On trouve dans l’œuvre de Cordwainer Smith des thèmes originalement lancés par des auteurs antérieurs ou au contraire développés ultérieurement.
L’âge d'or de l'Instrumentalité peut être vue comme l’aboutissement des préoccupations eugéniques développées dans Le Meilleur des mondes.
L’Humanité est génétiquement parfaite, et les développements technologiques assurent un bonheur et une sécurité totale. La télépathie résout les soucis et angoisses avant qu’ils ne deviennent perturbateur sur le plan social. La médecine et la pharmacologie garantit une vie d’une durée exacte de 400 ans au jour près. Des forces armées discrètes mais omniprésentes sont prêtes à pulvériser tout ce qui pourrait ressembler à une menace physique ou à une rébellion de la part des sous-êtres.
En échange, l’Homme a dû renoncer à son nom, sa combativité, son esprit d’aventure, son système économique, à toute forme d’information médiatique, à toute forme de religion. À cet égard, le sous-peuple apparait beaucoup plus humain que les hommes Eux-mêmes.
Comme dans le roman intitulé Un bonheur insoutenable, l’Homme moyen est abruti de bonheur par voie psychologique et médicamenteuse plutôt que par la force ou la répression. La créativité est jugée dangereuse. On trouve même une référence directe au roman de Ira Levin, quand le survivant du boulevard Alpha Ralpha dénonce et ajuste une "citoyenne malheureuse" qui organise une protestation devant l'hôtel de Rod McBan. Ici aussi, le totalitarisme n'est pas dû à la technologie mais à une minorité humaine (les programmeurs) qui utilise la technologie.
Bien qu’aucune description n’évoque directement l’univers de THX 1138, la référence à une époque où les hommes n’avaient ni nom, ni maladie, ni diversité linguistique est suffisamment présente pour que l'on établisse le lien entre les deux œuvres.
Les habitants de la Norstralie ont énormément de points communs avec les Fremen de Frank Herbert.
Après avoir échappé à une planète hostile qui les a traumatisés, les colons de l'Australie du Nord s'installe sur une planète désertique qu'ils baptisent Norstralie. Elle leur semble paradisiaque en comparaison de l'enfer auquel ils ont échappé. Cette planète est uniformément grise et à peu près sans relief. Le manque d'eau est un gros problème. Leur société pastorale demande une résistance et une opiniâtreté que les autres planètes ont abandonnées.
Une épidémie qui transforme leurs moutons en monstres de plusieurs tonnes se révèle être un fabuleux coup de chance. Les moutons malades sécrètent une matière que l’on ne trouve nulle part ailleurs dans l’univers. Convenablement raffinée, cette matière devient le Santa Clara, la drogue de longue vie indispensable au mode de vie des Hommes de l’Instrumentalité. Ce trésor attire une telle convoitise que la Norstralie échappe de peu au drame.
Elle décide alors de refuser tous les avantages de la richesse et de ne laisser vivre que ses citoyens ayant fait la preuve de leur capacité de survie et de combat. Les autres meurent (littéralement de rire) dans un jardin de mort décoré comme une forêt humide et luxuriante. Les Norstaliens qui auraient pu être les princes-marchands de l'univers sont devenus des "paysans-meurtriers" pour conserver leur mode de vie. Dans une humanité surprotégée au point de ne plus savoir utiliser ses poings, la réputation du Norstalien n'est pas loin de celle du thug ou du ninja.
Le parallèle avec les Fremen est troublant :
Un peuple persécuté pour ses convictions Zensunni s'installe sur une planète désertique qui lui semble un paradis en comparaison à ce qu'il quitte. La planète Arrakis (Dune) est uniformément sableuse et l'eau est un problème. Pour survivre, les Fremen deviennent résistants et opiniâtres.
Arrakis est peuplée de vers géants qui sécrètent une matière que l’on ne trouve nulle part ailleurs dans l’univers. Convenablement raffinée, cette matière devient l’Épice, la drogue de longue vie indispensable au mode de vie de l’Empire et aux voyages spatiaux. Ce trésor attire une telle convoitise qu’Arrakis n’échappe pas au drame.
La société Fremen ne laisse vivre que ses citoyens ayant fait la preuve de leur capacité de survie et de combat. Les autres meurent en duel ou en auto-sacrifice pour récupérer leur eau.
Les Fremen qui auraient pu être les princes-marchands de l’univers sont devenus des "paysans-meurtriers" pour conserver leur mode de vie. Dans une Humanité qui a tout misé sur les pouvoirs de l’esprit, la réputation du Fremen n'est pas loin de celle du Hun d’Attila.