concours.
En 1950, Jean Prouvé crée une société avec l'architecte-écrivain M. Bataille, les Ateliers Jean Prouvé, liée à une entreprise de charpente métallique. L’objectif est alors de parvenir à produire des maisons industrialisées en grande série pour répondre aux contraintes économiques de la reconstruction. Les premiers modèles sont commandés par le ministère de la Reconstruction. Mais les atermoiements administratifs réduisent l’ambition du projet initial. Malgré une fabrication presque terminée, l’État n’honore pas sa commande et seule une vingtaine de maisons sera finalement construite. Une partie rejoint le lotissement de Meudon, les autres sont expédiées à travers la France, où on les découvre aujourd'hui par hasard. L’expérience prend fin lorsque l'Aluminium français rentre en 1952 dans le capital de son entreprise. Dépossédé de la direction, Jean Prouvé perd le contrôle de sa société.
Néanmoins, cette période trouble est marquée par la conception de bâtiments d'exception (facades de l'immeuble du 5 square Mozart à Paris 1954 ; Pavillon du Centenaire de l'aluminium, M. Hugonet ingénieur, 1955 ; Buvette Cachat à Évian, M. Novarina architecte, 1956) et des fabrications novatrices qui, faute d'obtenir les agréments officiels, restent des prototypes (maison de l'Abbé Pierre ou « des jours meilleurs », 1956 ; école-béquille à Villejuif, S. Ketoff ingénieur, 1957).
Devenu en 1957 responsable du département « bâtiment » d'une société industrielle (CIMT), Prouvé rejoint des lieux de production et met au point des systèmes de façades légères qui bénéficient de ses recherches antérieures et dont l'élément déterminant est le profil raidisseur. Le standard rigoureux est amélioré grâce aux techniques de fabrication de pointe (emboutissage, extrusion) et à une qualité d'exécution qui résout les problèmes de finition et d'isolation (aérogare d'Orly-Sud, Vicariot architecte, 1959) mais n'exclut pas les variantes et les adaptations (hôtel de Ville de Grenoble, M. Novarina architecte, 1966 ; faculté de médecine de Rotterdam, Choisy architecte, 1967).
À titre personnel, il participe à des recherches (maison saharienne avec Charlotte Perriand, 1958), des consultations (verrières à raidisseurs en acier plié du CNIT à Paris-La Défense, Bernard Zehrfuss architecte, 1957), des concours (avec J. Belmont et M. Silvy : écoles GEEP, 1960 ; lycées CCC, 1963).
Son statut d'ingénieur-consultant est officialisé en 1966 quand, quittant la CIMT, Prouvé ouvre un petit bureau d'études où s'élaborent des projets qui font date et démontrent la constante évolution et l'extraordinaire esprit d'adaptation de ce constructeur.
Il collabore avec les architectes les plus prestigieux pour des bâtiments qui portent la marque de son intervention (le CNIT, tour Nobel à Paris-La Défense J. de Mailly architecte, 1967 ; aile V de l'Unesco Paris, Bernard Zehrfuss architecte, 1969 ; siège du PCF à Paris, Oscar Niemeyer architecte, 1970).
Au début des années 1960, Prouvé conçoit en collaboration deux importants systèmes de construction : la « toiture réticulaire à surface variable » qui s'adapte à tous les types de construction (avec L. Pétroff ingénieur) et le Tabouret, procédé mettant en œuvre deux seuls éléments : un poteau et une poutre (Palais des expositions de Grenoble, Claude Prouvé architecte, 1968 ; Université libre de Berlin, Georges Candilis architecte, 1969).
De 1957 à 1970, Prouvé est appelé pour occuper la chaire d'Arts appliqués du Conservatoire national des arts et métiers à Paris. Intéressé depuis toujours par la pédagogie, il met en place un enseignement qui illustre son approche industrielle de la construction, en s'appuyant sur l'analyse d'« objets techniques », de l'automobile à la construction, souvent à partir de ses propres expériences. C'est aussi pour lui l'occasion de formuler ses préoccupations concernant l'intégration du bâti à l'environnement.
La fin de la carrière de Prouvé est marquée par l'expérimentation de nouvelles matières (stations-services cylindriques Total) ou de composants (panneaux de façade de l'université de Lyon-Bron) ainsi que par plusieurs projets trop audacieux pour être réalisés, mais qui apportent à son œuvre une dimension urbanistique (siège du ministère de l'Éducation nationale, avec Belmont et Swetchine, 1970 ; station d'Arc 2000, avec Hayama et Binotto, 1970).
C'est aussi le moment d'une reconnaissance internationale et de belles réussites : réussite technique pour la structure du Palais omnisports de Paris-Bercy (Andrault et Parat architectes, 1978) ou la tour-radar d'Ouessant qui transcende le principe du noyau central en béton ébauché à Maxéville (Jacquin architecte, 1981). Réussite « morale » lorsque Prouvé est plébiscité pour occuper la place difficile de président du Jury international pour le concours du Centre national d'art et de culture voulu par le président Georges Pompidou (1971). Imposant le projet de Renzo Piano et Richard Rogers, c'est en quelque sorte une part de son « héritage culturel » que nous livre Prouvé puisque dans ce bâtiment sont reconnaissables ses apports essentiels à l'architecture technologique, déjà présents dans le marché de Clichy quelque 35 ans plus tôt : structure en acier plié, façade-rideau en panneaux modulaires, mise en évidence des principes constructifs, flexibilité des espaces intérieurs, ainsi qu'une certaine désuétude qui rejoint aussi l'empirisme artisanal de Prouvé.
Ce fut aussi un patron humaniste voire utopiste. Innovant en tout cas. À Nancy, puis à Maxéville. Octroyant à ses salariés les congés payés avant 1936 et promoteur de l'intéressement.